Le 27 février 1901, c'est plus de trois cent mille spectateurs de Milan comme de toute l'Italie qui sont rassemblés, au son des plus grands chœurs de Nabucco, pour rendre hommage à la dépouille de Giuseppe Verdi (1813-1901), l'un des plus illustres Italiens du XIX° siècle. « Italien », c'est bien le premier adjectif qui correspond pour décrire ce personnage exceptionnel, compositeur hors normes d'une trentaine d'opéras dont au moins un tiers de chefs d'œuvre, autant qu'homme farouchement engagé dans la bataille pour les libertés et l'unité en Italie. Car Giuseppe Verdi est avant tout perçu en véritable héros national, symbole du Risorgimento, ce mouvement patriotique et libéral à l'origine de l'unification italienne, oeuvrant par ses opéras – et Nabucco en tout premier lieu – pour une communion patriotique de tous les Italiens.
C'est à ce véritable « monstre » de l'histoire italienne, héros et ferment de l'unité nationale, que choisit de « s'attaquer » l'historien français Pierre Milza. Un choix pas si surprenant que ça de la part d'un grand spécialiste du XX° siècle européen, et notamment des fascismes, quand on considère la place centrale dans ces thèmes de la construction des identités nationales au XIX° siècle : le personnage de Verdi, à la croisée entre la culture et la politique nationale, s'inscrit tout à fait dans cette réflexion sur les différentes dimensions (historiques, politiques, culturelles) et les origines du XX° siècle.
Le regard adopté par Milza est à ce titre tout à fait révélateur : Verdi et son temps, en 2001, n'a rien d'une simple biographie musicale du compositeur, ni même d'un récit traditionnel d'une vie. Il s'agit au contraire d'une réflexion menée sur les interactions entre un homme et un contexte particulier, celui de l'Italie du XIX° siècle. À la naissance de Verdi, l'Italie est éclatée en de nombreux États et dominée par la très réactionnaire Autriche ; les aspirations libérales peinent à s'exprimer. À sa mort, en 1901, l'Italie, unifiée depuis 1860, affirme son identité à l'intérieur comme à l'extérieur, allant jusqu'à adopter une politique nationaliste et impérialiste. Entre les deux, il y a eu des guerres, une difficile unification administrative, des espoirs libéraux … Alors, dans quelle mesure la vie, l'œuvre et l'héritage de Giuseppe Verdi peuvent-ils s'expliquer par l'interaction avec cette époque de bouleversements ? Si le raisonnement adopté par Milza met facilement en évidence cette interaction, l'ouvrage n'est pourtant pas à l'abri d'une analyse qui en dégagerait les apports et les limites.
[...] À sa mort, en 1901, l'Italie, unifiée depuis 1860, affirme son identité à l'intérieur comme à l'extérieur, allant jusqu'à adopter une politique nationaliste et impérialiste. Entre les deux, il y a eu des guerres, une difficile unification administrative, des espoirs libéraux . Alors, dans quelle mesure la vie, l'œuvre et l'héritage de Giuseppe Verdi peuvent-ils s'expliquer par l'interaction avec cette époque de bouleversements ? Si le raisonnement adopté par Milza met facilement en évidence cette interaction, l'ouvrage n'est pourtant pas à l'abri d'une analyse qui en dégagerait les apports et les limites. [...]
[...] Mais ses premiers succès sont bien lents à venir, tandis que l'infortune frappe le musicien par la mort des deux enfants du couple, puis celle de Marguerita ; Verdi, inconsolable, songe d'abord au suicide, et ne s'en relève que difficilement. Il faut en effet attendre l'hiver 1840-1841 pour que le compositeur reprenne son travail, poussé par une sorte de légende dans laquelle s'imposent à lui les paroles du célèbre chœur de Nabucco : Va pensiero Nabucco est un succès dès 1842, même si, contrairement à la légende, sa signification patriotique ne s'impose pas dès cette date ; mais cet opéra est bientôt rejoint par tant d'autres Lombardi, Ernani, Giovanna d'Arco ) de qualités variables mais de fibre patriotique certaine. [...]
[...] Mais, si la démarche de Milza va dans ce sens, son ouvrage en tant que tel tient relativement bien compte de ces aspects de la vie du maestro. Un aspect, en revanche, est plutôt négligé, et des plus importants : les particularités musicales de Verdi. Si celui-ci n'a rien d'un révolutionnaire musical (comme Mozart ou Beethoven), et n'est pas toujours réputé pour sa grande finesse, certains de ses opéras sont de véritables chefs d'œuvre (Le Traviata, Otello) dont l'écriture musicale pourrait être explicitée. [...]
[...] Un choix pas si surprenant que ça de la part d'un grand spécialiste du siècle européen, et notamment des fascismes, quand on considère la place centrale dans ces thèmes de la construction des identités nationales au XIX° siècle : le personnage de Verdi, à la croisée entre la culture et la politique nationale, s'inscrit tout à fait dans cette réflexion sur les différentes dimensions (historiques, politiques, culturelles) et les origines du siècle. Le regard adopté par Milza est à ce titre tout à fait révélateur : Verdi et son temps, en 2001, n'a rien d'une simple biographie musicale du compositeur, ni même d'un récit traditionnel d'une vie. [...]
[...] Verdi décède le 27 janvier 1901. II. La portée de Verdi et son temps : un ensemble cohérent L'ouvrage de Pierre Milza est d'abord et avant tout d'une remarquable cohérence, et répond parfaitement à la problématique posée par son titre, quant à l'interaction entre un homme et une époque. Ce travail aboutit donc à une réflexion fondamentalement orientée sur la contextualisation de la vie de Verdi, ce qui permet une véritable déconstruction du mythe verdien. Mais, de fait, cette réflexion oublie un peu l'homme libre et le compositeur Verdi et son temps Par le travail de contextualisation de Milza, au-delà de la vie d'un homme, ce qui apparaît nettement, c'est la vie de l'Italie du XIX° siècle. [...]
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