« Seul celui qui a connu la clarté et les ténèbres, la guerre et la paix, la grandeur et la décadence a vraiment vécu ». Cette dernière ligne condense l'esprit que l'auteur a insufflé à l'éloquent Monde d'hier, dernière œuvre avant qu'il ne mette fin à ses jours en 1942.
Dernier ouvrage avant sa mort, le projet de cet écrit est de retracer le destin de la génération de Zweig, celle qui a connu les deux conflits mondiaux et a ainsi été la victime d'un triste destin. L'ambition de Stefan Zweig, sans aucun doute le plus grand auteur autrichien du XXe siècle, est de livrer au lecteur le récit de la décadence morale de l'Europe, de reconstituer pour celui qui a eu la chance de ne connaitre cette période « un vestige de cet édifice effondré ».
[...] Il dit à ce sujet : d'un trait de plume, on avait transformé le sens de toute ma vie en un non-sens Le constat est dramatique pour celui qui, toute sa vie durant, a œuvré pour la paix. Sa tâche la plus intime est réduite à néant. L'ombre de la guerre ne le quittera plus : seul celui qui a connu la clarté et les ténèbres, la guerre et la paix, la grandeur et la décadence a vraiment vécu Dans une seconde partie, nous avons décidé de revenir sur la relation qui le lie à Sigmund et les derniers instants que chacun d'entre eux passe ensemble à Londres avant leur mort. [...]
[...] A ce sujet, il constate que depuis 1914, jamais les hommes n'ont autant été entravés dans leur liberté de circuler et par conséquent, il s'agit pour lui de la plus grande atteinte faite à la dignité humaine : avant 1914, la terre avait appartenu à tous les hommes Depuis l'Angleterre, il a un regain d'espoir quand Chamberlain parvient à négocier la paix avec Hitler à Munich. Ce sera une désillusion de plus pour l'écrivain. Il entre dans un désespoir définitif. [...]
[...] De retour à Salzbourg, la vie a changé. La misère a laissé place à une ville qui s'affiche désormais comme l'épicentre de l'art européen, au plus grand bonheur de Zweig. Sa maison reçoit des artistes illustres du monde entier, ce qui lui permet d'enrichir sa collection d'autographes commencée quarante ans auparavant. Il s'agit d'une véritable œuvre d'art selon ses dires, qu'il considère comme inégalables. Les sentiments de liberté et d'épanouissement propres à cette décennie ne durent que trop peu. Le mouvement nazi commence à gronder du côté de Munich et Hitler, avec sa stratégie politique de manipulation puis d'élimination cynique et froide, arrive bien trop vite au pouvoir. [...]
[...] Il ne cherche pas à légitimer les thèses de celui-ci, mais livre le portrait d'un homme l'honnêteté intellectuelle incontestable. Parce qu'il a bouleversé les milieux scientifiques et philosophiques et leurs fondements, Freud a été l'objet de critiques visant à diaboliser sa personnalité pour mieux contester ses travaux. A l'opposé de tels présupposés, Zweig nous rappelle que si Freud dérangeait à ce point la plupart des intellectuels, c'est avant tout parce que sa réflexion était centrée sur l'étude redoutée des tabous et des pulsions à une époque où l'ordre établi du Vieux Monde s'articulait sur des valeurs libérales et optimistes. [...]
[...] De retour en Autriche, il s'installe à Salzbourg. Les temps ont changé : il assiste sur le quai de la gare au départ de l'empereur, signifiant la fin des Habsbourg. L'Autriche est saignée, la misère et la famine se répandent tout comme l'inflation. Zweig décrit alors une atmosphère sauvage et anarchique, mais qui a aussi le mérite de purifier l'air par le biais d'une révolution des mœurs, de l'art et de la culture. Une fois que les temps s'améliorent peu à peu, l'idéaliste autrichien se rend en Italie, où il observe avec enthousiasme la fraternité dont font preuve les Italiens à l'égard de leurs voisins, mais où malheureusement il est aussi confronté à la montée du fascisme mussolinien. [...]
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