Pierre Rosanvallon, historien et penseur des institutions politiques françaises, publie La monarchie impossible en 1994. Il y retrace l'histoire des chartes de 1814 et 1830, et par là l'histoire de la dialectique entre avancées libérales et retour conservateur que l'on retrouve lors de la restauration et lorsque la monarchie de Juillet s'établit. Plus précisément c'est à faire l'histoire de l'extension des libertés et des progrès du gouvernement représentatif dans notre pays qu'il s'attache. Et il veut, dans cet ouvrage, montrer en quoi la place de la période qui s'écoule entre 1814 et 1848, caractérisée par l'évolution et les débats propres auxdites chartes, est déterminante dans cette avancée et ces progrès tant la tension entre libéralisme, démocratie et retour à l'ordre ancien y est grande. Ces chartes sont selon lui caractéristiques de la culture politique française et, par cela, à l'image de notre histoire institutionnelle.
[...] Il existe en fait trois étapes vers le parlementarisme entre la promulgation de la charte et la dissolution de la chambre introuvable en septembre 1816 : le progrès de l'indépendance du Corps législatif qui devient une chambre de plus en plus populaire . L'acte additionnel de 1815 et l'acte constitutionnel modifiant l'organisation des chambres : chambres des députés issue d'élections avec une majorité et une opposition qui s'affirment . L'apparition d'un organe exécutif de liaison entre le Roi et les Assemblées législatives : le conseil des ministres, uni, solidaire, responsable et dont la composition est censé dépendre de la composition des chambres. Apparaît ensuite ce qu'il est commun d'appeler le Paradoxe de 1816. [...]
[...] La charte de 1830 est en fait plus une légitimation de l'ordre historique qu'une réflexion en soi sur un régime politique. C'est une version alors moderne du conservatisme pour lutter contre l'esprit révolutionnaire, et c'est d'ailleurs dans cet esprit-là que Guizot crée la première chaire de droit constitutionnel en 1834. Les institutions sont en effet vues comme instrument de la gestion sociale du fait démocratique, les libéraux en cherchent le point d'arrêt principe alors supérieur au principe monarchique pour ces derniers. [...]
[...] Analysant l'héritage de la monarchie constitutionnelle dans notre pays, Rosanvallon retrace au travers de l'histoire de ces chartes le long apprentissage de la politique moderne en France. En étudiant la structure et le contenu de l'ouvrage, on tentera de mettre en perspective les idées qui s'y dégagent. En 1814, après la victoire des puissances alliées et à leur demande, le Sénat rédige un projet de nouvelle constitution : ses 29 articles instaurent un régime mixte inédit, l'adoption du bicamérisme, son article 4 confère le pouvoir exécutif au Roi dont les actes sont cependant signés par un ministre (article 21). [...]
[...] A cela s'oppose notamment la Ligue pour la défense de la charte de Ternaux. De ce conflit politique va naître une crise constitutionnelle lors de la discussion de l'adresse en mars 1830 où deux conceptions antagonistes du régime s'opposent : ceux qui y voient une constitution contractualiste comme Agier face à ceux qui la considèrent en tant que don volontaire du Roi, comme Corny. Ce dernier en fait même une interprétation absolutiste où la seule notion d'octroi annule les aspects libéraux. [...]
[...] Ce projet est adopté et accepté par le Roi trois jours après : Louis-Philippe devient Roi des Français. Mais Guizot et de Broglie trouvent que le projet va trop loin et vont vite faire en sorte de le modérer. Il y a tout de même transformation libérale de la charte, l'article 14 sera modifié, l'initiative des lois sera élargie aux trois pouvoirs, il y aura un pouvoir d'amendement des chambres, maintien du cens mais abaissement de l'âge d'éligibilité. En effet, Bérard supprime la prééminence de la religion catholique de l'article 6. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture