Dans cet ouvrage, Ian Kershaw cherche à élucider les caractères exceptionnels de l'Etat nazi. Pour cela, il décide d'emblée de s'écarter des éclairages « Fascistes », « Totalitaristes », et « Hitléristes » qui, selon lui, n'arrivent à intégrer l'entité de l'objet étudié dans leurs analyses. Ainsi, se propose-t-il d'étudier « le pouvoir charismatique » de Hitler en s'appuyant sur la vision de la société sur Hitler, sur les circonstances de son arrivée au pouvoir et sur la concentration d'un pouvoir immense entre ses mains : le concept de « charisme » présentant l'avantage d'étudier la représentation d'un individu et non ses qualités inhérentes ainsi que la vision qu'à le chef de la nature de son pouvoir et du contrat implicite le liant à ceux qui le lui ont attribué ; « la communauté charismatique ». Remodelant le concept weberien, Kershaw voit dans le charisme « le substrat du pouvoir et le principe de son soutien de masse (la communauté charismatique) et du système politique édifié autour de lui » : expliquant ainsi une base de pouvoir instable et un dynamisme extraordinaire, éléments cruciaux du caractère exceptionnel de l'Etat nazi. Hitler paraît être un homme moyen ne s'étant « illustré » que la deuxième partie de sa vie. Pour comprendre les raisons « qu'ils l'ont rendu possible », l'auteur étudiera donc la consolidation de son pouvoir, les bases de sa légitimité, l'évolution des rapports de force avec ses alliés politiques ainsi que l'étendue, l'exercice et l'évolution de son pouvoir afin de dégager le degré d'autonomie dont il jouissait. Ian Kershaw, par ces interrogations, tente-t-il d'expliquer la concrétisation de Hitler au plan politique, de dégager l'exceptionnalité de l'Etat nazi en s'intéressant à la fois à Hitler comme « chef charismatique » et aux masses comme « communauté charismatique ».
[...] Pour ce faire, Kershaw décide d'étudier ses idées, sa façon de les énoncer et leurs impacts sur ses premiers adeptes. Autodidacte au physique peu avantageux, prétentieux quant à son savoir qu'il juge éclectique : c'est sa conviction et sa manière de l'exprimer qui lui confèrent un dynamisme exceptionnel. Sa vision du monde, manichéenne, jugée sur la forme, a longtemps parue vide de sens ; en fait, elle révèle un véritable système cristallisé à partir des années vingt : sa vie de bohème entre 1905 et 1913, la guerre et la révolution russe constituant des étapes décisives dans la formation de sa réflexion. [...]
[...] Alors, la production d'armements lui parut prioritaire et Kershaw démontre que le jeu classique des intrigues en corollaire d'un Hitler plus influençable qu'il n'y paraîtrait (certaines de ses décisions dépendaient de la façon dont on lui formulait les avis et de la personne qui le faisait) constituent des éléments qu'il faut prendre en considération pour ne pas tout imputer à Hitler (élément fondamental de l'approche de Kershaw), sans non plus minorer le rôle de ce dernier. De plus, la volonté de Hitler, alors même la guerre jouée, de continuer sa lutte raciale corrobore l'idée d'un système de pensée jamais renié. Longtemps, il fut suivi, applaudi, anticipé. Pour quelles raisons ? [...]
[...] Le pouvoir absolu D'après l'auteur, les années 1938-1943 furent les années les plus tristes de l'histoire contemporaine allemande car l'idée du nazisme trouva dans le Führer une traduction politique concrète. Ceci réside, d'après l'analyse de Kershaw, dans sa façon de décider et d'exercer son autorité (la guerre devenant le terrain irrationnel d'expérimentation de sa théorie des races : une croisade) et dans le fait qu'à ce moment, le gouvernement est éclaté en sphères de pouvoirs ne pouvant prendre de l'importance qu'en servant le mieux possible ( voire en anticipant) les idéaux du Führer. [...]
[...] Si Hitler avait besoin des élites, elles souhaitaient un regain d'autoritaire pour pallier la crise économique et politique. Aidé par son entourage, et ce, de façon récurrente ces années là, selon Kershaw, Hitler parvient à se rallier les milieux d'affaires qui pensaient le dompter Répression et pouvoir Contre les idées reçues montrant que toute opposition était vaine, Kershaw décide de ne considérer que l'Allemagne où l'on se rend compte que la terreur est sélective, dévoilant deux composantes essentielles à la compréhension de l'exceptionalité nazie : la répression et le consentement de ceux qui n'en sont pas victimes. [...]
[...] Parallèlement, l'idée nazie, vague pour la plupart de l'électorat, permettait de porter ses espoirs personnels dans le NSDAP. Hitler se détachait ainsi du lot dans le sens où il arrivait, par le discours, à jouer de façon confuse sur des couches beaucoup plus larges que les autres partis, dans un contexte de crise politique et économique : cela dans des rassemblements mystiques, théâtralisés, nourris de symboles ; grâce à la propagande. Il joue ainsi sur la force et le dynamisme pour enrôler les masses : les conditions à la déification de Hitler à force d'user de cette méthode sont réunies. [...]
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