A l'histoire, les archives ; à l'anthropologie, l'enquête de terrain. Cette distinction n'est pas essentielle. Les anthropologues, quand ils prennent notamment en charge le fait colonial, les mémoires locales ou les méandres du politique, examinent des documents écrits.
Les deux corps de métier se séparent sur un autre point, celui de l'interprétation. Certes les phénomènes sociaux sont tous historiques, mais ils peuvent nourrir des raisonnements distincts. La divergence fondamentale entre l'histoire et l'anthropologie tient à la place très différente que l'une et l'autre discipline accorde chacune à la temporalité.
[...] Ce souci de la temporalité plutôt que de la structure va, dans la discipline historienne elle-même, à partir des années 1970, trouver une nouvelle jeunesse et offrir une occasion de penser autrement les rapports entre anthropologie et histoire. Le travail de l'historien, comme de l'ethnographe, consiste donc alors à décrire un champ d'affrontement de conceptions diverses portées par des agents dont le destin n'est pas joué d'avance, mais se déploie, pour chacun d'eux, selon sa propre singularité. Les tenants de la microhistoire, attentifs à la temporalité courte que les acteurs eux-mêmes doivent appréhender, mobilisent ainsi les notions de biographie et de stratégie pour rendre compte de l'enchainement des faits et gestes de chacun. [...]
[...] Historiographies, F. Dosse, Tome 1 CH3 : Anthropologie et histoire A l'histoire, les archives ; à l'anthropologie, l'enquête de terrain. Cette distinction n'est pas essentielle. Les anthropologues, quand ils prennent notamment en charge le fait colonial, les mémoires locales ou les méandres du politique, examinent des documents écrits. Les deux corps de métiers se séparent sur un autre point, celui de l'interprétation. Certes les phénomènes sociaux sont tous historiques, mais ils peuvent nourrir des raisonnements distincts. [...]
[...] Mais, en revanche, une autre convergence méthodologique que celle mise en œuvre par l'anthropologie historique des années 1960 peut s'imposer entre l'anthropologie et l'histoire dès lors que l'anthropologie se reconnait comme science historique à part entière et accepte de penser ensemble le retour du même et le surgissement du nouveau. Il faudra donc coupler, à l'attention aux formes que les sociétés donnent au temps, un examen plus pragmatique du travail par lequel les humains rusent avec son inexorable force pour se trouver malgré tout des raisons d'agir. L'anthropologie et l'histoire seront alors pleinement réconciliées. [...]
[...] La divergence fondamentale entre l'histoire et l'anthropologie tient à la place très différente que l'une et l'autre discipline accorde chacune à la temporalité. Pour l'histoire, il est clair que le temps est une sorte de matière première. Les actes s'inscrivent dans le temps, modifient les choses tout autant qu'ils les répètent. L'idée de successivité est ici essentielle même s'il faut, comme y invite Marc Bloch, mobiliser un faisceau de causes Pour l'anthropologue, s'il n'y prend pas garde, le temps passe en arrière- plan, au profit d'une saisie des phénomènes en synchronie et, comme l'a montré Johannes Fabian, d'une conception purement spatiale des sociétés. [...]
[...] Le travail ne consiste pas seulement à capter au profit de l'histoire des rubriques chères à l'anthropologie, mais aussi à caractériser une époque par sa façon de percevoir et de penser le monde. Durant cette période de rapprochement fort entre longue durée et structure, l'anthropologie, pour sa part, intègre les données historiques dans une réflexion comparative qui traite les époques comme des cas prenant place dans des systèmes de transformation plus logiques qu'historiques. À travers d'importantes contributions interdisciplinaires, les anthropologues ont en effet pris en charge des dossiers comme ceux de l'évolution du mariage durant le Moyen Age ou de l'articulation de la parenté et du foncier sous l'Ancien Régime. [...]
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