Professeur d'histoire contemporaine à l'université Paris VIII et spécialiste de l'Algérie coloniale (sujet sur lequel il a publié de nombreux articles et ouvrages, dont Chère Algérie : La France et ses colonies – 1930-1962 paru en avril 2005), Daniel Lefeuvre signe ici un ouvrage polémique allant à l'encontre d'une tendance récente dans la société, celle qui consiste à vouloir expier à tout prix notre passé colonial. Le dossier présenté par L'Express en septembre 2006 matérialise d'ailleurs clairement ce sentiment en titrant « Faut-il avoir honte d'être français ? » ; il fait écho à de nombreuses interventions médiatiques appelant la France à se repentir, à de récents ouvrages se voulant historiques tels que Coloniser, Exterminer. Sur la guerre et l'Etat colonial d'Olivier Le Cour Grandmaison.
[...] Voir l'origine de tous les maux français et algériens dans le passé colonial serait une erreur et relève donc de l'absurdité pour Daniel Lefeuvre, qui tente de rétablir l'histoire et de nuancer des propos trop souvent pris comme des vérités générales. On peut néanmoins le trouver un peu radical dans son démenti systématique des propos de repentances. C'est pourquoi il ne faut pas oublier que son but n'est absolument pas de faire l'apologie de la colonisation. Le passé n'est pas là pour être jugé mais pour être expliqué. [...]
[...] S'en servir et le falsifier comme le font les Repentants relève de la manipulation et n'est absolument pas bénéfique. Cela entretient des rancœurs, enfonce les Français dans un passé qu'ils n'arrivent pas à regarder objectivement et renforce l'apartheid entre les Français selon leur origine. O. Le Cour Grandmaison, Coloniser, Exterminer. Sur la guerre et l'Etat colonial, Fayard G. Manceron, Marianne et ses colonies. Une introduction à l'histoire coloniale de la France, La Découverte P. Bairoch, Mythes et paradoxes de l'histoire économique, La Découverte Cité par Ch.-R Ageron, Anticolonialisme en France de 1871 à 1914, PUF P. [...]
[...] Enfin, un lien est souvent établi entre le contrôle dont aurait fait l'objet la population coloniale avant l'indépendance et celui exercé de nos jours. Dès 1916, la main d'œuvre coloniale est prise en charge par le Service des Travailleurs Coloniaux. De tels organismes se succèderont jusqu'à l'indépendance de l'Algérie. S'ils assurent effectivement le contrôle et la surveillance des immigrés, il serait injuste de n'y voir là qu'un instrument négatif comme le font les Repentants : leur mission s'étend jusqu'à la protection contre les abus du patronat et le respect des convictions religieuses, ce qui ne répond pas vraiment à une logique de suspicion. [...]
[...] Sa réponse est clairement négative sur toutes les accusations : contrairement à ce qu'a avancé Gilles Manceron[2], vice-président de la Ligue des Droits de l'Homme, la politique coloniale de la France n'est pas l'ancêtre du nazisme. Elle n'a pas non plus enfanté à elle seule le sous-développement de ses anciennes colonies, et enfin elle n'est pas la source des problèmes actuels tels que le racisme, la discrimination sociale ou les problèmes religieux. Quatre points principaux sont abordés dans cet ouvrage pour relativiser la mission dévastatrice que se serait donné la France en Algérie depuis 1830 selon les Repentants : les guerres de conquête ont été le théâtre d'une barbarie sans nom ; les colonies ont été exploitées et pillées au profit de la Métropole ; les populations coloniales ont été exploitées par la France puis rejetées ; le racisme et les difficultés d'intégration sont directement liées à un statut d'infériorité délivré par la colonisation. [...]
[...] Encore une fois, Daniel Lefeuvre nous répond que non. La France a souvent eu recours à de la main-d'œuvre étrangère européenne, en particulier au sortir des guerres, puis a tenté d'en limité l'arrivée : dès 1924 sont posées des contraintes à l'immigration. Les Algériens n'ont contribué effectivement que très marginalement à cette reconstruction, malgré une immigration non limitée puisque le territoire algérien appartenait bien à la France (en 1947, le patronat se trouve même dans l'obligation d'embaucher des Algériens pour des raisons de préférence nationale ! [...]
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