Historien spécialiste de la Grèce antique, professeur et directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales de 1969 à 1990, Pierre Vidal-Naquet est avant tout un intellectuel engagé dans la défense des droits de l'homme. Signataire du « Manifeste des 121 » en 1961 qui appelle à la désobéissance civile contre la Guerre d'Algérie, il milite aussi bien contre la torture en Algérie, que contre la Guerre du Vietnam, celle d'Irak, ou pour la réhabilitation de la mémoire attaquée de Jean Moulin, dans les années 70. D'ascendance juive, mais issue d'une famille laïque et républicaine, Pierre Vidal-Naquet s'attache également, à partir de 1980 et à la demande de Paul Thibaud, directeur d'Esprit, à dénoncer le révisionnisme du génocide hitlérien qui, depuis 1978 et sous l'impulsion de Robert Faurisson, avait pris une ampleur nouvelle en acquérant le statut de débat historique. Bien qu'appartenant à la communauté juive, il refuse toutefois l'instrumentalisation de la condition juive et de l'héritage de la Shoah fait par l'État d'Israël, et participe ainsi à l'appel « Une autre voix juive » en juillet 2003, qui regroupe des personnalités juives solidaires du peuple palestinien, estimant que le gouvernement Israélien détourne les sentiments citoyens de son peuple au profit d'une idéologie nationaliste basé sur le racisme anti-arabe. Les Assassins de la mémoire, paru en 1987, est le rassemblement de cinq essais sur le révisionnisme, écrits entre 1980 et 1987, et parfois déjà publiés, parmi lesquels se trouvent Un Eichmann de papier (1980), Thèses sur le Révisionnisme (1885) et Les Assassins de la mémoire (1987), qui donne son titre à l'ouvrage.
[...] Outre l'analyse du comment, c'est-à-dire comment les révisionnistes opèrent pour conclure à l'inexistence d'un génocide juif et de son symbole, les chambres à gaz, Pierre Vidal-Naquet entreprend également à analyser le pourquoi. Dans cette perspective, il est intéressant de noter que le révisionnisme se décline en plusieurs variétés de discours, qui, s'ils ont en commun les principes énoncés ci-dessus, diffèrent par les idéologies dont ils sont issus et qui se révèlent parfois fondamentalement opposées. Si les principales composantes du révisionnisme sont le nationalisme allemand, le néo-nazisme, l'anticommunisme, l'antisionisme et l'antisémitisme, le révisionnisme n'a pas pour autant toujours été le fait exclusif d'une tendance d'extrême droite, et trouve des échos dans des mélanges idéologiques pouvant être assez surprenants. [...]
[...] En ce qui concerne les témoignages nazis, ceux antérieurs à la fin de la guerre sont ignorés, si le langage, par trop direct, prouve de manière significative qu'une entreprise d'extermination eut bien lieu, ou interprétés comme allant dans leur sens. L'interprétation faite des textes est, dans ce domaine, particulièrement contestable, et atteint le contresens : les témoignages directs de dignitaires nazis deviennent des preuves de l'inexistence du génocide par l'analyse nominale des termes employés, qui, résultant d'une écriture codée ou imagée, s'expliquent par une probable peur des témoins devant la réalité du massacre. [...]
[...] Cependant, il ne peut y avoir de révisionnisme dans le domaine de l'histoire positive. En niant l'existence d'une extermination du peuple juif pendant le Second conflit mondial, les révisionnistes sortent du domaine du révisionnisme pour entrer dans celui du négationnisme, qui par essence, est une dénégation de la réalité historique, une imposture, et donc perdent le caractère d'historicité qu'ils revendiquent, et ce, malgré l'apparence d'historicité qu'ils entretiennent, à laquelle il ne manque que la vérité. Réviser l'histoire n'est pas la nier pour supprimer une réalité, et le discours révisionniste est finalement un discours vide puisque nier et réfuter des preuves ne produit qu'un pastiche de l'histoire, un faux selon l'auteur. [...]
[...] Les Assassins de la mémoire, Pierre Vidal-Naquet Historien spécialiste de la Grèce antique, professeur et directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales de 1969 à 1990, Pierre Vidal-Naquet est avant tout un intellectuel engagé dans la défense des droits de l'homme. Signataire du Manifeste des 121 en 1961 qui appelle à la désobéissance civile contre la guerre d'Algérie, il milite aussi bien contre la torture en Algérie, que contre la guerre du Vietnam, celle d'Irak, ou pour la réhabilitation de la mémoire attaquée de Jean Moulin, dans les années 70. [...]
[...] Ces essais, écrits en réaction à l'entreprise révisionniste de certains auteurs sur le sujet de l'extermination des juifs par l'Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre Mondiale, obéissent à une volonté de démantèlement du discours révisionniste et non à une prise de position dans un débat qui, selon Pierre Vidal-Naquet, n'existe pas ou ne devrait pas exister. Le discours révisionniste que Pierre Vidal-Naquet tient pour négationniste, basé sur l'idée inhérente qu'aucune entreprise d'extermination ne fut mise en œuvre par l'Allemagne hitlérienne, est analysé comme un sophisme : c'est un raisonnement trompeur, par une argumentation fallacieuse, qui aboutit à une conclusion d'apparence logique mais qui par essence porte en elle le faux. [...]
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