En 1830, Alexis de Tocqueville est envoyé aux États-Unis pour étudier le système pénitentiaire, il en revient avec la matière de ce livre majeur de la pensée politique libérale. Dans ce livre, Tocqueville étudie la démocratie américaine comme modèle exemplaire pour penser la démocratie à la fois comme un système social et un système politique caractérisé par une passion grandissante, celle de l'égalité.
[...] On en revient ainsi à la tension que Tocqueville décèle dans l'État social démocratique et qui se tient entre la liberté et l'égalité. Le premier chapitre de la deuxième partie s'intitule d'ailleurs : « Pourquoi les peuples démocratiques montrent un amour plus ardent et plus durable pour l'égalité que pour la liberté. » Tocqueville note que l'égalité des conditions produit l'amour de l'égalité elle-même qui paraît bien toujours liée d'une certaine manière à la liberté. Avant de poursuivre sur cette tension, Tocqueville prend soin de montrer que pour lui seule l'égalité est propre à la démocratie alors que la liberté peut se retrouver dans les autres régimes mais elle hiérarchise les individus. [...]
[...] En montrant les tensions qui peuvent surgir entre la liberté et l'égalité dans la démocratie et comment elles peuvent se résoudre. Tocqueville inaugure avec John Stuart Mill plus tard, les fondements philosophiques des démocraties libérales contemporaines. De la Démocratie en Amérique s'achève par ces mots : « les nations de nos jours ne sauraient faire que dans leur sein les conditions ne soient pas égales ; mais il dépend d'elles que l'égalité les conduise à la servitude ou à la liberté, aux lumières ou à la barbarie, à la prospérité ou aux misères. [...]
[...] La liberté de la presse et la présence massive d'associations diverses permettent à chacun de convaincre et de persuader les autres de rejoindre son camp politique ou encore de défendre ses intérêts. Le fait que ce soit la majorité qui gouverne tient sa légitimité d'un principe selon lequel les intérêts du plus grand nombre sont plus importants que ceux de la minorité. Mais ce principe risque d'aboutir à une nouvelle forme de tyrannie : celle de la majorité. La majorité entretient l'adoration d'elle-même et nuit à l'émergence d'une véritable liberté d'esprit qui peut nuire aux opinions minoritaires. [...]
[...] Si comme le dit Tocqueville, « la démocratie n'empêche point que ces deux classes d'hommes n'existent », elle change toutefois la manière dont on conçoit leurs rapports. Dans l'aristocratie, le pauvre est éduqué pour être commandé mais en démocratie où chacun peut prendre la place de l'autre dans la hiérarchie sociale, les serviteurs deviennent en quelque sorte les égaux de leurs maîtres. Et cela grâce à un accord conclu entre les deux parties par l'intermédiaire d'un contrat. Ainsi, dans le contrat, il y a un rapport de hiérarchie, mais hors lui, le maître et le serviteur redeviennent des citoyens égaux. [...]
[...] L'aristocratie s'est donc délitée et la société s'est égalisée mais de ce qui a été détruit, il ne reste que des ruines et rien n'est reconstruit. Le tableau que peint Tocqueville de l'égalisation des conditions en France est plutôt sombre (Combat de la rue de Rondin) mais il s'en sert pour tracer les contours les plus lumineux de celle qui s'est produite avec l'indépendance américaine. D'une certaine manière plus pure, la démocratie américaine permet à Tocqueville d'étudier ce qu'il appelle « une image de la démocratie elle-même ». [...]
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