Ce commentaire de texte complet et entièrement rédigé s'interroger sur la fonction du sénat et de ses procès sous le règne de Tibère. Le texte que nous nous donnons d'étudier ici, intitulé "Délation et procès de de majesté sous Tibère", extrait des Annales XXXIV- XXXV de Tacite et traduit par H. Bornecque, permet l'observation critique du déroulement d'une séance sénatoriale, menée sous l'égide du ministre Séjan et de ses délateurs, du procès de Crémutius Cordus, sénateur et écrivain romain, accusé et sommé de répondre de majesté sur l'Empereur. Nous étudierons, dans un premier temps, la teneur du procès « sans exemple » de Crémétius Cordus puis nous verrons en quoi la défense de l'auteur apparaît remarquable ce qui nous conduira à procéder à une recontextualisation historique de cet épisode mettant en évidence les véritables enjeux du récit.
[...] Il alimente ainsi l'imagerie romaine populaire de règnes fondateurs bien qu'impopulaires et souvent perçus comme tyranniques, et cherche à en comprendre les mécaniques internes. Profondément outré par l'injustice de ces procès criminels élargis, le questeur étend son analyse à la compréhension de la loi des hommes, dans son ensemble. Or, il est à rappeler ici, cette situation romaine particulière et ce que l'Empereur Tibère, lassé des vicissitudes de la vie romaine, délègua à la seule appréciation de son ministre et favori, Séjan, plus féru de victoires militaires et de manoeuvres personnelles que d'entendements politiques raisonnés, l'administration de ces procès impériaux devenus nécessaires, dont Auguste fut le véritable instigateur. [...]
[...] Il évoque donc ce que la postérité autorise de distanciation quant au danger qui semble lui être imputé, rappelant en dernier ordre que le défaut puisse être mineur égard au fait que c'est au vainqueur que revient d'ordonner ou « détruire » les traces de ses ennemis. Si l'accusé se tire avec maestria d'un vibrant plaidoyer, prenant fait et cause pour un juste procès issu de la tradition latine, il évoque, néanmoins, par son éloquence même, une époque marquée par des sanctions devenues grotesques et cachant mal un règne fragile. [...]
[...] De même que Suétone fut influencé quant à l'image à donner des relations entre le primo princeps et son successeur et fils adoptif, prêtant à l'un des sentiments qui jamais ne furent vérifiés, les récits de Tacite, plus particulièrement les Annales, furent plus probablement écrits dans un but d'intéressement personnel à la dynastie des Julius Claudius et non dans un réel souci d'historicité. D'ailleurs, il fut démontré combien les évènements narrés, étaient produits année après année, souffrant donc nécessairement du manque de distanciation pourtant indispensable à tout travail d'Histoire. Bibliographie : - Boissier, Gaston, Études de Mœurs romaines sous l'empire. [...]
[...] En effet, les délations, débutées sous Auguste, sont pourtant devenues un fait devenu majeur de la vie politique romaine, tenant lieu à la fois de manœuvre d'avancement personnel et de compromission politique nécessaire, particulièrement en périodes de troubles (Boissier, 1867). Cependant, ici, l'historien en souligne le caractère « nouveau » retenant une accusation hors norme portée par deux accusateurs, Satrius Secundus et Pinarius Natta, ayant fait profession de délateurs publics- ce qui nous est rapporté par l'expression « clients de Séjan »- et liant les propos du sénateur romain qui eut l'audace de louer, dans ses Annales deux ennemis de César, Brutus et Cassius, assassinés en 42 av J-C à son destin. [...]
[...] Aux qualités d'orateur indiscutables que sont celles du sénateur romain, se double un jeu subtil tenant à la fois à l'absurdité et à la démesure établie entre la cause du délit et sa conséquence, mise en exergue par le récit de Tacite et son effet immédiat énonçant alors « Il sortit lors du Sénat et mit fin à sa vie en se privant de nourriture ». Dès lors, le lien entre l'historien et sénateur romain Tacite et le personnage de Crémétius Cordus apparaît évident (M. Ducos, 2013). Le récit met surtout en évidence, par sa structure et son contenu, les interrogations de l'auteur sur les instigations judiciaires, tenant en particulier aux crimes de lèse-majesté, sous Tibère. La longue description donnée du procès s'avère être partiale et critiquée, Tacite accusant discrètement le crimen maiestatis d'être «le complément de toutes les accusations » (M. Ducos p.253). [...]
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