A l'été 1914 s'ouvre le plus grand conflit de l'histoire contemporaine. La première guerre mondiale constitue une véritable rupture avec les siècles passés. Le caractère total des efforts de guerre (mobilisation humain, de l'industrie, des finances, technologique, culturelle) et la détermination des deux camps à mener une guerre sans limite (une capitulation sans condition) et à n'importe quel prix ont laissé leur marque. L'historiographie des dernières années s'intéresse beaucoup plus à l'anthropologie des batailles qu'à leur histoire et pose notamment la question de savoir comment les hommes les ont vécu et quelles conséquences elles ont eu sur les consciences individuelles et collectives.
Comment les combattants ont-ils pu tenir quatre interminables années dans des conditions que tout le monde s'accorde à décrire comme particulièrement épouvantables et inhumaines ?
[...] BECKER, La violence de guerre 1914-1945 - R. CAZALS et F. ROUSSEAU, 14-18, Le cri d'une génération, Privat 2001 - G. MOSSE, De la Grande Guerre au totalitarisme La brutalisation des sociétés européennes - A. PROST, J. [...]
[...] La confrontation avec la mort de masse est sans doute l'expérience fondamentale de la guerre. Les guerres modernes ont obligé, pour la première fois, de nombreux individus à affronter une mort massive et organisée. Dans son analyse, Mossé développe l'idée que l'extrême violence expérimentée pendant la Première Guerre a eu des répercussions sur la société d'entre-deux-guerres, qu'elle a engendré la violence politique et sociale : elle serait à l'origine de la victoire des nazis. Cette interprétation est aujourd'hui largement critiquée, notamment par Rousseau et Cazals : les hommes ne se sont pas transformés en bêtes brutales, en guerriers, ils sont restés des soldats. [...]
[...] Ils élaborent notamment le concept de culture de guerre. Ils la définissent comme un corpus de représentations du conflit cristallisé en un véritable système donnant à la guerre une signification profonde indissociable de la haine à l'égard de l'adversaire qui permettrait d'expliquer le consentement des soldats à la guerre. La culture de guerre serait étroitement liée à la violence qui l'explique et qu'elle explique, dans une sorte de causalité circulaire, une grande poussée venue d'en bas beaucoup plus que le produit d'institutions comme la presse, le gouvernement, etc. [...]
[...] Ces continuités sont frappantes : elles font entrer la Grande Guerre dans le champ totalitaire. Les combattants, présumées victimes, veulent ignorer leur propre violence Violence combattante et identité européenne La Première Guerre mondiale, de par sa violence sans précédent, constitue une étape fondamentale dans la prise de conscience de la nécessité de faire l'Europe. Ce conflit brutal et meurtrier a dynamité l'enthousiasme de la Belle Epoque. Stephan Zweig, dans Le monde d'hier. Souvenirs d'un Européen affirme : L'Europe ne sera plus pendant des décennies ce qu'elle a été avant la Première Guerre mondiale. [...]
[...] Il était quasiment impossible d'échapper à la guerre à cette époque. Il apparaît cependant évident qu'il est difficile de concevoir que l'une ou l'autre de ces thèses peut s'appliquer exclusivement. C'est Antoine Prost qui, le premier, a cherché à dépasser chacune de ces deux visions de l'engagement des combattants, pour proposer une analyse plus nuancée: la haine de l'ennemi a existé, mais le patriotisme n'est pas l'élément clé. Ce qui est cependant difficilement récusable, c'est l'intensité de la violence à laquelle ont été confrontés les combattants, et les traces profondes qu'elle a laissées dans les consciences, pour le meilleur, ou pour le pire. [...]
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