Pour analyser la période stalinienne de l'histoire de l'URSS, la catégorie de totalitarisme a une double intérêt : elle a en effet non seulement une valeur descriptive, mais elle permet aussi de rendre compte d'une dynamique (I). Cependant, ce concept de totalitarisme peut paraître trop simplificateur et nécessite donc d'être nuancé et affiné (II)
[...] Appareil répressif, appareil économique, ce double aspect explique que la police ait tout envahi en URSS, qu'elle ne laisse place à aucun autre appareil, qu'elle puisse tous les pénétrer et les réduire à sa merci, Parti compris. Il y a donc un glissement entre l'utilisation de la force contre la population récalcitrante par la police vers fonction économique centrale attribuée à cette dernière. C'est la conception stalinienne du changement violent, radical, fondé sur la terreur, qui l'a conduit à faire de l'instrument répressif le moyen principal de ce changement. Enfin, une autre évolution est importante : le Parti se réduit petit à petit à son secrétaire général. [...]
[...] Bien souvent pourtant, la catégorie de totalitarisme nous donne une vision très statique de l'URSS entre 1929 et 1953. Or, la société russe n'est pas inerte : les paysans s'opposent et résistent à la politique menée par Staline. Ces résistances se traduisent non seulement par des émeutes paysannes, mais aussi par un comportement d'absentéisme volontaire. Les désaccords sont nombreux et persistent sous la chape stalinienne. La société soviétique n'est pas forcément perméable au régime et à l'idéologie véhiculée. L'idéologie de masse dont parle H.Arendt n'est pas forcément valide, on peut remettre en cause l'idée selon laquelle les masses sont atomisées. [...]
[...] Par contre, la place de cet appareil dans le système politique soviétique, sa fonction aussi, sont des innovations proprement staliniennes. Staline a su, très vite, adapter l'appareil répressif à son dessein de transformer la société en la brisant ; et, c'est dans l'expansion continuelle de ses attributions que le système répressif stalinien se distingue de celui mis en place par Lénine car on touche ici à un trait essentiel du système de pouvoir de Staline. La police soviétique avait, à l'origine, des attributions plus ou moins précises et un pouvoir limité par le Parti. [...]
[...] Dès lors, cette notion de totalitarisme s'applique-t-elle à la période stalinienne de l'histoire de l'URSS ? Les années du pouvoir stalinien sont- elles, comme celles du pouvoir de Néron par exemple, des années de simple tyrannie ou bien s'agit-il réellement d'une variante russe des systèmes totalitaires de notre temps ? Aujourd'hui, si l'on s'en tient à la définition élaborée par Friedrich, l'URSS, pendant la période stalinienne, apparaît indéniablement comme un régime totalitaire. Cependant, on peut se demander si ce concept prend en compte toutes les caractéristiques de la période. [...]
[...] Ainsi, doté de tous les pouvoirs, Staline vide en fait de leur contenu toutes les institutions soviétiques. C'était vrai de longue datte de l'État, les élections n'étant que la ratification des décisions prises par le parti et approuvées par le sommet de l'État. Mais, le parti qui jouait un rôle important comme avant-garde consciente du prolétariat au nom duquel le pouvoir était exercé, devient dès lors une simple courroie de transmissions des décisions du Guide suprême Les règles de l'élection et du fonctionnement démocratique du parti sont systématiquement violées. [...]
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