« L'histoire des villes au XIXe siècle est celle d'une maladie » (P. Lavedan). La Révolution de 1848 a révélé l'existence d'une maladie urbaine qui prend la forme de la promiscuité, du manque d'hygiène, des épidémies, d'une mortalité effrayante, de la morbidité, de la démoralisation de la population, de l'insécurité (un exemple de cette maladie urbaine est l'épidémie de choléra de 1849 qui a fait 19 000 morts). Elle est un handicap majeur à la reconstruction de l'ordre social. Il devient donc nécessaire d'établir un programme pour bouleverser le tissu urbain et reconstruire cet ordre social. Des premiers travaux sont effectués sous la monarchie de juillet : à l'initiative du préfet Rambuteau dès 1830, puis sous la Deuxième République avec les travaux du préfet Berger (alignement au moment des destructions d'immeubles). Tous deux avaient bien perçu le problème mais était restés timides dans les solutions apportées.
Il devient indispensable de moderniser une ville qui avait gardé une structure médiévale alors que la croissance démographique a été extrêmement importante notamment au XIXe (Entre les deux recensements quinquennaux de 1831 et 1846 la population parisienne est en effet passée de 785 862 habitants à 1 053 897, soit un accroissement de 270 000 personnes : en 15 ans, Paris a gagné une population équivalant à celle de Marseille et de Lyon réunis) ; de plus, cette croissance de la population est très inégale : elle est très concentrée sur quelques quartiers du centre ce qui suscite l'inquiétude au niveau du maintien de l'ordre puisque ces quartiers sont justement ceux qui ont été les détonateurs des journées révolutionnaires. L'empereur avait comme préoccupation de maintenir l'ordre, de canaliser les masses en faisant face à la montée démographique. Le projet d'Haussmann est donc un projet moderne mais avec une volonté d'établir l'ordre. Par ailleurs, l'empereur avait comme ambition d'affirmer le prestige impérial, de faire de Paris la vitrine du prestige impérial, la capitale de l'Europe.
Les motivations de cette urbanisation sont donc multiples : on distingue un aspect politique (prestige impérial) avec des arrières pensées stratégiques (maintien de l'ordre), des considérations économiques (désenclaver les industries enclavées), et résoudre les problèmes sociaux.
En 1853 l'empereur choisit Haussmann comme nouveau préfet de la Seine. Ce dernier est un homme d'action, un homme de poigne contre les « rouges » et un homme qui a compris la dimension, l'importance de cette tâche à la fois sociale, politique, stratégique et économique. Il mènera des travaux de très grande ampleur.
Nous venons de voir quels étaient les principaux objectifs de la révolution haussmannienne. Dans quelle mesure ont-ils été atteints ? Les problèmes ont-ils été résolus ou simplement diminués ou déplacés ?
[...] L'émergence d'une ville bourgeoise Il semble que plutôt que d'avoir résolu les problèmes des couches les plus pauvres, Haussmann ait surtout permis les triomphe d'une nouvelle forme urbaine, plus moderne et plus originale : une ville bourgeoise. La nouvelle organisation de l'espace réclame des investissements immobiliers. Les ménages bourgeois sont installés très confortablement et certains diront même que l'on retrouve avec Haussmann les palais aristocratiques de l'Ancien Régime. La fortune ne se cache plus, elle s'étale (ce qui est plus facile avec la ségrégation horizontale). [...]
[...] L'action d'Haussmann aurait eu pour effet, en transformant son mode d'aggraver la ségrégation elle-même. Ainsi, les travaux d'Haussmann n'ont pas été accueillis avec enthousiasme par ceux qui étaient délogés : maisons détruites et hausse des loyers ont contraint une partie de la population à partir de Paris. Dans le centre, vingt mille maisons ont été détruites pour quarante mille de reconstruites et dans les communes annexées ensuite cinq mille maisons de détruites pour environ trente mille reconstruites. Malgré cela, les habitants qui n'ont pas les moyens de payer les loyers plus élevés sont contraints de partir. [...]
[...] L'échec vient du fait que cette ségrégation aurait été aggravée. B. Limites du bouleversement du tissu urbain Les ouvriers qui s'entassent dans les îlots restants Les destructions de l'habitat populaire n'entraînent pas toujours le départ des ouvriers vers la banlieue. Et ce à cause du problème des transports qui n'est pas résolu (Les transports à faible prix sont absents : quand les fabriques restent dans le centre de Paris, les ouvriers ne peuvent pas le quitter car les déplacements banlieues/centre seraient beaucoup trop coûteux). [...]
[...] En 1870, Haussmann, est accusé d'affairisme et est contraint de partir. Le régime est de plus en plus critiqué, la situation financière s'est dégradée à partir de 1860 et en 1870 le déficit des travaux est de milliards de francs. Les républicains clament que Paris ne s'en remettra jamais (la dette sera épongée vers 1890). De plus, les parisiens en ont assez des travaux, ils sont dans les gravats depuis vingt ans. Bien qu'Haussmann n'ait pas réglé tous les problèmes, le Second Empire a tiré du prestige de ces réalisations et Paris ne sera retouchée qu'en 1960 : Haussmann a donné à Paris sa forme d'aujourd'hui. [...]
[...] Paris capitale mondiale et vitrine du pouvoir impérial Un modèle qui s'exporte L'haussmannisation gagne la province, l'œuvre novatrice d'Haussmann a inspiré la transformation du réseau urbain français : A Marseille, les travaux relient la ville et le port modernisé. A Lyon, la Croix Rouge et la Guillotière sont annexées, la presqu'île est transformée par la percée de la rue d'Impériale et une nouvelle gare est construite. Paris devient un modèle, les travaux d'Haussmann ont exercé une influence considérable non seulement en Europe, ses schémas inspirent en effet Vienne, Berlin, Rome mais aussi aux Etats-Unis où ils sont à l'origine du remodèlemment de Chicago (1919) par Daniel Burnham. [...]
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