"Classes laborieuses, classes dangereuses" : voici un crédo libéral fort répandu au XIXe siècle. Longtemps ignorée ou sciemment éludée, la prise de conscience de la question sociale (à savoir la menace de l'ordre politique et social que suscite la pauvreté de masse) progresse toutefois peu à peu, s'imposant comme l'un des enjeux majeurs de la société de l'époque, que nul ne peut plus évincer. Louis Philippe comme Louis Napoléon Bonaparte ont déjà été confrontés à ce délicat problème ; la IIIe République proclamée le 4 septembre 1870 à la suite de l'échec cinglant de Napoléon III face à la Russe, n'y échappe pas. Comment les républicains (d'ailleurs divisés quant à leurs ambitions en matière sociale) vont-ils appréhender la question sociale, de juin 1871 ?après les premiers mois douloureux de la République, marqués par l'occupation prussienne et le drame de la Commune) à mai 1902 (qui voit l'avènement du bloc des Gauches) ? (...)
[...] La question sociale se pose d'ailleurs de façon d'autant plus aigue dans les périodes de marasme économique, comme dans les années 1880. La crise économique et sociale qui secoue alors la France notamment à partir de 1982, avec la faillite de l'Union Générale réveille des rancunes politiques, nationalistes, morales et sociales. A la faveur de la crise se développe un climat quelque peu révolutionnaire La réaction de l'Etat face à cette crise, qui frappe de plein fouet les paysans et les ouvriers, provoque une intense déception citoyenne, qui illustre sans doute assez ben la nécessité de prendre en compte la fameuse question sociale * Progressivement, les hommes politiques de la IIIe République prennent conscience de l'enjeu fondamental, souvent décisif que constitue la question sociale. [...]
[...] Néanmoins, si cette République radicale dont le succès est confirmé par la victoire des radiaux aux élections de 1902 a soulevé bien des espoirs, reste qu'il y a encore beaucoup à faire (ne serait-ce qu'en vertu de l'idéal laïque et d'économie des bourgeois radicaux * CONCLUSION Ainsi, la considération de la question sociale a connu bien des évolutions de juin 1871 à mai 1902 : d'une république d'ordre, modérée, relativement réticente à une politique sociale digne de ce nom, la fin du 19e siècle a assisté à une prise de conscience croissante (mais toujours imparfaite et sans doute bien insuffisante encore) des enjeux de la question sociale et de la nécessité impérieuse de mieux la prendre en compte. [...]
[...] De fait, cette droite ralliée à la République effectue, à sa manière, un pas supplémentaire dans la prise de conscience de la l'importance de la question sociale. * L'avènement de la République radicale, qui marque l'entrée dans le XXe siècle, cristallise bien des espoirs, alors que Méline, par exemple, symbolisait en quelque sorte l'alliance avec la droite ralliée interdisant toute velléité de politique sociale, ne serait-ce que par l'absence d'impôt sur le revenu l'année 1899 voit l'arrivée sur le devant de la scène politique du parti radical ; très combatif à ses débuts, il s'est toutefois assagi (notamment suite à la crise boulangiste, à laquelle il a abandonné son ambition de réviser les lois constitutionnelles) pour devenir un véritable parti de gouvernement, bien implanté dans ce qui constitue, pour ainsi dire, les forces motrices de la société de l'époque, à savoir les couches nouvelles et la France rurale Le parti radical est constitué en 1901 : ainsi est créé le PRRRS (parti radical républicain et radical socialiste), dont la structure reste cependant relativement lâche. [...]
[...] Le traitement de a question sociale par le gouvernement semble donc satisfaire la majorité. La prise en compte de la question sociale se poursuit, après toutes les reformes et lois diverses égrenées dans les années précédentes : abrogation du livret ouvrier en 1890, création des bourses du travail, liberté de la presse en 1881 ce qui permet à l'opposition de s'exprimer, éventuellement pour réclamer des reformes sociales et favoriser la prise de conscience des dangers de la paupérisation lois sur le travail des enfants et des femmes, autorisation, en 1884, des syndicats, la loi de 1898 sur les accidents du travail Aussi peut-ob dire que, d'une certaine manière, la loi de 1901 (qui accorde la liberté entière pour les associations à l'exception des associations religieuses, les congrégations) est susceptible de faciliter et d'améliorer la considération de la question sociale, ne serait-ce que parce qu'elle permet la constitution de véritables partis politiques, capables de représenter les diverses tendances politiques de l'opinion française. [...]
[...] Positivistes, héritiers de l'esprit des Lumières et de la révolution de 1789, ces républicains sont convaincus que la société et les conditions sociales ne peuvent progresser que grâce au développement de l'éducation et de l'association. De fait, l'éducation est censée œuvrer pour l'amélioration du sort des couches populaires ; d'où l'importance de la politique éducative déployée : en 1880, Camille Sée ouvre l'enseignement secondaire à la gent féminine, tandis que les lois Ferry de 1881-1882 proclament la laïcité, la gratuité de l'école primaire publique et le caractère obligatoire de l'enseignement. [...]
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