Comment se fait-il que malgré des changements apparents dans la structure des entreprises
depuis 1880, celles-ci n'aient pas su surmonter la crise des années 1930 ? Manifestement, les
symptômes de la Crise de 1929 en France ont trahi un archaïsme profond du modèle
organisationnel au sein des entreprises Françaises que les progrès et l'évolution des grands
groupes ne pouvaient que difficilement cacher. Comment expliquer un tel retard ?
On pourrait à ce stade émettre quelques hypothèses pour répondre à ce problème :
- La faiblesse structurelle de l'investissement des petites entreprises qui représentent une immense
majorité au sein de l'appareil productif, et qui n'ont pas de capacités d'investissement permettant
le renouvellement du capital fixe ;
- Au-delà de cette difficulté financière, on peut se demander si les entrepreneurs français
n'auraient pas une forme de blocage conservateur, ce qui débouche d'ailleurs sur un fossé entre
grands entrepreneurs prêts à s'initier aux nouvelles techniques de production, et les PME, dont
l'objectif principal est avant tout la survie.
- Enfin on peut aussi envisager la faiblesse du dialogue social comme facteur d'immobilisme et de
conservatisme au sein des entreprises.
C'est pourquoi nous verrons que des années 1880 et durant la guerre la structure des entreprises a
connu une progressive mais relative modernisation (I), laquelle, dans les années 1920, se poursuit
mais ne se généralise pas (II). Dès lors, les entreprises françaises peinent à faire face à la crise des
années 1930, que l'on peut aussi voir comme la fin du modèle Français.
[...] Surtout, l'OST suppose la standardisation des marchandises : sans quoi de nombreux goulots d'étranglements apparaissent en France. L'appel au marché financier est donc toujours médiocre. Saint-Gobain ou Alsthom, les 2 plus grosses entreprises cotées en bourses pèsent 1/15 de l'Anglais I.C.I. ou de l'Allemand IG Farben. Pour poursuivre la comparaison avec le Royaume-Uni et l'Allemagne, le syndicalisme ouvrier est structurellement faible, avec adhérents en 1918 pour la CGT. Cependant, la CGT peine à intégrer les femmes, les étrangers, les jeunes et plus généralement les ouvriers du monde industriel. [...]
[...] Les travailleurs manuels à domicile sont de moins en moins nombreux : de 476 femmes sur 1000 en 1906, elles ne sont plus que en 1926. B. L'investissement et modernisation L'investissement est un moteur de la croissance, il a gagné en volume 94% entre 1922 et 1930. La France se hérisse d'usines neuves et novatrices, avec une forte assimilation du progrès technique. Les techniques de rationalisation du travail, apparues en France avant la guerre, vont vite accroître la productivité des travailleurs. [...]
[...] Citroën et Renault s'inspirent du modèle fordiste pour leurs usines de Javel et de Seguin (1931 et 1930). Au niveau de la structure du capitalisme, encore souvent aux mains de grandes familles (Renault, Gallimard) qui s'avent s'enrichir d'associés diplômés, on remarque un accroissement du rythme des concentrations industrielles. Ainsi, l'intégration horizontale se répand : Poulenc et Usines du Rhône fusionnent dans Rhône-Poulenc (chimie + pharmacie) en 1928 ; 7 firmes s'allient en 1920 dans l'Union financière pour l'énergie électrique afin d'assurer la très coûteuse production et distribution d'énergie en région parisienne (centrales de Gennevilliers, la plus puissante au monde en 1922 et Vitry). [...]
[...] Les chefs d'entreprises adhèrent en masse à la CGPF (Confédération générale de la production française), créée en 1919. Dans plusieurs secteurs, comme les houillères, la sidérurgie et l'industrie chimique, des ententes sont conclues pour répartir les ventes par régions, fixer les prix, organiser l'exportation. Par contre, les petites et moyennes entreprises (par exemple dans le textile ou les cuirs et peaux) livrées à une concurrence sauvage dans des secteurs qu'aucun monopole ni entente ne règlemente, subissent durement les effets de la crise. [...]
[...] Il est à noter que le manque de main-d'œuvre durant la guerre permet aux femmes une spectaculaire entrée dans le monde du travail : de 32,8% de la population active en 1914, elles passent à 40,6% en 1918. Des mesures sont envisagées pour rationaliser l'emploi grâce au Taylorisme et à la standardisation, mais celles-ci ne connaissent qu'un écho limité. Les industries électrique, l'industrie chimique, se développent à toute vitesse : ainsi, la production de Saint-Gobain croît de 70%. Les autres secteurs sont alors sacrifiés. [Dès lors, l'Etat décide de contrôler l'économie nationale, notamment en proposant des moyens de financement. [...]
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