Le Global Peace Index, forgé par l'Association Vision of Humanity, place le Japon comme le septième pays au monde le plus pacifique. Sans chercher à s'interroger sur la pertinence d'un tel classement ou de ses critères d'évaluation, il reste néanmoins possible et nécessaire d'étudier le cas du "pacifisme" japonais, consacré par l'article 9 de sa Constitution.
La Constitution japonaise n'est cependant pas uniquement le résultat de la défaite et d'une imposition par Mac Arthur et le gouvernement américain. Nombre d'historiens et constitutionnalistes japonais, dont Yoichi Higuchi, ont en effet remis en cause cette théorie du "Diktat" dans un docu-fiction Le Ciel bleu du Japon (Nihon no Aozora), sorti en 2007.
Néanmoins, force est de constater que l'article 9 de la Constitution japonaise offre un caractère particulièrement extrême de pacifisme, même dans l'euphorie de la création des Nations Unies et de l'interdiction du recours à la force et à la menace de la force, proclamée dans la Charte de San Francisco. Le Japon est censé renoncer à tout usage ou menace de la force mais également à l'utilisation de forces armées dans ce but.
Cet ajout au début du second paragraphe a autorisé le Japon a permis au Japon de justifier juridiquement l'existence de forces dites de défense.
Étudier le pacifisme d'un point de vue stratégique ne peut manquer d'intriguer. Que ce qui symbolise l'absolu refus du recours à la force, à la force armée puisse servir de stratégie « militaire », même palliative et avoir un caractère offensif, est de prime abord extrêmement surprenant.
Comment expliquer que le Japon ait pu maintenir une stratégie pacifiste tout au long de la Guerre froide et accroître en partie son influence ?
Comment définir les interrogations sur le statut de sa force militaire dans le contexte post-Guerre froid ? Comment appréhender le pacifisme, à la fois comme courant, non seulement idéologique et politique, mais aussi comme méthode d'action, comme « stratégie » au plein sens du terme, et a fortiori quand le pacifisme devient la doctrine d'être et d'agir de toute une nation, en l'occurrence le Japon d'après-1945 ?
[...] J., Japanese Defence. The Search for Political Power, Singapore, Institute of Southeast Asian Studies, Regional Strategic Studies Programme Ouvrage court, centré sur les changements du début des années 1980, s'intéresse aux questions économiques, budgétaires, technologiques et de relations internationales. - Samuels, Richard J., Securing Japan, Ithaca and London, Cornell University Press Ouvrage très complet, en particulier sur les changements opérés depuis la fin de la Guerre Froide. - Seizelet, Eric, Serra, Régine, Le pacifisme à l'épreuve. Le Japon et son armée, Paris, Les Belles Lettres, Collection Japon Un des rares ouvrages publiés en français exclusivement sur ce thème, avec un fort accent juridique. [...]
[...] Le pacifisme japonais : une exception ? Lorsque le monde est en paix, un homme de bien garde son épée à son côté. Stratégies de Wu, cité in Sun Zi, L'Art de la guerre, Flammarion p.157 Le processus japonais de communication repose souvent sur un non-dit qui donne le rôle actif plutôt au receveur qu'à l'émetteur du message. Jean-Marie Bouissou, L'envers du consensus Comment appréhender le pacifisme, à la fois comme courant, non seulement idéologique et politique, mais aussi comme méthode d'action, comme stratégie au plein sens du terme, et a fortiori quand le pacifisme devient la doctrine d'être et d'agir de toute une nation, en l'occurrence le Japon d'après-1945 ? [...]
[...] Deux autres éléments ont incité le Japon à repenser sa stratégie pacifiste. Le premier fut la Guerre du Golfe de 1991, à laquelle le Japon n'a participé que par un soutien financier et diplomatique. Sa diplomatie du chéquier a été promptement critiquée par ses alliés et plusieurs analystes, qui ont vu là un échec du Japon à s'affirmer sur la scène internationale. Le second choc a été en 1998 le tir de missile nord- coréen. La prolifération nucléaire en Corée du Nord, qui parvient malgré les pressions internationales à se doter finalement en 2006 d'un potentiel nucléaire se révèle particulièrement inquiétant pour le Japon, d'autant que la fermeture du pays le rend relativement insensible à la stratégie japonaise d'aide au développement et au commerce. [...]
[...] Alors que les débats ont foisonné sur la dissuasion nucléaire et l'acquisition de l'arme, le Japon s'est toujours refusé à développer des capacités nucléaires. Comment peut-il alors utiliser l'arme psychologique, symbolisée par la possession d'armes non conventionnelles ? En effet, la dimension psychologique de la stratégie, permettant l'affaiblissement de la volonté de combattre de l'adversaire, est d'autant plus forte que les capacités non conventionnelles et en particulier nucléaires mais aussi conventionnelles sont importantes. Or, l'équilibre est dans ce cas en défaveur monumentale avec le Japon. [...]
[...] Ainsi furent établies les bases du pacifisme japonais, soit l'article 9 de la Constitution et l'alliance américaine. L'usage stratégique du pacifisme n'est pas un simple effet d'un air du temps, porté par l'euphorie de la victoire mais a largement forgé et déterminé la politique de défense du Japon au cours de la Guerre Froide. Du bon usage du pacifisme par le Japon Nous [les Etats-Unis] sommes la fenêtre par laquelle le Japon voit le monde Brzezinsky, Zbigniew, The Fragile Blossom, cité in Jean-Marie Bouissou To protect Japan's peace we need guns and rockets. [...]
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