Qui est le responsable du régime stalinien et de ses terreurs ? D'une manière plus importante, comment ce régime s'est-il mis en place ? Dans leur analyse de l'arrivée de Staline au pouvoir, de nombreux historiens soulignent le caractère inattendu de cet évènement. DEUTSCHER note, « peu d'évènements ont été aussi frappant et ont semblé aussi insignifiant aux yeux de leurs contemporains que l'étonnante accumulation de la puissance dans les mains de Staline qui eut lieu de vivant même de Lénine. » Alors que RIASANOVSKI remarque, « la conquête par Staline du pouvoir peut certes être considérée comme un cas particulièrement sinistre mais impressionnant, de lutte pour toute-puissance ». Il est donc particulièrement intéressant d'évaluer cette arrivée au pouvoir – inattendu et surprenante. La question du pouvoir se pose d'une manière aigue pour la première fois, depuis la fin de la guerre civile en 1921, après la mort de Lénine le 21 janvier 1924. Le pays et surtout le parti ont besoin d'un successeur. Pourtant, le « Testament » laissé par le vojd, un mémorandum du 25 décembre 1922, ne laisse pas de solution pratique. Tous les candidats à ce poste d'importance majeure sont critiqués. Trotski est « trop attiré par le côté purement administratif des affaires » et s'oppose au Comité central du parti, Zinoviev et Kamenev ont étaient d'abord des Mencheviks et manquent d'audace révolutionnaire, Boukharine a « quelque chose de scolastique », alors que Staline, selon le postscriptum du 4 janvier 1924, « est trop brutal ». Lénine propose même « de trouver un moyen de le démettre de cette fonction et d'y nommer un autre homme…plus patient, plus loyal, plus poli et plus attentif envers ses camarades, moins capricieux, etc. ». Sans candidat définitif, une simple succession n'est pas possible et il s'agit donc de « prendre » le pouvoir, de le « saisir », de s'en emparer. Au vue du testament de Lénine, le fait que ça soit Staline qui « prennne le pouvoir » peut paraître paradoxal. Un social-démocrate géorgien dès 1889, il détient toute l'autorité et contrôle effectivement le pays dès la fin des années vingt. Au XVe Congrès du parti communiste, le 27 décembre 1927, le Congrès condamne toute « déviation de la ligne générale du parti », interprétée par Staline. Ses rivaux perdent de l'importance. Toutefois, c'est l'année de 1929, l'année du cinquantième anniversaire de Staline, qui semble être celle de la prise totale du pouvoir. Il émerge désormais victorieux : l'opposition est détruite et il est capable de dévoiler et de mettre en pratiques ses plans quant au futur de la Russie, devenant donc le dirigeant suprême du pays. Une ascension au pouvoir de cet « homme de l'acier » peut toutefois paraître particulière, relativement différente de celui de Hitler, à qui on le compare souvent. C'est une ascension sur les bases politiques, pratiques et idéologiques. Elle se passe au sein de parti et ainsi se distingue des ascensions « classiques » déclenchées par des causes profondément ancrées dans la société, tels que les catalyseurs économiques, sociaux ou encore celui de la guerre. Sachant que le régime soviétique influença dès lors une grande partie du monde, il est indispensable d'appréhender comment l'ascension de Staline et pas d'un autre membre du parti fut possible. Ainsi, comment Staline s'empare-t-il du pouvoir en Russie ? Nous allons voir que, un bolchévik dévoué mais modéré, proche de masses et de Lénine (I), Staline accumule des postes stratégiques dans un parti fortement centralisé et unitaire (II), pour en user dans des querelles intestines et s'emparer ainsi d'un pouvoir absolu. NB : Quelques dimensions internationales qui ont influencé tant bien que mal le processus de l'acquisition du pouvoir sont désormais mentionnées.
Il est tout d'abord indispensable de situer l'arrivée de Staline au pouvoir et sa propre figure dans un contexte un peu biographique. La personnalité même de Staline, mais notamment ses rapports personnels avec le pays, avec le parti communiste et avec Lénine ont joué un rôle majeur dans son ascension.
[...] COQUIN nota : personne n'avait prévu que ce bureaucrate, cet homme de l'appareil, allait se révéler également en dépit tout un homme d'Etat et pourtant après la mort de Lénine, Staline usa du tremplin de puissance que nous venons de décrire pour assurer sa succession et passer ainsi du rôle d'un khozyain, maitre à celui d'un véritable vojd, chef effectif. III . pour en user dans des querelles intestines et s'emparer ainsi d'un pouvoir absolu A. Des manœuvres tactiques et idéologiques de la lutte interne Comme nous l'avons démontré, de son vivant, Lénine a réussi d'éradiquer la dissension, mais ceci ne fait que déférer le conflit. En absence donc d'un véritable vojd qui unirait et guiderait. Cette lutte se passe sans que le Testament, défavorable à tous, soit rendu public et la plupart des débats restent à huis clos. [...]
[...] A la vue du testament de Lénine, le fait que ça soit Staline qui prend le pouvoir peut paraître paradoxal. Un social- démocrate géorgien dès 1889, il détient toute l'autorité et contrôle effectivement le pays dès la fin des années vingt. Au XVe Congrès du parti communiste, le 27 décembre 1927, le Congrès condamne toute déviation de la lige générale du parti interprétée par Staline. Ses rivaux perdent de l'importance. Toutefois, c'est l'année de 1929, l'année du cinquantième anniversaire de Staline, qui semble être celui de la prise totale du pouvoir. [...]
[...] Comme le note COQUIN, cette adhésion de la première heure, ce parcours rectiligne de militant bolchevik et de fidèle disciple de Lénine lui assuraient déjà une biographie exemplaire, qui trancha avantageusement, le jour venu, sur les zigzags ou les défaillances de tel ou tel Toutefois, Staline est également un produit du système administratif et bureaucratique, ce qui lui permet des manœuvres dans la jungle communiste au tout sommet du pouvoir. Comme dira Trotski, ce n'est pas Staline qui a créé l'appareil bureaucratique, c'est cet appareil qui a crée Staline à son image II . Staline accumule des postes stratégiques dans un parti fortement centralisé et unitaire A. [...]
[...] Accusé de chauvinisme grand- russien il est détaché de tout patriotisme géorgien et est placé dès 1912 à la tête du Bureau russe du parti. Ceci le place au centre de la vie politique chose nécessaire pour toute acquisition de la puissance. Les masses, ou le peuple pour lequel il est longtemps peu connu, pourront donc s'identifier à lui. Son manque d'éducation universitaire et les souvenirs religieux de son éducation dans le séminaire le placeront incontestablement sur la même longueur d'onde que la grande masse de la population russe. [...]
[...] Dès 1917, Staline devient le Commissaire aux nationalités et contrôle ainsi les affaires de près de moitié de la population du pays. Il est d'abord maître des multiples régions frontalières la périphérie dont le poids selon DEUTSCHER s'est fait sentir de façon économique, politique et culturelle avec le recul de la révolution. Deux ans plus tard, il est membre du Bureau Politique (Politburo) le véritable gouvernement du pays où il règle toutes les tâches journalières. En même temps il est le seul officier de liaison permanent entre ce bureau et le Bureau d'Organisation Orgburo, dans lequel il s'occupe des promotions et des mutations (ceux des opposants si nécessaire), prépare des fiches et des dossiers sur la plupart des membres du parti. [...]
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