« A celui qui n'a plus rien, la Patrie est son seul bien ». Cette phrase de Jean Jaurès contraste avec l'internationalisme ouvrier qui constitue un fondement majeur de la doctrine socialiste. Le manifeste du Parti communiste, rédigé en 1848 par Karl Marx et Friedrich Engels, pères du socialisme scientifique, se termine par ses termes : « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! ».
Le socialisme, conception politique et économique fondée sur la volonté de remplacer le capitalisme par une société où les moyens de productions et d'échange sont mis en commun au service de l'intérêt général, a pour fondement l'internationalisme prolétarien qui seul peut s'opposer aux structures étatiques nationales contrôlées par les différentes bourgeoisies et par lesquelles elles exploitent les prolétariats nationaux (...)
[...] De 1864 à 1914, selon quelles modalités le socialisme parvient-t-il à concilier une idéologie par essence internationaliste avec les aspirations patriotiques des classes populaires européennes? I. Les socialistes rejettent la patrie qu'ils considèrent comme un instrument de la bourgeoisie pour exploiter les prolétaires. A. La Nation constitue la superstructure du capitalisme La théorie marxiste dénonce la Nation, instrument de la bourgeoisie pour exploiter le prolétariat. Les socialistes, principalement les marxistes, considèrent que la Nation, qui s'inscrit dans le cadre de l'État bourgeois, est le corollaire de l'économie capitaliste. [...]
[...] Les socialistes s'opposent au nationalisme agressif envers les nations étrangères, prôné par Maurice Barrès ou Paul Déroulède. Il se veulent les héritiers de 1789, ne renient pas l'héritage républicain de la France, au contraire, notamment Jean Jaurès, auteur de l'Armée nouvelle (1910) mais ils sont surtout favorables à une République sociale en opposition à la République bourgeoise. Il n'y a donc pas de contradiction entre un patriotisme défensif et l'internationalisme ouvrier. B. L'idéal internationaliste est diffusé par les Internationales ouvrières, qui permettent la coopération des partis socialistes nationaux La construction de l'internationalisme par le haut : les Internationales. [...]
[...] La prépondérance du nationalisme en Europe oblige les socialistes à montrer leur attachement à la patrie. A. Les classes populaires sont très attachées aux Nations auxquelles elles appartiennent Une classe ouvrière très patriote . La classe ouvrière fait preuve de patriotisme, parfois même de xénophobie. En 1871, nombreux sont les ouvriers et artisans qui rejoignent la Garde nationale pour combattre les Prussiens qui assiègent Paris. Pour leur grande majorité, les masses populaires n'ont aucun contact avec des ouvriers étrangers. Pour le travailleur du nord de la France, l'image de l'Allemand se réduit au soldat Prussien qui a occupé son territoire au terme du conflit contre la Prusse en 1870. [...]
[...] En AutricheHongrie, qui est une monarchie autoritaire, la principale revendication des sociaux-démocrates de Victor Adler est la mise en place du suffrage universel. Des théoriciens socialistes austro-hongrois s'emparent du problème national, comme Otto Bauer, auteur de La question des nationalités et la Social-démocratie, ouvrage publié en 1907. Il définit une nation comme une réalité culturelle et historique, dans la lignée du congrès de Brno (1899) du SPÖ (parti social-démocrate autrichien) qui établit une égalité entre les différentes nationalités à l'intérieur d'un ensemble fédéral, insistant sur la concordance entre revendications nationales et sociales dans certaines circonstances. [...]
[...] L'internationalisme se traduit par l'antimilitarisme, l'anticolonialisme et le pacifisme. Le monde ouvrier européen, dont le nombre croît avec le développement du capitalisme, ne se sent pas intégré à des nations qui ne lui reconnaissent pas le droit à une égalité réelle, de condition. Ils sont considérés comme une classe dangereuse Mais ils leur est également difficile de pratiquer pleinement une solidarité ouvrière internationale qui dépasse le cadre national. Et la montée des nationalismes à la veille de la Première guerre mondiale souligne le fait que le sentiment national des ouvriers soit supérieur à la conscience internationale de ceux-ci. [...]
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