Le Sénat sous la IIIème République

Résumé du document

Tantôt institution maîtresse du pouvoir délibérant, comme dans la Constitution de l'an VIII, tantôt abandonnée en faveur du monocaméralisme comme dans la seconde République, ce n'est qu'avec l'avènement de la Constitution de 1875 de la IIIème République que le Sénat acquiert sa légitimité au sein des institutions françaises. Et si, ainsi que le déclame Dufaure, la Constitution de 1875 est "avant tout un Sénat", il convient de s'interroger sur la genèse de cette institution et sur les réponses qu'elle apporte à une période troublée de l'histoire qui place en elle ses espoirs.
Aussi étudierons-nous en premier lieu la naissance du Sénat républicain lors de la IIIème République, puis nous questionnerons le rôle du Sénat dans le fonctionnement institutionnel de la IIIème République.
Enfin nous montrerons en quoi le Sénat constitue sinon un bastion conservateur et monarchique, du moins un défenseur de la stabilité institutionnelle de la IIIème république et un porte-parole du conservatisme économique et social.

Extraits

[...] (Mais ce n'est qu'avec le vote de l'amendement Wallon, le 30 janvier 1875, que le Sénat est réellement consacré dans le fonctionnement institutionnel de la IIIème République. De cet amendement découle la loi constitutionnelle du 24 février 1875 qui établit l'organisation du Sénat. Le Sénat est donc le fruit d'un compromis entre républicains, pour qui le Sénat incarne le prix à payer pour l'avènement de la République, et les monarchistes, qui voient en lui leur bastion conservateur contre les excès républicains. [...]

[...] D'autre part, le Sénat est alors perçu comme une enseigne de la maturité législative puisqu'il faut pour être sénateur avoir plus de quarante ans ainsi que l'énonce l'article trois de la loi du 24 février 1875. Et François Goguel qualifiera dès lors les décisions du Sénat d'"acceptation sous bénéfice d'inventaire", illustrant le caractère réfléchi des prérogatives du Sénat. Enfin, le Sénat est perçu en 1875 comme une institution stable puisqu'en vertu de l'article six "les sénateurs des départements et des colonies sont élus pour neuf années et renouvelables par tiers tous les trois ans". [...]

[...] Son projet devient alors la loi du 14 août 1884 qui procède à une démocratisation du Sénat. En effet, la loi du 14 Août 1884 procède de la "déconstitutionnalisation" des articles 1 à 7 de la loi du 24 février 1875 en application de l'article trois qui s'énonce ainsi: "les articles 1 à 7 de la loi constitutionnelle du 24 février 1875, relatifs à l'organisation du Sénat, n'auront plus le caractère constitutionnel," et les remplace par la loi constitutionnelle du 9 décembre 1884. [...]

[...] Ainsi l'on comprend que la IIIème république consacre le Sénat au sein des institutions républicaines françaises : le Sénat n'est plus oligarchique, mais démocratique. Puissant et redouté le Sénat de la IIIème République joue un rôle central face à un exécutif fragile. Mais le 10 juillet 1940, sous les coups de la guerre, le nouveau gouvernement autoritaire de Pétain s'installe à Vichy et enterre les institutions législatives républicaines qui ne ressusciteront que, quelques années plus tard, sous la IVème république. [...]

[...] Apparu dans l'ambiguïté d'une impossible résurgence monarchique, le Sénat est la pierre angulaire du fonctionnement institutionnel de la IIIème République. II/ Place et rôle du Sénat au sein des instances républicaines De l'élection et de la composition du Sénat (Le Sénat de 1875 : "Le grand conseil des communes de France" Forts de l'impossibilité d'une restauration monarchique, les légitimistes aspirent à un Sénat conservateur, "une chambre de résistance contre le torrent des innovations téméraires" selon De Broglie. Ainsi la composition du Sénat est-elle particulière puisque, en vertu de l'article premier de la loi organique du 24 février 1875, "le Sénat se compose de trois cents membres: deux cent vingt-cinq élus par les départements et les colonies, et soixante-quinze élus par l'Assemblée nationale". [...]