« Une bonne organisation militaire est le fondement de tout Etat ». Cette phrase, issue des discours de Machiavel montre bien l'importance même de l'art de la guerre dans la formation politique, du rôle décisif que joue le pouvoir militaire sur le politique. Dès le XVe siècle, nombreux sont les penseurs qui, à l'instar de Machiavel, en conclurent que l'existence et la grandeur d'un Etat n'est possible que si le pouvoir militaire a sa propre place dans le système politique. Cette idée, cette conception a façonné la pensée stratégique en Europe, et ce jusqu'au XXe siècle. La thèse du célèbre sociologue américain Charles Tilly, « States made war and wars made States » prouve bien que, depuis ses origines le lien entre guerre et Etat est tout, sauf une coïncidence. De Gaulle lui-même l'affirmait, en proclamant que l'ordre guerrier est essentiel à la nation et à l'Etat.
Si le XVIe siècle marque un véritable tournant, dans le sens où le rôle joué par la guerre dans la formation des Etats européens prend une nouvelle ampleur, ceci peut s'expliquer en partie par les améliorations techniques et les progrès de la science, qui accélèrent le rythme de l'évolution des guerres, et par la même de l'évolution de l'Etat. La guerre apparaît en effet comme le moyen pour l'Etat de se définir et de se constituer en tant qu'entité autonome et indépendante, en affirmant sa puissance face aux contestations aussi bien internes qu'externes. Désormais au XVIe siècle, dans le contexte des guerres de Religion qui embrasent l'Europe, c'est l'Etat qui fait la guerre, ayant mis fin à la féodalité en s'appropriant les mécanismes de la guerre et sa technicité.
Il convient donc de s'interroger sur les modalités d'interaction et sur l'influence qu'exerce la guerre dans la formation des Etats modernes européens. Si l'Etat s'est construit et défini au niveau territorial, politique et idéologique, à travers des guerres principalement offensives entre le XVIe et le XVIIIe siècle, la guerre a joué un rôle encore plus primordial dans la consolidation de la notion d'Etat-Nation. Mais il ne faut pas non plus négliger l'évolution du rapport de l'Etat à la guerre et son rôle dans la construction étatique, qui n'a pu se développer qu'avec l'évolution de la technicité militaire, bouleversant même la notion d'Etat jusque dans le XXe siècle.
[...] Face à cette invasion française, les Etats italiens ne peuvent opposer une grande résistance. Cette guerre éclair constitue un tournant dans l'art de la guerre. La guerre médiévale est révolue. Désormais, l'offensive combinée d'une artillerie et d'une infanterie est la nouvelle donne de la guerre, consacrant, du XVIe au XVIIe siècle, la prédominance des sièges dans la manière de faire la guerre. Face au développement d'une artillerie certes lente et encombrante, mais de plus en plus puissante, les fortifications se modifient, notamment avec l'apparition de la Trace italienne En France, le pré-carré de Vauban et sa protection du territoire entérinent ce modèle de fortification. [...]
[...] La France est également confrontée à la question de l'Etat de droit. Il ne faut pas oublier qu'elle a connu durant la guerre le gouvernement de Vichy et la collaboration. C'est avec la constitution de 1958, remplaçant celle de 1946, que l'Etat de droit va renaître, avec l'instauration d'un président arbitre nommant un gouvernement chargé de déterminer et de conduire la politique de la nation ainsi qu'un contrôle de constitutionnalité. Ce renouveau de l'Etat de droit est une caractéristique européenne. [...]
[...] La création de l'Organisation des Nations Unies et du Conseil de l'Europe, ainsi que l'adoption de la Déclaration Universelle et de la Convention européenne des Droits de l'Homme, marquent la volonté des démocraties d'empêcher le retour d'une telle barbarie. En Allemagne, le concept d'Etat de Droit renaît suite à la capitulation nazie en partie pour rompre avec un lourd passé. Les puissances d'occupation, en plein contexte de guerre froide et de dissuasion nucléaire, sont soucieuses de restaurer un Etat en rendant impossible toute dérive totalitaire. [...]
[...] La conscription se développe alors dans tous les pays européens. L'évolution technologique permet une nette orientation vers la mécanisation de la guerre, vers l'accroissement des armées, la militarisation de la population, la nationalisation de l'effort de guerre et l'intensification des opérations militaires. La période de guerre des Etats capitalistes, de 1789 à 1914, voit le développement des nationalismes et des Etats-Nations. Or, c'est l'évolution technologique qui, de concert avec les considérations politiques distillées depuis la Révolution française en Europe, permet un accroissement de la participation des civils aux affaires militaires. [...]
[...] Cependant, même si la paix d'Augsbourg avait établi un équilibre politique, un processus de «construction confessionnelle» était en marche. Cela se faisait par des marqueurs identitaires (vêtements, prénoms, etc.). Mais ce processus aussi conduit-il à la formation de ligues politico- militaires : on voit la naissance, en 1608, de l'Union protestante (sous la direction du Palatinat) ; en 1609 c'est au duc de Bavière de diriger la Ligue catholique. C'est la «défenestration de Prague» en 1618 qui déclenche la guerre. Elle s'internationalisa avec l'entrée du Danemark, puis de Suède. [...]
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