Au début du XVIIIè siècle, les idées de liberté semées dans toute l'Europe par la Révolution française germent dans les esprits, surtout dans les peuples encore privés d'Etat : Belges, Norvégiens, Italiens, Grecs, pour n'en citer que quelques uns. L'impact des idées libérales, associé à la dimension révolutionnaire conférée par l'exemple français, est particulièrement fort pour le peuple grec, qui, dès les dernières décennies du XVIIIè siècle, organise une résistance destinée à soutenir une future révolution nationaliste contre l'Empire ottoman. Se mettent en place de nombreuses sociétés secrètes, similaires aux loges maçonniques ou aux carbonari, et dont le but à terme est la libération de la nation grecque. Parmi elles, l'Hétairie ou Société des Amis (Philiki Hetairia), fondée en 1814 par trois marchands d'Odessa, acquiert rapidement une importance majeure, en attirant un grand nombre d'adhérents issus de milieux variés – commerçants, intellectuels, artisans. La direction de cette société est confiée en 1820 à Alexandre Ypsilanti, éminent général de l'armée russe, qui prévoit de lancer une insurrection générale pour libérer le peuple grec du joug ottoman.
Ce projet révolutionnaire intervient seulement cinq ans après le Congrès de Vienne et l'établissement de la Sainte Alliance, définie comme un « ensemble de traités dont l'objet est de maintenir les trônes des souverains restaurés et de prévoir une assistance mutuelle des peuples contre les tentatives révolutionnaires » . La révolution grecque semble ainsi radicalement contraire aux principes de la Sainte Alliance, et elle l'est d'autant plus si l'on considère que trois des puissances souveraines – Russie, Royaume-Uni, France – vont intervenir dans le conflit auprès des rebelles, jusqu'à l'accession du peuple grec à son indépendance, en 1832. Il semble donc que les puissances fassent preuve d'un relatif dénigrement des principes de la Sainte-Alliance, relégués au second plan derrière le principe des nationalités. Dans quelle mesure la Révolution grecque constitue-t-elle un ébranlement de la Sainte-Alliance ?
En premier lieu, il est clair que la nature du conflit – une révolution nationaliste sauvée par l'intervention des puissances – signe l'ébranlement de la Sainte-Alliance. Toutefois, cet ébranlement se doit d'être relativisé en examinant les motivations réelles des puissances à intervenir dans le conflit, et en analysant le succès mitigé que constitue l'indépendance grecque.
[...] Ce protocole, attestant de la convergence de vues de la Russie et du Royaume- Uni, prévoit la création d'un Etat autonome grec, fruit de la médiation entre Ottomans et Grecs. Parallèlement, en octobre 1826, le nouveau tsar Nicolas Ier signe avec l'Empire Ottoman le traité d'Ackerman, selon lequel la Russie obtient l'administration des principautés moldo-valaques et de la Serbie. Canning persuade finalement le roi français Charles X à se joindre à la coopération anglo-russe. Par le traité de Londres, signé en juillet 1827, les trois puissances prévoient la reconnaissance à la Grèce insurgée d'un régime autonome sous souveraineté du sultan, et la pacification immédiate de la région. [...]
[...] La tournure des événements, pourtant, déjouera ses intentions initiales, et le poussera à adopter une attitude de condamnation face à une insurrection contraire aux principes de la Sainte Alliance. Toutefois, la Russie maintient ses velléités expansionnistes sur ces régions, et réussit finalement à obtenir l'administration des principautés moldo-valaques et de la Serbie par le traité d'Ackerman de 1826. De même, en 1827, quand la Grèce se dote d'un gouverneur, en la personne de Jean Capo d'Istria, il s'avère que celui-ci n'est autre que l'ancien ministre des affaires étrangères russes. [...]
[...] La Révolution grecque et les puissances européennes (1820-1832) : une victoire du principe des nationalités ? Introduction Au début du XVIIIè siècle, les idées de liberté semées dans toute l'Europe par la Révolution française germent dans les esprits, surtout dans les peuples encore privés d'Etat : Belges, Norvégiens, Italiens, Grecs, pour n'en citer que quelques uns. L'impact des idées libérales, associé à la dimension révolutionnaire conférée par l'exemple français, est particulièrement fort pour le peuple grec, qui, dès les dernières décennies du XVIIIè siècle, organise une résistance destinée à soutenir une future révolution nationaliste contre l'Empire ottoman. [...]
[...] Il est alors sans doute plus juste de décrire le nouvel Etat comme un Etat croupion comme le fait René Girault[3]. Néanmoins, malgré ces réserves, la Sainte- Alliance se trouve bel et bien affectée par la victoire de la Révolution grecque, et l'indépendance grecque, comme l'indique, à l'époque, Metternich lui-même, va présager la préparation d'une immense révolution en Europe. Bibliographie Ouvrages généraux BERSTEIN Serge, MILZA Pierre, Histoire du XIXè siècle, Hatier, Paris : 1996 GIRAULT René, Peuples et nations d'Europe au XIXè siècle, Hachette Supérieur, Paris : 1996 Ouvrages spécialisés CASTELLAN Georges, Histoire des Balkans, Fayard, Paris CLOGG Richard, A concise history of Greece, Cambridge University Press, Cambridge: 1992 CLOGG Richard, A short history of modern Greece, Cambridge University Press, Cambridge: 1986 CONTOGEORGIS Georges, Histoire de la Grèce, Hatier, collection Nations d'Europe Paris : 1992 DAKIN Douglas, The Greek struggle for independence, B.T.Batsford Ltd RISTELHUEBER René, Histoire des peuples balkaniques, Fayard, Paris : 1950 SOVRONOS Nicolas, Histoire de la Grèce moderne, PUF, collection Que sais-je ? [...]
[...] Une guerre de religion Le christianisme des insurgés rallie les puissances Le conflit prend très vite, aux yeux des puissances, l'apparence d'une véritable guerre de religions. Ce n'est finalement pas la cause intrinsèque du conflit la libération nationale visant à créer un Etat-nation rassemblant tous les Grecs - qui rallie les puissances à la cause des insurgés. La défense d'un peuple chrétien opprimé par un peuple musulman, qui plus est jugé barbare va primer sur le principe de légitimisme issu de la Sainte-Alliance. [...]
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