« Tocqueville suggère que les périodes révolutionnaires sont par excellence les périodes obscures de l'histoire, où le voile de l'idéologie cache au maximum le sens profond des événements aux yeux des acteurs du drame. » Cette citation de François Furet, en dépit de son caractère quelque peu généraliste, semble être un préambule nécessaire quant à la tentative de compréhension de cette singulière période qu'est la Chine populaire de Mao Tse-tung. Car de la proclamation de la République populaire de Chine le 1er octobre 1949, à sa mort en 1976, la révolution est quasi perpétuelle. Mao, communiste baroque, éternel despote, rebelle éternel, demeure indissociable de ces quasi trois décennies, tout comme ce paradigme de révolution permanente. « Il est juste de se rebeller », argue Mao. En effet, il est obsédé par cette crainte que la révolution dégénère faute d'une relance continue, revenant en arrière avec comme danger en ligne de mire, le retour du capitalisme. Pour lui une révolution peut avoir des effets durables, mais ne dure pas elle même ; c'est pourquoi il accélère la transition au socialisme, prend un raccourci vers le communisme, s'évertuant à empêcher le retour de privilèges, de la bureaucratie, de l'embourgeoisement qu'il a toujours jugé inévitable. Ces révolutions artificielles sont mises en forme par une société et un parti constamment activés - mobilisation, quadrillage, endoctrinement - contre ces dégénérescences sus-énoncées, poursuivant toujours cette dynamique de mouvement. Mao préfère le maintien de la ferveur révolutionnaire aux réalisations.
[...] Les répercussions, catastrophiques, sont directement imputables au Grand Timonier. Le Grand Bond en avant prit forme lorsque le comité central du PCC se rendit compte de l'impossibilité d'adapter le modèle stalinien de croissance industrielle à la situation chinoise. Le surplus de ressources issu de l'agriculture demeurait jusqu'à présent insuffisant pour financer le commerce extérieur, l'industrialisation et nourrir les centres urbains surpeuplés. Face à cette situation, Mao préconise qu'on refaçonne les campagnes pour obtenir une meilleure production grâce à une organisation massive de la main d'œuvre. [...]
[...] Cependant le modèle stalinien d'industrialisation qui mettait l'accent sur l'industrie lourde aux dépens de l'agriculture était inapplicable en Chine du fait de la prépondérance des campagnes dans l'économie, l'agriculture étant la base même de la vie pour les masses chinoises. Il lance son premier plan quinquennal en 1955 visant une première vague de collectivisation. Aujourd'hui, on appelle cette période le premier bond en avant. Une grande partie des paysans font alors partie de coopératives. Une hausse considérable de la production est annoncée. Cependant, de nombreuses inondations et intempéries ravageront les récoltes ( des productions pourrissent dans les greniers). [...]
[...] On demande pour la première fois plus de liberté, plus de démocratie. Les principales figures de ces revendications sont Lin Xiling, Hu Feng et Chu Anping. Dans certaines régions, cette campagne des cent fleurs n'aura duré que quelques semaines voire quelques jours. En effet, les principaux responsables du parti ont contraint Mao de réprimer les étudiants des étudiants de l'université de Pékin seront considérés comme dangereux personnes seront envoyées dans les Laogais, camps de rééducation par le travail, les goulags chinois. [...]
[...] Mao, alors président du parti est élu par le congrès président de la République Populaire de Chine en 1954. Cette institution d'un président singularise le modèle chinois du modèle soviétique. On trouve dans cette spécificité à coup sûr un écho de l'empereur d'antan, une réponse aux besoins des Chinois de voir une seule personne incarner l'autorité. Cumulant les deux fonctions, le pouvoir d'action de Mao demeure considérable. Comme pour le modèle soviétique, le culte de la personnalité se vulgarise ; on refait la Longue Marche en son honneur, on affiche ses portraits partout. [...]
[...] Les paysans comme les intellectuels ou les fonctionnaires pouvaient être sacrifiés au service d'un idéal. L'idéologie maoïste de la lutte des classes était devenue une abstraction de visionnaire. Dans les années 1960, le culte de Mao avait supplanté les dieux locaux et autres figures de l'ancienne religion paysanne, pourtant vers le milieu des années 1970, la violence de la GPRC et la chute de Lian Pao avaient terni son image. En définitive, il semble qu'au moment ou Mao meurt, sa révolution était déjà morte. [...]
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