Le 4 septembre 1870, suite à la nouvelle de la capitulation de Sedan et de la capture de Napoléon III, L'Empire est déchu et la République proclamée à l'Hôtel de ville de Paris. Or la guerre contre la Prusse continue : la IIIème République naît donc dans un contexte difficile. Si le 4 septembre 1870, les républicains apparaissaient liés contre le régime de l'Empire et se prononçaient en faveur de la République, il n'empêche que, partagés entre plusieurs tendance (les modérés, les radicaux…), les républicains entretiennent divers rapports au pouvoir (le pouvoir désignant les différentes institutions politiques permettant de gérer le pays, à savoir, la Chambre des représentants, le Sénat à partir de 1875, la présidence ; et les hommes qui y siègent) : ils conçoivent le pouvoir différemment, c'est-à-dire que tous ne sont pas d'accord sur la direction à donner au régime et au pouvoir (République modérée ou République radicale ?), et, dans le contexte immédiat, ils se divisent sur les solutions pour remédier à la crise du pays (faut-il poursuivre la guerre ?). Ces indécisions entraînent un vote conservateur et monarchiste. Ainsi, paradoxalement, la République, proclamée en 1870, ne connaît véritablement un pouvoir républicain qu'à partir de 1876 et à proprement parler en 1879 (lorsque les républicains contrôlent les deux Chambres).
S'agissant alors d'étudier les liens entre les républicains et le pouvoir en France, se posent alors trois questions principales : comment les républicains conçoivent-ils le pouvoir, comment le définissent-ils et l'envisagent-ils ? Quels liens les républicains entretiennent-ils avec le pouvoir en place ? Et, enfin, comment conquièrent-ils le pouvoir ? Le principal enjeu pourrait donc être de démontrer comment, dans un contexte qui apparemment leur est hostile, les républicains parviennent à faire entendre et valoir leurs idées et à accéder au pouvoir.
Tout d'abord, sachant que la naissance de la République débouche sur un pouvoir conservateur et monarchiste, il faut étudier comment le pouvoir échappe au républicains : qu'est-ce qui les dessert ? Ensuite, dans un contexte défavorable aux idées républicaines (l'Ordre Moral), il faut tâcher de voir comment ils parviennent à les faire valoir et quelle attitude ils adoptent vis-à-vis du pouvoir en place. Enfin, il s'agit de voir comment ils accèdent au pouvoir et comment ils mettent en œuvre leur conception du pouvoir.
[...] Tout d'abord, les mesures qu'ils adoptent ne sont que purement symboliques (étant donné des désaccords entre modérés et radicaux au sujet de l'ampleur à donner à cette révision) : retour des chambres à Paris, la Marseillaise devient l'hymne national, le 14 juillet devient la fête nationale Mais ce qui est le plus remarquable est d'observer comment ils transforment des lois constitutionnelles orléanistes ne républicaines. En effet, une fois élu, Grévy renonce à un pouvoir exécutif fort (ce qui était un ‘'plan'' orléaniste), et par-là même confère beaucoup de pouvoir au Parlement : les plans orléanistes sont déjoués. Ainsi, de 1870 à 1876, le pouvoir en France connaît une période paradoxale pendant laquelle la République, proclamée de 4 septembre 1870, ne favorise pas l'accès au pouvoir des républicains. [...]
[...] Toutefois, dans le contexte de l'Ordre moral, les républicains ne sont plus en lutte directe contre les monarchistes. Au contraire, tirant parti des divisions du camp monarchiste qui s'avèrent impossibles à surmonter après l'échec de la deuxième tentative de restauration monarchique (novembre 1873), des rapprochements semblent s'esquisser entre républicains et orléanistes. De ces rapprochements, on tire deux conséquences. D'une part, en se rapprochant des orléanistes, les représentants républicains semblent envisager la possibilité d'une république modérée et renoncer à l'idée d'une république radicale. [...]
[...] Les républicains se définissent donc encore en opposition vis-à-vis du pouvoir en place. C'est ce qu'illustrent les mesures adoptées par l'Ordre moral (réglementation des horaires des débits de boissons, surveillance des fonctionnaires, politique cléricale telle l'interdiction des enterrements civils le jour Ces mesures sont prises dans un souci de moralité publique, pour contrarier les votes républicains (en 1874, les maires sont directement désignés par le président de la République). Or, ces mesures, autoritaires, qui appellent les souvenirs de l'Empire, favorisent la propagande républicaine plus qu'elles ne la contrarient. [...]
[...] Ainsi, dès 1871, les républicains se définissent en opposition par rapport au pouvoir en place (l'Assemblée à dominante monarchiste et conservatrice qui est en position de force). Cette opposition entre les républicains et le pouvoir en place est une des composantes de l'épisode de la Commune qui secoue la capitale du 18 mars 1871 au 28 mai 1871. Cet épisode révèle deux conceptions du pouvoir selon les républicains. D'une part, la Commune apparaît comme un pouvoir en réaction au pouvoir déjà en place, pouvoir ‘'réactionnaire'' qui prend des mesures sociales : les républicains (radicaux) se positionnent face aux monarchistes versaillais. [...]
[...] Or, contrairement à 1871, ils sont en position de force, comme le révèle la crise du 16 mai 1877. Après le renvoi de Jules Simon, Mac-Mahon rappelle le duc de Broglie, mais par le manifeste des 363, l'Assemblée refuse de se soumettre à Broglie (qui ne démissionne pas). L'Assemblée est dissoute, mais les élections législatives d'octobre 1877 donnent encore la majorité aux républicains. Mac-Mahon se soumet donc. On voit alors que les républicains sont en position de force ; et ce d'autant plus que, parallèlement, ils mènent une campagne dans les milieux ruraux afin que des maires républicains soient élus, ce qui leur permet de faire basculer la majorité du Sénat lors des élections sénatoriales du 5 janvier 1879 (les sénateurs étant notamment élus par les maires). [...]
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