La reine Victoria n'est pas seulement le symbole de la puissance britannique : c'est également une personnalité hors du commun qui l'a fait entrer dans l'Histoire. Elle jouissait d'une notoriété de femme calme, sérieuse, disposée mais aussi d'une réputation d'une femme autoritaire, souveraine et ferme. Aussi, si pour certains la Reine Victoria est synonyme de grandeur, de prestige, de prospérité, d'énergie ; pour d'autres Victoria est synonyme de pruderie, d'hypocrisie ou encore de conformisme. Ainsi doit-on reconnaître avec Asa Briggs que l'usage du mot « victorien » est souvent bien vague et recouvre des réalités fort hétérogènes réunies simplement par le hasard trompeur du vocabulaire. Si les années de 1850 à 1875 ont été marquées par un consensus autour des valeurs clefs de la civilisation ou de la pensée de la Reine Victoria (où la société bourgeoise au zénith brille de tout son éclat), il faut cependant noter qu'à partir des années 1880, des vents se soulèvent et tournent parfois à l'orage : la prépondérance britannique dans le monde est menacée, on remet en cause des certitudes prônées par la reine Victoria pourtant les mieux établies (surtout dans le domaine social et de la religion). Ainsi, le règne de Victoria sera traversé par des inquiétudes secouées d'aspirations diverses qui instaurent une atmosphère de crise. Aussi, nous pouvons nous demander si les valeurs prônées et les actions menées par la Reine Victoria sont sans faille: la grandeur sans conteste de la Reine Victoria et l'idolâtrie qu'éprouvent certains historiens pour ce personnage hors norme ne doivent-elles pas être l'objet d'une remise en question face à l'héritage du victorianisme ?
[...] Donc, les gouvernements de la Reine Victoria, tiraillés entre assurer la paix et conserver les intérêts économiques, vont être tentés de manier alternativement la carotte et le bâton. Cela commence tout d'abord avec Gladstone en 1869-1870 qui établit des réformes agraires en faveur des tenanciers mais cette politique intervient trop tard puisque la majorité des députés irlandais se sont ralliés à la cause du Home Rule. Il finit même par s'attirer les hostilités des Irlandais en faisant voter en 1881 et 1882 deux lois de coercition pour calmer l'agitation agraire et lutter contre les attentats politiques (assassinat du secrétaire d'Etat pour l'Irlande en 1882). [...]
[...] La Reine Victoria a véritablement marqué son temps (et celui des femmes). Livres, théières, pièces à son effigie font le bonheur des commerçants. Les soixante années de règne de Victoria donnent lieu à un défilé qui traverse tout Londres, et Béatrix de l'Aulnoit, Philippe Alexandre en font une description très élogieuse : deux millions de visiteurs viennent acclamer cette reine républicaine Mark Twain décrit : On comprend alors que Victoria est la procession à elle toute seule Son inscription dans la modernisation de la Grande Bretagne fait de la Reine Victoria le symbole de cette puissance : c'est l'incarnation populaire de la dynamique de son pays La Grande Bretagne est le pays où le Soleil ne se couche jamais L'image d'une Reine d'un nouveau genre qu'elle laisse au trône est renforcée par une période économique florissante. [...]
[...] Au sein de l'Empire, c'est l'Inde qui possédait la place privilégiée : trois cent millions de sujets, un vaste territoire, une multitude de langues et de peuples. Depuis 1876, La Reine Victoria porte le titre d' Impératrice des Indes à la suite d'un geste théâtral de Disraeli qui a voulu ajouter au prestige de la souveraine en lui faisant prendre la succession de l'Empire des Mogols. Constamment, les Victoriens n'ont cessé de renforcer le glacis de l'Empire indien : vers l'Afghanistan, la Birmanie, la Perse Dans sa conception moderne, la Reine Victoria a également compris la nécessité de réformer le système colonial qui est abandonné au profit du gouvernement responsable : les colonies canadiennes sont les premières à bénéficier du statut de dominion (Etat politiquement indépendant mais qui continue à faire partie de l'Empire) en 1867. [...]
[...] Les conditions de travail effrayantes des ouvriers (journées de dix heures de travail ramenées finalement à huit heures en 1891, mauvaises conditions d'hygiène, rémunération à la productivité qui a tendance à annuler les effets des politiques de restriction du temps de travail) sont relayées par la littérature anglaise. De plus en plus, la société hiérarchisée imaginée par la reine Victoria est contestée : c'est une crise profonde dans l'idéologie victorienne. L'exemple des contestations littéraires nous le montre bien. Outrés par le puritanisme ambiant et par la perversion de l'industrialisation, romanciers et poètes dénoncent les revers de la glorieuse société victorienne. [...]
[...] La reine Victoria, peut être à cause de son caractère très pieux, n'a pas su conférer un renouveau industriel à son pays En tous les cas, l'ère victorienne commence vraiment à décliner dans les dernières années du 19ème siècle. Le sentiment d'un monde qui se clôt avec la mort de Victoria peut faire l'objet d'un certain nombre de réflexions : on peut se demander s'il n'est pas un produit de l'imagination des historiens. Il ne faut pas oublier que la Reine Victoria était contre les avancées démocratiques et qu'elle conservait en tête un régime aristocratique. [...]
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