Le texte que nous allons étudier est extrait des minutes de la Secrétairie d'Etat. C'est une proclamation de Napoléon aux Espagnols qui a été prononcée le 25 mai 1808 à Bayonne.
Napoléon Bonaparte naît le 15 août 1769 à Ajaccio. De petite noblesse corse sans fortune, il fut boursier dans des écoles militaires (à Brienne et à Paris), en sortit lieutenant en second d'artillerie et se distingua au siège de Toulon qu'il contribua à reprendre aux royalistes, en décembre 1793. Il fut promu Général et fit figure d'officier ardemment républicain et même jacobin. Barras fit appel à lui pour écraser l'insurrection royaliste à Paris (13 Vendémiaire An IV). En récompense il fut nommé à la tête de l'armée d'Italie. Ses victoires de 1796 et 1797 firent de lui un des généraux les plus prestigieux, qui songeait au pouvoir. En rentrant d'Egypte, il renversa les 18 et 19 Brumaire le Directoire et s'imposa rapidement comme le seul maître. Le consulat puis l'Empire virent des tentatives d'hégémonie française sur tout le continent européen, servie par une armée forgée par les guerres de la Révolution. La campagne d'Espagne s'inscrit dans ce processus.
De 1805 à 1810, c'est l'empereur au sens complet du mot que nous écoutons parler, c'est le dictateur heureux dans l'éclat de sa jeune maturité, à l'apogée de sa forme et dans la plénitude de ses moyens, le Seigneur de la Grande Nation, le bâtisseur du grand empire.
Revenons sur les débuts de la campagne d'Espagne et sur les évènements qui ont précédé cette proclamation.
Sous prétexte de préserver le Portugal d'une action militaire de la Grande Bretagne, les troupes françaises s'infiltrèrent sans difficulté dans la Péninsule. Napoléon était même sollicité par la cour pour intervenir dans les affaires espagnoles. L'infant Ferdinand, Prince des Asturies, sous l'influence de son précepteur le chanoine Escoigniz, méditait le renversement de Godoy, favori de la reine et premier ministre du roi. Encouragé par l'ambassadeur de France, il proposa à Napoléon dans une lettre du 11 octobre 1807, d'épouser une princesse de la famille de l'Empereur en échange de son appui contre le favori. Découvrant le complot dit de l'Escurial, Godoy décida Charles IV à faire arrêter son fils.
Le 20 février, Murat reçoit le commandement en chef avec le titre de lieutenant général de l'empereur et part avec d'assez vagues instructions. Murat est le beau-frère de l'empereur et cette désignation prouve l'importance que Napoléon porte maintenant à la question d'Espagne.
La révolte d'Aranjuez fournit à l'empereur l'occasion d'intervenir le 17 mars 1808, une émeute née de la combinaison d'une intrigue aristocrate et du mécontentement du peuple choqué par l'immoralisme de Godoy provoque la chute du favori et l'abdication de Charles IV. Napoléon convoqua la famille royale à Bayonne pour arbitrer le conflit entre le père et le fils. Nulle résistance ne se manifesta chez les princes mais l'opinion publique fut choquée de voir un souverain étranger régler les affaires nationales. Le 2 mai 1808 quand on voulut mettre en voiture le plus jeune fils de Charles IV éclata une violente émeute durement réprimée par Murat : le dos de Mayo, cf. le tableau de Goya. La nouvelle parvint à Bayonne. Au terme d'une scène violente, Ferdinand rendit la couronne à son père qui abdiqua à son tour en faveur de son ami « le grand Napoléon ». Ce dernier ne souhaitait pas la couronne pour lui même : il l'offre à son frère Louis qui la refuse. Joseph dut l'accepter à contre-cœur le 6 juin.
Napoléon adresse alors une éloquente proclamation aux espagnols dans laquelle il souligne les maux de l'Espagne et se présente comme le sauveur de cette nation décadente. Dans un style grandiloquent, il tente de convaincre les Espagnols de la légitimité de la présence française dans la péninsule, de celle des Bonaparte sur le trône, et de sa réelle volonté de réformer le plus justement possible le pays. Ce morceau d'éloquence habile est bien du style de l'empereur, malheureusement il ne convaincra pas la plus grande partie des Espagnols.
Il faut préciser que Napoléon est le premier des modernes en ce sens qu'il n'est pas homme de la chose écrite. Il rompt avec l'âge de papier. Son moyen d'expression favori est la parole, qui est la forme innée de l'action. Il est conscient de l'originalité de son tour de pensée et d'expression, et fier de son don de persuader, d'intimider ou de séduire. C'est pour lui un moyen de clarifier ses idées, de les mettre en ordre et d'en faire jaillir de nouvelles, d'en vérifier aussi l'efficacité sur ces auditeurs.
Quels sont les tenants et les aboutissants de l'expédition d'Espagne en 1808? En quoi cette campagne s'insère-t-elle dans le système européen imaginé par Napoléon?
Dans une première partie, nous étudierons les raisons pour lesquelles Napoléon a entrepris cette campagne d'Espagne. Puis dans une seconde partie, nous verrons que Napoléon se présente comme un homme providentiel et comme le libérateur et le sauveur des maux de l'Espagne.
[...] Il faut préciser que Napoléon est le premier des modernes en ce sens qu'il n'est pas homme de la chose écrite. Il rompt avec l'âge de papier. Son moyen d'expression favori est la parole, qui est la forme innée de l'action. Il est conscient de l'originalité de son tour de pensée et d'expression, et fier de son don de persuader, d'intimider ou de séduire. C'est pour lui un moyen de clarifier ses idées, de les mettre en ordre et d'en faire jaillir de nouvelles, d'en vérifier aussi l'efficacité sur ces auditeurs. [...]
[...] Mais il serait excessif de penser que toute la famille royale serait entrée dans une sombre décadence. Tout bien pesé, Charles IV est comparable par la médiocrité de ses talents aux souverains précédents. La deuxième erreur de l'empereur est de croire en l'image d'une Espagne en perdition qu'imposaient les récits des voyageurs et les rapports de diplomates. Ceux-ci lui avaient laissé croire qu'il pourrait se poser en sauveur venant régénérer la péninsule. Si l'Espagne souffrait du blocus, la crise ne touchait que la Catalogne, commerçante et industrielle, Valence et Cadix. [...]
[...] Ainsi, il affirme : je placerai votre glorieuse couronne sur la tête d'un autre moi-même Comme nous l'avons vu précédemment, Napoléon cherche à créer sa propre dynastie en installant sur les trônes des pays qu'il contrôle des membres de sa famille. Cela fait partie intégrante de son mode de gouvernement. Après avoir demandé à Louis, il rappelle Joseph alors roi de Naples. L'enjeu géopolitique de la conquête de l'Espagne Après Tilsitt, Napoléon écrivait à Décrès : Tout porte à croire que la guerre du continent est terminée. Tous les efforts doivent se porter sur la marine. [...]
[...] Pourquoi Napoléon a-t-il voulu intervenir en Espagne? (Les raisons apparentes) Récapitulatif des relations franco-espagnoles depuis 1795 Signataire de la paix de Bâle en 1795 qui mis fin à la participation de l'Espagne à la première coalition, Godoy, auquel avait été attribué le titre de prince de la paix orienta son pays dans le sens d'un rapprochement avec la République, rapprochement qui coûta à l'Espagne la Trinité et la Louisiane. Par le traité de Sainte-Ildefonse, l'Espagne devenait l'alliée de la France en 1796. [...]
[...] Napoléon est donc victime de l'illusion collective sur la question espagnole. Napoléon, le sauveur en quête de légitimité L'empereur, homme providentiel En 1808, Le moniteur universel publie un appel au secours de l'Espagne : les finances sont un chaos, la dette publique est un gouffre. Seul l'empereur peut substituer l'ordre au désordre, la loi au caprice, la justice à l'oppression. La providence protectrice a employé la main irrésistible pour arracher l'Espagne à l'abîme. L'empereur se campe ainsi en sauveur de l'Espagne. [...]
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