Dans les années soixante-dix, l'horizon de l'historien se referme sur un présent immobile. L'historien annaliste devient le spécialiste d'un temps immobile dans un présent figé, pétri d'effroi devant un devenir incertain. James Harvey Robinson et Harry Elmer Barnes proclamaient que l'historien doit s'intéresser à son temps, « au common man ».
Traditionnellement, l'Histoire est assimilée au passé : l'historien doit analyser des événements du passé qu'il n'a pas vécus. Marc Bloch évoque cette idée : « le passé forme la matière de mon enseignement ». Cependant, l'Histoire traditionnelle ébauche une Histoire plus contemporaine, plus immédiate qui remet en cause la définition bien établie de l'histoire comme science du passé.
[...] Le témoin du présent est-il une source plus fiable ? Le critère de la mémoire vive (celle des témoins vivants) est le critère le plus souvent retenu pour singulariser l'histoire du temps présent, du temps chaud Pourtant on aperçoit qu'il existe d'ores et déjà dix fois plus de témoignages contradictoires sur le putsch d'août 1991 contre Gorbatchev que sur celui de décembre 1851. Malgré cela, il est vrai que l'historien peut juger plus facilement ce qui est vrai ou non puisqu'il a vécu l'événement même si, porté par son émotion, il peut également être manipulé. [...]
[...] Peut-on croire qu'il s'agit d'un atout dont dispose l'historien? Il est vrai que c'est le devoir de l'historien de ne pas laisser l'interprétation du monde qui continue à avancer aux médias ou aux journalistes, idée que développe François Bédarida dans l'Histoire du temps présent. L'historien qui souhaite faire de l'histoire à chaud à de fortes chances de choisir un événement avorté par les médias. En effet, l'événement choisi pourrait être une demande sociale. Michael Pollak fait remarquer que l'histoire du temps présent fait l'objet d'une demande sociale importante. [...]
[...] De plus, L'historien qui fait l'Histoire à chaud traite de sujets dont les enjeux pèsent de tout leur poids sur son travail. L'Histoire à chaud» est donc dépendante des institutions ou des acteurs sociaux collectifs. Ne connaissant pas l'évolution du sujet il s'expose parfois donc, lors de son écrit, aux dangers de la prévision. Racine, historiographe du roi Louis XIV, n'hésitait pas à prédire un règne d'or, pourtant nous connaissons tous la fin du règne de Louis XIV. On peut penser, également, à une autre solution pour l'historien qui ne connaît pas la suite de son sujet : il peut s'enraciner dans le passé. [...]
[...] En effet, on pourrait ne plus critiquer l'historien de faire de l'histoire un processus mécanique. Paul Ricoeur parle de défatalisation du passé : ignorer la fin des processus peut utilement servir à se défaire de l'illusion de la nécessité rétrospective. Ainsi, l'ignorance du lendemain peut être vue comme un avantage. L'historien qui écrit l'Histoire à chaud doit pas faire de jugements trop hâtifs car il ne sait pas comment va se terminer la suite de l'événement. Mais le manque de recul ne lui permet pas d'écrire un récit objectif. [...]
[...] De ce fait, l'historien peut ne pas être objectif. En effet, l'ambition de l'historien est de construire l'intelligibilité des événements, de faire un récit, de raconter ce qui est arrivé une fois, hic et nunc. Ce n'est pas faire une simple description, mais il doit faire un récit intelligible des événements. Le problème c'est que cet historien traite de sujets, de situations dont les acteurs sont encore vivants, il arrive que cette objectivité soit insupportable pour les acteurs. Les écrits occidentaux sur le communisme, des historiens des années ont été très indulgents .En effet, écrire en ces temps que Staline était un tyran, c'était critiquer le marxisme et donc le PCF, un grand parti français. [...]
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