Le krach boursier de 1929, qui prend sa source aux Etats-Unis, bouleverse toute l'Amérique. À partir de mars 1933, l'Amérique relève le défi jeté par la crise à sa prétention à servir de modèle au reste de l'humanité. Ennemi de toute théorie et résolument pragmatique, Franklin D. Roosevelt multiplie, souvent dans le désordre, parfois dans la contradiction, mais toujours avec la même conviction rassurante, improvisations, expédients et expériences. S'entourant de conseillers aux idées souvent très divergentes, il entretient chez eux une émulation créatrice et dispose toujours, en cas d'échec, d'une équipe prête pour une nouvelle politique. Au fatalisme désabusé des anciens leaders des « Twenties », il oppose sa devise : « l'essentiel est d'essayer ».
A la convention de Chicago qui l'a désigné, il a lancé l'expression de New Deal, nouvelle donne, pour caractériser sa politique en vue de remédier aux effets dévastateurs de la crise de 1929. Mais l'enveloppe est vide, car s'il a une certitude, l'urgence de faire quelque chose pour sortir de la crise, il n'a pas d'idées précises sur les moyens. Élu, Roosevelt n'avait pas de programme, il agissait par impulsion en fonction de la situation et des conseils de son entourage, par des mesures rarement cohérentes. Le New Deal est une suite d'expériences menées avec la seule préoccupation de rétablir l'équilibre.
Considérant la situation des Etats-Unis au niveau économique, social et politique, peut-on objectivement penser que le New Deal fut une réussite intégrale ?
Si le résultat au niveau économique s'avère décevant, ramenant le niveau parfois en deçà de celui de l'économie américaine en 1929 (I), les progrès sociaux ne sont en revanche pas négligeables (II). Enfin, au niveau politique, Roosevelt a su établir un nouveau système concentré non plus sur les Etats mais sur l'Etat, celui du welfare state, l'Etat providence, qui servit de modèle partout en Europe (III).
[...] Sur la question du capitalisme américain, celui-ci est désormais beaucoup plus réglementé et transparent (en particulier en ce qui concerne les banques et la Bourse). Roosevelt est aussi parvenu à orienter les Etats- Unis vers le reste du monde : 1934 marque le début d'une politique réciproque et concertée de baisse des droits de douane. En dépit des pouvoirs de contrôle et de moralisation assumés par des organismes publics et par la Banque fédérale, l'œuvre monétaire et bancaire a surtout été accomplie au bénéfice d'établissements privés. Le système capitaliste sort donc renforcé de la crise. [...]
[...] Il faut juger le New Deal de manière globale. La législation adoptée n'a pas mis un terme à la Dépression mais elle a réussi à redonner confiance aux Américains et on peut parler d'un succès relatif des mesures économiques. En gros, l'économie retrouve son niveau de 1929. La crise, en fin de compte, a favorisé le développement des oligopoles et la concentration économique. Les plus faibles ont été éliminés et les structures capitalistes de l'économie américaine ont retrouvé la force nécessaire pour de nouveaux bonds en avant. [...]
[...] L'économie montre encore très peu d'améliorations vers la fin de la décennie, et demeure médiocre jusqu'à son remodelage en profondeur avec l'entrée dans la Seconde guerre mondiale. Est-ce le New Deal qui a conduit à cette politique ? On sera tenté de conclure que c'est plutôt le réarmement qui donne un réel coup de fouet à l'économie en attendant que la reprise ne se confirme à partir de Pearl Harbor en 1941. Il y a encore plus de 7 millions de chômeurs en 1940 et la situation ne s'améliore vraiment qu'à partir de 1941. [...]
[...] L'ordre politique est donc affecté : l'équilibre entre l'Etat et les Etats est désormais rompu au bénéfice du gouvernement fédéral. La réglementation économique, la législation sociale deviennent de sa compétence ; l'évolution tend à faire des Etats des agents d'exécution de la politique décidée à Washington. C'est le renversement de la conception qui avait inspiré les Constituants de 1787, et le dernier stade d'une évolution en cours depuis longtemps. L'administration gonfle ses services et ses effectifs, Washington prend tournure d'une grande capitale administrative. [...]
[...] Le bilan politique est très positif pour Roosevelt, réélu en et 1944. A l'opposé de certains pays européens, les États-Unis n'ont pas basculé dans les solutions extrémistes. Les bénéficiaires du New Deal ont été les farmers à condition d'être propriétaires, les ouvriers qui ont reçu des droits nouveaux et les intellectuels dont l'influence a été grande auprès du pouvoir. Les victimes qui sombrent dans la pauvreté sont les ouvriers sous-qualifiés, les tenanciers agricoles, les sudistes mais aussi les Indiens et les Noirs. [...]
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