Le XIXème et le XXème siècle sont en Europe des siècles de grandes révolutions. L'industrialisation croissante et la naissance d'un sentiment de nationalisme élitiste allaient conduire les grandes puissances européennes à modifier leur politique colonialiste. Un rapport datant de 1910, rédigé par Jules Harmand, ambassadeur honoraire, expose sur un ton philosophique les raisons de la domination et de la colonisation. Ce dernier parle d'obligation et « de nécessité de l'expansion de la France afin d'asseoir sa suprématie sur des peuples arriérés et primitifs. » Les colonies devraient désormais être contrôlées et dominées, politiquement et économiquement, afin d'être un complément indispensable de la puissance métropolitaine.
Le Sénégal, colonie française ne fera pas forme d'exception à cette politique coloniale. La mise en pace d'une administration coloniale dans les anciens comptoirs commerciaux, puis vers la fin du XIXème siècle la conquête des terres à l'intérieur du pays entraînant la destruction de tout ordre social et politique qui préexistait, allaient jeter les bases d'un Sénégal nouveau, dominé sous de multiples formes par l'impérialisme français.
La population du Sénégal, rurale a plus de 80%, va donc être en première ligne face à la machine infernale colonisatrice. Il s'agit pour la puissance française de faire du Sénégal une terre rentable, source de profit, par une exploitation du territoire et des populations. L'objectif immédiat des colonisateurs est « la mise en valeur », c'est à dire le développement des productions exportables, soit par des cultures industrielles soit par l'introduction de nouvelles cultures dans le système agricole traditionnel. L'arachide serait élue comme le fruit de cette mise en valeur agricole.
Le but de notre étude est d'analyser la mise en place de cette politique agricole et ses répercussions sur les populations locales. Nous tenterons de monter que l'introduction de la mise en valeur s'est accompagnée naturellement de l'introduction d'un nouveau système économique calqué sur le modèle capitaliste, et montrerons quelles en ont été les conséquences directes et indirectes sur les peuplades sénégalaises. Autrement dit, nous nous efforcerons de répondre à la question : en quoi la culture de l'arachide sous le joug de la colonisation a-t-elle été un facteur des mutations sociales, politiques et géographiques des différentes sociétés africaines dans le bassin arachidier ?
Dans un premier temps, nous examinerons la naissance de l'espace dit « bassin de l'arachide » et ce qu'il était avant la conquête coloniale, afin de replacer dans son contexte la politique de développement dont cet espace sera l'objet. Dans un second temps nous analyserons la mise en place de la culture de l'arachide dans cette région et montrerons comment l'administration coloniale s'accommode des divers pouvoirs indigénats et religieux. Enfin, nous analyserons dans une dernière partie les réelles conséquences de cette domination coloniale agricole sur les structures politiques et sociales des populations sénégalaises.
[...] Un marabout peut avoir sous ses ordres jusqu'à deux cents Taalibe dont la piété, l'obéissance, la discipline et le travail sont constitutifs de l'ordre social. La communauté maraboutique est organisée en Daara qui sont des villages de culture pouvant s'étendre sur plusieurs centaines d'hectares. Ces Daara sont contrôlés par un marabout entouré d'une communauté de jeunes disciples et des ses taalibe. Ces Daara sont l'expression même du développement d'une agriculture sédentaire et commerciale. De ces villages mourides, les différents chercheurs remarquent toujours la propreté des cases et leur aménagement relativement confortable. [...]
[...] COPANS Jean, Les marabouts de l'arachide. La confrérie mouride et les paysans du Sénégal, le Sycomore Paris Malgré la préexistence de ces deux phénomènes, il convient de dire que leur amplification, durant les années trente constitue une donne nouvelle, notamment par les chiffres. Lakroum Monique, Le travail inégal, paysans et salariés sénégalais face à la crise des années trente, Paris, L'Harmattan p Il accède au pouvoir aussi pour des questions sociales inhérentes à la société métropolitaine, amis aussi politiques dans la lutte antifasciste. [...]
[...] Mais la France ne contrôle que les débouchés, par le biais de ces ports, et ne peut simplement qu'influencer les royaumes côtiers, dans la mise en culture de l'arachide et leur faire miroiter les bénéfices qu'ils pourraient en tirer, sans réel pouvoir de décision, du moins jusqu'à l'arrivée de Faidherbe en 1854. Ce général nommé par l'Empereur Napoléon III au poste de Gouverneur du Sénégal, inaugure bien du tournant militaire que prend l'affaire coloniale au Sénégal et elle traduit l'ambition politique qu'à la France de se reconstituer un Empire, capable de rivaliser avec les autres puissances européennes y compris pendant la troisième République où l'ambition affichée est là de détourner la population de la perte de l'Alsace Moselle, par la conquête de l'Outre-Mer[15]. [...]
[...] Il faut noter que les autorités coloniales ne perdent jamais de vue l'objectif de la rentabilité. les binages, la récolte, et le battage des arachides Pélissier, op.cit. Les deux derniers binages avant la récolte, mais aussi l'entretien des machines, qui nécessitent tout un tas d'ouvriers. Pélissier Paul, op. cit. Pélissier Paul, op. [...]
[...] Si la création de la ligne de chemin de fer Dakar St Louis ne joua qu'un rôle d'évacuation dans l'acheminement des arachides, la ligne joignant Thiès à Kayes qui fut construite en 1923 [24]favorisa l'extension du bassin de l'arachide qui s'était jusque-là cantonnée dans la région littorale ; car dans le continent massif africain, toute activité est subordonnée aux possibilités d'évacuation. Un autre facteur allait favoriser le développement de la culture arachidière dans cette région, le peuplement du bassin de l'arachide est constitué de nombreuses ethnies différentes originaires des quatre coins du pays, mais en particulier de la vallée du Sénégal. Les migrations de ces peuplades vers la région riche du bassin de l'arachide furent facilitées avec la sécurité amenée par la pacification française. [...]
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