Le sujet nous invite à décrire la mode féminine sous le communisme dans l'Europe de l'Est de l'après seconde guerre mondiale et jusqu'à l'effondrement du régime à la fin des années 1980.
La mode est un élément important de toute société car elle fait partie intégrante de la vie quotidienne : se vêtir est un besoin vital au même titre que se nourrir et se loger, mais c'est aussi un moyen d'expression personnelle créant un espace de liberté, et influencé par un comportement collectif. La féminité est aussi source de liberté en permettant à la femme de s'affirmer dans la société ; l'étudier revient ainsi à analyser la place qu'elle y tient. Ce sujet permet donc de comprendre ce que peut signifier la mode féminine dans un régime contrôlant toute liberté et asservissant tous les éléments de la vie quotidienne à l'idéologie, laquelle vise à construire une nouvelle société socialiste.
Dès lors, la mode féminine sous le communisme est-elle un instrument idéologique au service du régime ou un facteur d'émancipation de sa tutelle ?
[...] Or la mode reflète à travers les photos de travailleuses un réel mélange des genres, une masculinisation de la femme. Leurs vêtements donnent l'impression d'aller aussi bien aux hommes qu'aux femmes. En effet ces vêtements de travail, fonctionnels,ne diffèrent de ceux des hommes que par certains détails comme un fichu pour retenir leurs cheveux ou une jupe si le travail le permet, sans pour autant atteindre la sophistication présentée par les publicités de vêtements de travail.Cette masculinisation résulte du besoin de main-d'œuvre toujours plus important que nécessite le régime, entrainant les femmes à effectuer des métiers à l'origine masculins, ce qui transparait dans leur façon de s'habiller.Ce n'est donc pas le triomphe de l'égalité mais son échec avec la masculinisation des femmes ; et cette imposition d'une sobriété et d'une standardisation tirées vers le bas sont plutôt ressenties comme un déni de féminité quiprovoque une certaine frustration et une humiliation, comme le décrit le roman de SlavenkaDrakulic, Les restes du communisme sont dans la casserole.Il évoque le fait que les femmes ne peuvent pas prendre soin d'elles, de leur apparence comme de leur hygiène, et ainsi les femmes n'ont pas de déodorants, de dentifrices, de savons ni même de serviettes hygiéniques. [...]
[...] La mode se fait sans aucune considération esthétique, avec pour seul but de faciliter la vie et le travail. Ainsi les photos d'époque montrent bien la réalité de la mode pour les femmes du peuple : les ouvrières sont mal habillées, leurs habits de travail sombres et mal coupés ne permettent aucune élégance contrairement aux silhouettes présentées dans les magazines et publicités pour vêtements de travail. Il n'y a aucune sophistication et les accessoires sont rares dans la réalité, contrairement aux pages de mode où abondent sacs à main, bijoux, gants, chapeaux et talons. [...]
[...] Le régime n'est plus capable de contrôler la mode, parce qu'il perd sa légitimité; le choix des vêtements est laissé aux femmes. Le seul facteur décisif est l'aisance financière, mais comme ces années-là sont caractérisées par une crise économique importante, il est toujours difficile pour la majorité des femmes de suivre les idéaux lancés par les magazines. Conclusion : La mode féminine permet de souligner les contradictions du régime, qui veut inventer une mode élégante socialiste, laquelle est inaccessible en réalité, en même temps qu'il fustige cette élégance qui est l'apanage de la bourgeoisie. [...]
[...] La mode cherchedonc à promouvoir le travail et à travers lui la primauté de la communauté sur l'individu. La mode comme espace de compétition entre l'Est et l'Ouest Puisque la mode revêtait une dimension idéologique, la compétition entre le capitalisme et le communisme s'est aussi emparée de ce domaine. Les communistes ont donc tôt ressenti la nécessité de permettre aussi le développement d'une mode séduisante et élégante, et non pas seulement ouvrière, pour prouver que l'Est était capable aussi de créer une mode attirante en dehors du modèle capitaliste. [...]
[...] Dès lors, la mode féminine sous le communisme est-elle un instrument idéologique au service du régime ou un facteur d'émancipation de sa tutelle ? Il s'agit tout d'abord de voir comment la mode participe à la création de la nouvelle femme dans le régime socialiste ; puis comment elle révèle la réalité des conditions de vie de la femme, en contradiction avec l'utopie socialiste. Enfin cette contradiction préfigure l'échec de l'idéologie communiste, et en cela l'évolution de la mode est symptomatique de l'évolution du régime. [...]
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