Mémoires, Seconde Guerre mondiale, France depuis 1945, Résistance, mémoire collective, mémoire officielle, mémoire de groupe, mémoire individuelle
La lecture des manuels scolaires de niveau primaire illustre l'évolution de la mémoire de la Seconde Guerre mondiale en France. On voit dans les manuels scolaires comme l'Histoire de la France et des Français, de E. Billebault, publié en 1964, que les écoliers des années 1960 pouvaient tirer de leur manuel une vision de la Seconde Guerre mondiale où les souffrances du peuple français dominent, mais où les actes de résistance sont aussi valorisés. Par contre d'autres aspects sont passés sous silence, comme la déportation et l'extermination des Juifs de France, la collaboration.
En revanche, dans les manuels des années 1990, comme Histoire, cycle 3, Nathan, de 1997, ces éléments font leur apparition, on évoque la déportation, la collaboration, au même titre que les souffrances des Français et la Résistance. On peut donc voir que la mémoire, c'est-à-dire la vision du passé, qui est véhiculée par ces deux documents est très différente, cela nous montre l'enjeu des mémoires de la Seconde Guerre mondiale.
[...] On peut donc en déduire que la mémoire des victimes juives s'exprime, mais qu'elle ne trouve pas d'écho dans une société française qui n'est pas prête à se confronter à ce souvenir douloureux. Autre exemple, le film Nuit et brouillard, d'Alain Resnais, qui sort en 1956 et qui présente la politique de déportation et d'extermination nazie. Ce film présente à un moment le camp de Pithiviers qui a servi de camp de transit pour les juifs raflés qui seraient envoyés mourir à Auschwitz. [...]
[...] Il cherche donc à véhiculer une mémoire équilibrée, apaisée de la guerre, dans laquelle la déportation, Vichy, et la Résistance trouvent toutes leur place. Autre président, autre discours : François Hollande, en 2012, qui dit Il n'y a pas de concurrence entre les mémoires. Il n'y a pas de hiérarchie entre elles Et cette décrispation sur la mémoire de la Seconde Guerre mondiale, ce tabou qui est levé, permet en effet de créer un climat mémoriel plus apaisé que dans les années 1970 et 1980 et permet à d'autres mémoires d'émerger, comme la mémoire des combats menés par les soldats originaires des colonies françaises, héros du film Indigènes en 2006. [...]
[...] Alors on peut se demander pourquoi justement la mémoire de la Seconde Guerre mondiale qui se met en place en 1945 fait une part aussi belle à la résistance et minore autant la collaboration. Pourquoi ? Il s'agit de reconstruire moralement un pays ébranlé par la défaite de 1940, détruit, ruiné, dont l'empire colonial commence à se désagréger et qui se sent déclassé dans la géopolitique mondiale. Le but de cette politique mémorielle est donc de ne se concentrer que sur les aspects de cette période qui reflètent la grandeur de la France et pas sur ceux qui illustrent sa faillite à tous les niveaux. [...]
[...] Mais elle peut aussi être transmise, c'est pourquoi les générations qui n'ont pas vécu la Seconde Guerre mondiale ont aussi une mémoire de ce conflit, une vision de cet événement. Mais le sujet de ce chapitre n'est pas la mémoire mais bien les mémoires C'est dire combien ce terme peut en fait correspondre à des visions différentes. On peut évoquer plusieurs types de mémoires qui peuvent être en contradiction ou non : la mémoire collective : une vision du passé commune à toute une nation. [...]
[...] L'historien américain Robert Paxton publie en 1973 La France de Vichy C'est un tournant historiographique. L'historiographie est l'interprétation du passé par les historiens. Il arrive souvent que les historiens soient en désaccord sur l'interprétation d'un événement, ou sur une dimension d'un événement. Et parfois, un historien contredit l'histoire établie, celle acceptée par les historiens, on parle alors de tournant historiographique. En effet Paxton affirme dans son livre que Vichy et une grande partie des Français n'ont pas fait qu'obéir, ils ont collaboré activement à la politique nazie d'extermination, et il va alors à l'encontre de l'interprétation historique en vigueur. [...]
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