L'année 1968 est une année mouvementée partout dans le monde, marquée aux Etats Unis par le moment fort de la protestation contre la guerre du Vietnam et la naissance du mouvement hippie à Berkeley, dans un contexte international où flotte l'ombre du communisme, notamment à travers le Printemps de Prague qui voit les troupes du pacte de Varsovie écraser en Tchécoslovaquie la tentation politique d'un communisme à visage humain.
Néanmoins, mai 68 occupe une place particulière dans l'imaginaire français, pour la raison même qui semble le rapprocher de l'agitation internationale, à savoir un fort essor des idées de gauche, une sorte d'opposition au modèle capitaliste et aux valeurs de droite. La raison de ce sentiment de spécificité nationale, c'est le caractère absolu du mouvement, à la fois général et long, puisqu'en pas moins d'un mois, il part d'une révolte étudiante pour devenir une crise sociale étendue au monde ouvrier qui entre en grève avant de devenir enfin une crise politique à cause du manque de réactivité du pouvoir en place. Les affrontements entre étudiants et force de l'ordre, rendus spectaculaires par l'utilisation de pavés comme de projectiles, font notamment pas moins de 367 blessés dans la nuit des barricades. Si bien qu'aujourd'hui, lors des grandes grèves de 1995 par exemple ou du mouvement étudiant contre le CPE en 2004, chaque mouvement social de grande envergure se voit comparé à mai 68, comme s'il s'agissait d'une référence absolue.
Aussi, à cause de l'importance majeure qu'on semble prêter à mai 68, s'interroger sur ses interprétations revient à définir la nature même du mouvement, de sorte à déterminer si le statut de révolution qu'on lui attribue plus ou moins symboliquement est légitime ou non.
Il s'agira alors de constater que si mai 68 apparaît bel et bien comme une véritable révolution culturelle et sociale à cause des changements qu'elle opère au sein de l'organisation de la société et sur le plan de mœurs, il convient aussi de souligner qu'il ne s'agit pas pour autant d'une révolution au sens traditionnel de prise de pouvoir débouchant sur un nouveau régime politique et un changement de structure économique, à cause de la non-victoire qui est celle de la gauche.
[...] Le statu quo de Mitterrand L'une des grandes critiques de mai 1968 était adressée à DG sur sa pratique du pouvoir un peu paternaliste et autoritaire. On pouvait donc s'attendre à ce que quand la gauche obtiendrait le pouvoir, même 13 ans après, elle innoverait en rompant avec le passé. Or il n'en est rien. Mitterrand ne change pas un mot de la Constitution. Il endosse le costume de président avec autant de rigueur que DG et même moins de décontraction que VGE qui avait cherché à rendre moins austère la fonction par différents moyens. [...]
[...] La grève continue donc, l'opposition demande la formation d'un gouvernement provisoire présidé par PMF, tandis que DG reste muet après l'échec d'un référendum qui n'a aucun rapport avec le mouvement (sur la participation) et finit même par disparaître. Pourtant il reprend la main avec un certain panache le 30 mai en annonçant la dissolution de l'Assemblée et en encourageant les Français à soutenir civiquement le régime. personnes manifestent sur les Champs Elysées pour le soutenir ce qui décourage les grévistes et les partis politiques d'opposition. [...]
[...] Je n'en avais jamais vu. Sans blague, même dans le métro ( . Je n'avais jamais vu une usine ( . Tout d'un coup, j'ai vécu et je n'ai travaillé qu'avec des ouvriers ( )On était accueillis sans problème par le piquet de grève de l'usine, on nous faisait entrer sans problème dans les ateliers Une modernisation considérable du modèle social des acquis sans précédent depuis les conquêtes du Front populaire en 1936 : les accords de Grenelle entérinent l'augmentation du SMIG et la hausse des salaires, baisse du temps de travail de même que la reconnaissance des sections syndicales d'entreprises. [...]
[...] I Une véritable révolution culturelle et sociale La modernisation d'une société corsetée et archaïque Mai 1968 opère un véritable décloisonnement de la société Les manifestations permettent aux ouvriers, qui travaillent habituellement dans les faubourgs de Paris, de se mélanger aux étudiants. Le peuple se rencontre, fraternise, au nom d'objectifs sociaux qui ne sont pas identiques puisque ne relevant pas du même domaine, mais qui visent tous le progrès social : les étudiants veulent une modernisation de l'université, et les ouvriers des conditions de travail plus décentes et une augmentation du salaire. Témoignage de Claire, enseignante, paru dans Mai1968 et ses vies ultérieures (Kristin Ross) : Je rencontrais des ouvriers pour la première fois. [...]
[...] La fin du PC et de la société ouvrière - Alors que son idéologie n'a jamais été aussi exploitée qu'en mai 1968, le PC connaît avec législatives de juin 1968 le début de son déclin. Détenteur à l'origine de 73 députés, il en perd 34, tandis que le P.S.U perd son seul député, Pierre Mendès France. Les fédérés, courant principal de gauche, perdent 64 sièges et n'en ont plus que 37. Jamais le PC ne retrouvera le nombre de sièges qu'il avait avant mai 1968. [...]
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