La Révolution industrielle qui débute au Royaume-Uni dès la fin du XVIIIe siècle et qui embrase l'Europe de l'Ouest tout au long du XIXe siècle n'est pas qu'une simple révolution technique. Elle entraîne des modifications fondamentales de la structure même des sociétés européennes. De nouveaux moyens de production, plus efficaces, concentrés en un même lieu : l'usine, mettent fin à la production manuelle à domicile.
Des vagues de migrants ruraux viennent tenter leur chance en ville pour trouver du travail. Rapidement, la concentration croissante de ces nouveaux travailleurs, de cette classe ouvrière en gestation, pose des problèmes de logements et d'infrastructures.
A titre d'exemple, la ville de Bruxelles voit sa population tripler tandis que la révolution industrielle touche pleinement la Belgique durant la seconde moitié du XIXe siècle. Cette augmentation brutale de la taille des villes due à l'arrivée de ces nouveaux migrants apparaît comme une menace au milieu urbain habituel.
La question de savoir comment vivent les ouvriers devient alors un objet de réflexion légitime avec la montée du mouvement hygiéniste au début du siècle. Les instances de pouvoir, à savoir le patronat et les gouvernements ne délaissent pas trop longtemps le domaine du logement ouvrier. Cependant, ces interventions étatiques ou patronales sont mues par des tenants idéologiques, des objectifs très divers.
[...] Le logement ouvrier, lorsqu'il passe aux mains des États n'est plus par essence un logement de classe. Ainsi, la loi Loucheur de 1928 vise au logement des personnes peu fortunées, principalement les ouvriers, mais également au travers d'une catégorie de logements intermédiaires, les Logements à Loyers Moyens, les classes moyennes. Les politiques publiques, contrairement aux intérêts patronaux, ne sont pas destinées à loger des ouvriers que l'on emploie mais à faciliter l'accession à un logement décent aux personnes peu fortunées. Le logement des ouvriers devient pour une part un logement social. [...]
[...] En effet, si des efforts certains d'amélioration du cadre de vie des logements ouvriers ont été réalisés au cours du 20ème siècle, la qualité globale du parc immobilier laisse à désirer. A titre illustratif, sur 14,5 millions de logements en France à la libération, la moitié n'ont pas accès à l'eau courante, les 3/4 n'ont pas de W.-C. et 90% n'ont pas de salles de bains. Dans les années 50, les abords de la ville de Paris sont le cadre de nombreux bidonvilles, solutions de fortune illégales mais tolérées au problème crucial de logement pour les plus pauvres. [...]
[...] Par exemple, la caisse des dépôts française gèle ces crédits immobiliers pour conserver ses fonds. Mais la 10 crise économique confirme également les incertitudes quant à la capacité patronale de gérer le problème du logement social. Le patronat jusque là attaché à ces méthodes de logement ouvrier hérité du 19ème siècle est bouleversé par l'ampleur de la crise et prend conscience des leviers d'action très intéressants des pouvoirs publics. Voilà peut-être pourquoi il accepte après la seconde guerre mondiale la nouvelle donne : l'intensification de l'intervention étatique et la nouvelle appréhension architecturale et de financement du logement ouvrier A la fin de la seconde guerre mondiale, les destructions causées par le conflit sont un nouveau défi posé au patronat et aux Etats en matière de logement ouvrier. [...]
[...] Le logement ouvrier participe au paternalisme industriel du 19ème siècle. De plus, le tableau idyllique de ces initiatives patronales nous laisserait presque croire que la situation du logement ouvrier à la fin du 19ème s'est considérablement amélioré au point d'apporter des logements confortables et décents couplés à des services et des équipements de qualité à la classe ouvrière. Or, les taudis n'ont pas disparu. A Paris, plus de personnes croupissent dans des logements classés insalubres par les techniciens du casier sanitaire de la ville entre 1906 et 1919. [...]
[...] La situation du logement ouvrier est telle qu'elle entraîne une réaction de la part de personnalités de la société civile: médecins, intellectuels, hommes politiques. Le mouvement hygiéniste, médical et moraliste, se développe en Europe et prône une régulation du marché du travail et des conditions de vie des ouvriers pour lutter contre les fléaux de l'indigence. Il s'organise des congrès internationaux d'hygiène publique où des spécialistes divers débattent sur ces questions. La précarité du prolétariat sème en effet la crainte de conflits sociaux futurs dus à la concentration ouvrière propice à l'émergence d'un sentiment de classe, d'une dépravation morale des classes laborieuses ou encore de la propagation d'épidémies aux quartiers bourgeois. [...]
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