En 1776, un économiste écossais, Adam Smith, publie la Richesse des Nations. Cet ouvrage de la fin du XVIIIe siècle va être le premier à théoriser une nouvelle pensée économique s'orientant vers le libre-échange. Elle prône un système de commerce international reposant sur l'absence de barrières douanières et non douanières, à la libre circulation des biens et des services. Pour Adam Smith, l'Etat doit rester à l'écart du marché et ne doit assurer que ses fonctions régaliennes (police, armée, justice et monnaie).
Or, en ce siècle, le 'mercantilisme' prévaut dans toute l'Europe. C'est une doctrine économique encourageant les exportations afin d'augmenter le capital de métaux précieux au sein même d'une nation (celui-ci étant considéré comme un signe de richesse). De plus, le mercantilisme s'appuie énormément sur l'Etat, qui doit adopter toute une série de lois protectionnistes (barrières douanières, subventions aux entreprises pour l'exportation...). Tout cela dans le but de protéger les entreprises nationales.
Le libre-échange est donc un concept en opposition avec son époque lorsqu'il émerge à la fin du XVIIIe siècle alors que tout au long du XIXe siècle, la pensée économique est clairement orientée vers le libre-échange. Toutefois, si on compare le monde industriel de 1815 et de 1913, on s'aperçoit qu'il est très semblable, le protectionnisme étant globalement la règle... Comment expliquer un tel antagonisme entre la théorie et les faits?
Quelle a été l'influence de la nouvelle pensée économique sur un monde qui ne semble pas avoir changé entre 1815 et 1913?
[...] L'Autriche-Hongrie, sous cette crise boursière, veut protéger son économie et effectue donc un retour au protectionnisme dés 1873. Elle sera ensuite imitée par l'Espagne et la Russie. Tandis que dans les pays développés d'outre-mer le protectionnisme est adopté ou renforcé, entre 1860 et 1879 l'Europe connait enfin une période de libre-échange, en accord avec la pensée économique du XIXe siècle. Elle est menée par le Royaume-Uni et la France qui signent des accords dés 1860. Mais cette phase de libéralisation des échanges va être entachée par la Grande Dépression, une crise économique très rude sévissant en Europe, puis s'étendant à l'étranger . [...]
[...] Associée au prolétariat (elle promet que le libre-échange provoquera une chute des prix agricoles) elle se lance dans un affrontement politique qui dure plusieurs années. Robert Torrens va montrer que, par sa puissance, le Royaume-Uni est susceptible d'améliorer ses termes de l'échange grâce à une faible taxe douanière. En 1845, une terrible famine, liée à une maladie de la pomme de terre en Irlande, sévit sur les îles Britanniques. Celle-ci permet, en 1846, au Premier ministre Robert Peel d'obtenir du Parlement la suppression des Corn Laws. [...]
[...] Frédéric Bastiat par exemple, dans "Pétition des marchands de chandelles" contre la concurrence déloyale du soleil (1846) se moque des protectionnistes. Napoléon III est proclamé empereur en 1851. Il est déjà attiré par les idées libérales qui fleurissent au Royaume-Uni et, lors du Traité de Paris, sa bonne entente avec l'Angleterre va se trouver à son apogée. De plus, il admire la modernité britannique (d'où le développement industriel, économique et financier de la France sous son règne). Si la politique économique extérieure du Zollverein allemand reste protectionniste, à l'intérieur de cette zone le libre-échange est préconisé. [...]
[...] Au cours du XIXe siècle, le protectionnisme reste globalement la règle dans toute l'Europe. Quant au reste du monde, dans la plupart des cas le libre-échange n'est adopté que parce qu' il est imposé (Japon, Chine, Inde . Toutefois, la pensée économique, elle, évolue progressivement en faveur de cette nouvelle doctrine. Ainsi, dans toute l'Europe, on voit des penseurs succéder à Adam Smith, en accord avec ses idées: De Say, Ricardo, Cobden, Bastiat . Le mouvement prend donc de l'ampleur dans la première moitié du siècle et, lorsque le Royaume-Uni, première puissance mondiale de l'époque, adopte le libre-échange en 1846, la machine est lancée: une quinzaine d'années plus tard, toute l'Europe s'ouvre et un immense marché libre est créé. [...]
[...] Le Reich adopte donc des lois douanières et est le premier pays à revenir au protectionnisme. Au Canada, on adopte aussi une 'politique nationale' à partir de 1879, qui se traduit par l'imposition de tarifs douaniers pour la protection des fabricants canadiens. En 1881, la France rétablit les taxes douanières sur les produits industriels et en 1884, elles sont rétablies sur les produits agricoles.Toutefois, c'est surtout avec la 'loi Méline' de 1892 qu'on assiste à un véritable retour au protectionnisme en France: le tarif douanier est voté. [...]
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