Jean-Claude Farcy montre dans L'Histoire de la justice française de la Révolution à nos jours : trois décennies de recherches qu'il y a eu depuis les années 1970 et 1980 un essor considérable des études sur la justice au confluent de la montée en puissance du pouvoir judiciaire dans la société d'une part, des nouvelles préoccupations des historiens sensibles aux marginalités, aux rapports sociaux, à l'individu et aux conflits d'autre part, et de la prise en compte de ces phénomènes par deux disciplines académiques, l'histoire et l'histoire du droit. Ainsi l'épisode de la Révolution a été largement exploré (notamment à l'occasion du bicentenaire de la Révolution car les bouleversements apportés par les constituants de 1789 et 1790 dans l'organisation de la Justice constitue une rupture incomparable et durable avec l' Ancien Régime : ils n'ont eu aucun précédent et ne seront suivis d'aucune autre réforme d'envergure comparable. En fait, les bases mêmes de l'institution moderne de la justice française sont issues de la Révolution. Etudier la justice sous la Révolution, c'est à la fois étudier le pouvoir judiciaire, c'est-à-dire l'ensemble des institutions, des juges et des magistrats, mais aussi le pourvoir de dire et de faire respecter le droit. La justice est à comprendre ici comme appareil d'Etat pour veiller à l'obéissance aux lois. Il existe ainsi plusieurs types de justices : civile, du commerce, de droit commun, pénale, criminelle, politique etc. On voit toutefois apparaître sous la République une justice populaire, où les patriotes eux-mêmes s'estiment garants et ordonnateurs de la justice, bien qu'elle soit récupérée par la Convention. Cet épisode qui conduit à l'instauration d'un gouvernement de la Terreur montre bien que la justice peut être aussi bien juste qu'injuste, incarner l'égalité et la liberté des individus aussi bien que le contraire. La justice politique s'avère ainsi n'être souvent que la manipulation et le contrôle de la justice par les gouvernants contre tout opposant politique, pouvant aller jusqu'à provoquer de grave injustices, au nom de la morale et de la protection de l'individu. De plus, la justice s'exprime à travers le droit, dont l'expression même est la loi. Or la loi est faite par les hommes, c'est-à-dire qu'elle est le produit d'une situation historique où s'articule différentes sphères intrinsèquement liées : les sphères sociales, politiques, idéologiques, économiques, culturelles et morales. Ainsi, la justesse du droit en place en France pendant la Révolution dépend essentiellement des dynamiques du pouvoir en place et de la société à laquelle il s'applique. La justice et le droit sont donc des témoins fidèles des institutions politiques et sociales, ainsi que des idées fondamentales qui à une certaine époque, régissent les rapports tant de l'individu vis-à-vis du groupe social que des classes sociales entre elles. Mais le droit est aussi un projet, une action qui veut anticiper sur le futur : il donne une impulsion nouvelle au pouvoir et à la société. En effet, changer les lois ou en instaurer des nouvelles, c'est exprimer une volonté de s'arracher à ce qui est pour devenir autre. On peut donc se demander en quoi les transformations que connaît la justice pendant la période révolutionnaire reflètent et anticipent sur les bouleversements politiques et sociaux et les orientations des gouvernements révolutionnaires successif, plus ou moins en accord avec les idéaux révolutionnaires.
[...] D'autre au contraire sont enthousiasmés avec cette justice mis à l'ordre du jour. Le problème n'est pas simple, la justice est interprétée différemment et il est difficile d'établir qui est coupable ou non des injustices révolutionnaires du gouvernement de Robespierre. Ainsi on arrive à certaines aberrations : des patriotes sont emprisonnés alors que des contre révolutionnaires sont libérés. La constitution de l'an III : simplification de la justice de 1790 mais manipulation de la justice pour légitimer le gouvernement des meilleurs La constitution de l'an III (22 août 1795) rétablit l'indépendance de la justice en interdisant l'exercice de la justice au corps législatif et au pouvoir exécutif, condamnant ainsi la pratique des décrets d'annulation. [...]
[...] Ainsi la justice de 1789 et 1790, élaborée par l'Assemblée Nationale Constituante, est bien un compromis entre l'expression de la raison et de la volonté du peuple. Plutôt que de risquer de voir la volonté générale étouffée par les égoïsmes ou l'aveuglement des appétits, on interpose un filtre entre la volonté de chacun et la loi qui celui de la représentation. En attribuant la souveraineté à la nation, c'est-à-dire à une entité distincte de l'addition des individus qui la composent, les hommes de la Révolution ont rendu nécessaire la création d'un organe qui parlera en son nom : l'Assemblée. [...]
[...] La justice devient toutefois rapidement l'objet de conflits politiques. En effet, les montagnards sont jugés alors que ceux-ci ont condamnés Robespierre. Certains estiment que la justice ne va pas assez loin, qu'elle n'est pas assez répressive envers le gouvernement terroriste. Ainsi les thermidoriens sont accusés de modérantisme et la politique d'élargissement alimente le débat. En effet dès le 18 thermidor, la Convention fait ouvrir les portes des prisons : en juillet 1794 il y a seulement 7000 détenus, alors que personnes ont été emprisonnées pendant la Terreur. [...]
[...] En tant que déjà maîtres de la force militaire et du pouvoir civil de la capitale, ils entendent intervenir dans la justice et la souveraineté populaire devient à partir du 10 août 1792 une vérité officielle pour les patriotes. En effet, ceux-ci réclament et obtiennent l'établissement d'un tribunal ordinaire pour juger les crimes du 10 août qui agit du 17 août au 29 août. Il illustre une véritable parodie de la justice puisque sur 62 causes condamnations à mort sont prononcées sans appel. Or celui-ci est jugé trop indulgent et trop lent. Ainsi, l'idée de forcer les prisons pour soumettre les détenus à une justice plus expéditive se répand dans l'opinion. [...]
[...] Aussi c'est tout l'édifice de L'Ancien Régime qui est détruit. Toutefois, le triomphe de l'individu est incomplet. En effet, l'égalité civile comporte des limites en 1789, traduisant une culture et des mœurs propres à la période : elle n'est accordée aux Juifs qu'en 1791, aux noirs qu'en pluviôse an II avec le décret sur l'abolition de l'esclavage. Et la femme mariée reste soumise à l'autorité maritale selon l'ordre naturel Aussi, le droit nouveau est mis en place par la bourgeoisie, et est fondé avant tout sur la propriété. [...]
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