Après la chute de Mussolini et du régime fasciste en 1943, les Italiens optent par voie référendaire pour la proclamation d'une République (18 juin 1946) et élisent simultanément une Assemblée constituante chargée de l'élaboration d'une Constitution promulguée le 27 décembre 1947. Ce texte constitutionnel, très élaboré, établit un régime parlementaire, évidemment pour marquer une cassure nette avec le fascisme et stopper toute dérive potentielle du pouvoir et retour à l'autoritarisme. Elle définit entre autre les attributions d'un président de la République (élu pour un septennat par le Parlement, organe central qui nomme Président du Conseil et gouvernement sur proposition du Président du Conseil). La Chambre des députés et le Sénat doivent accepter les investitures du gouvernement (bicaméralisme égalitaire, chose assez inédite)
Le système est un parlementarisme rationalisé largement décentralisé avec un contrôle bilatéral exécutif-législatif (droit de dissolution pour le Président mais contrepartie motion de défiance du Parlement) Mais dans la pratique, le parlementarisme rationalisé se montre extrêmement faible, et une toute-puissance des partis s'y substitue (partitocratie), accompagnée par une forte instabilité gouvernementale. Le régime en question se tient alors à l'écart du peuple en gouvernant par des pratiques frauduleuses héritées de l'époque préfasciste. C'est pourquoi l'exaspération générale mène en 1993 à un véritable tournant du système sous la double impulsion des magistrats et du peuple
Il est donc légitime de se demander si après tant de bouleversements, on peut aujourd'hui parler pour l'Italie d'instituions fiables, légitimes et d'une gouvernance transparente.
[...] La lenteur des procédures législatives se révèle handicapante. Ex : le référendum abrogatif (particularisme italien qui permet au peuple d'abroger totalement ou partiellement une loi ) n'est organisé qu'en 1970, soit plusieurs décennies après la promulgation de la Constitution. Cet effet de retardement n'est pas anodin puisqu'il est le reflet d'une réalité essentielle du système antérieur à 1993, à savoir que les institutions italiennes s'expriment majoritairement par le truchement des partis (Constitution qui s'ignore) En effet, très vite s'est imposé un multipartisme exacerbé, étroitement lié au mode de scrutin en vigueur, quasiment intégralement proportionnel. [...]
[...] Elle connaît un morcellement en plusieurs partis, dont le parti populaire est le plus important (PP). La vie politique s'organise depuis en deux coalitions qui gouvernent cette fois avec une certaine alternance. A gauche, la coalition de l'Olivier est mené par Romano Prodi et comprend notamment le parti social-démocrate, les Verts, les Républicains A droite, la Maison des Libertés (Casa delle libertà) est dirigée par Berlusconi, et dominée par Forza Italia (le parti de Berlusconi, fondé en 1994 pour contrer l gauche) . [...]
[...] La fréquence des pratiques corruptrices, favorisée par l'exclusivité du pouvoir entraîne une désaffection de l'électorat. La classe politique est discréditée, non seulement parce que leurs votes se dispersent (atomisation), mais aussi parce qu'ils sont exclus du débat politique, comme le Parlement en fait (comble pour un parlementarisme rationalisé). La plupart des crises ont lieu dans des configurations extra- parlementaires (sur les accords interpartisans, la naissance et la disparition des gouvernements ce qui est amplifié par le maintien du vote secret jusqu'en 1983, favorisant l'indiscipline parlementaire. [...]
[...] L'accession de Berlusconi au pouvoir en 1994, puis de Prodi en 1996 puis à nouveau de Berlusconi en 2001 marque une alternance gauche/droite et conséquence directe,une véritable opposition. La représentation parlementaire est complètement bouleversée par l'émergence de nouveaux partis. Une bipolarisation partielle permet enfin aux Italiens de retrouver leurs votes au pouvoir. Si cette clarification de la vie politique est absolument inédite et sans précédent dans un pays européen, la mutation majoritaire connaît des limites et le passage du parlementarisme au primoministérialisme est incomplet. [...]
[...] Le système a été remodelé par la réforme, certes, et de manière plutôt positive, avec un jeu politique épuré et qui a gagné en crédibilité, dont la DC n'est plus le pivot, mais la pérennité de la partitocratie est toujours un facteur d'affaiblissement de l'Etat central. Cependant, la forte majorité de la droite en 2001, ajoutée au taux de participation élevé des primaires de gauches d'octobre 2005 qui ont vu la victoire éclatante de Romano Prodi (fédérateur potentiel de la gauche), peuvent être interprétés comme le signe qu'effectivement l'Italie est bien entrée dans une IIème République chose prédite déjà en 1994 mais vite démentie par les faits. [...]
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