Le droit de dissolution est la faculté pour le pouvoir exécutif d'écourter le mandat de l'ensemble des membres d'une assemblée délibérante élue et de provoquer de nouvelles élections. C'est un « instrument de stabilité » aussi bien politique qu'institutionnelle.
C'est tout d'abord un instrument de stabilité politique, son emploi permet de régler une crise politique survenue à la suite d'un désaccord entre la chambre basse et le pouvoir exécutif, par le recours au corps électoral qui fera « entendre sa voix à une heure décisive ».
C'est aussi un instrument de stabilité institutionnelle puisqu'il est la contrepartie du droit pour le Parlement de mettre en œuvre la responsabilité politique du gouvernement.
Le droit de dissolution est une « pièce essentielle du mécanisme parlementaire » (Hamon, Troper). A ce titre il est consacré par l'article 5 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875 relative à l'organisation des pouvoirs publics de la IIIe République.
Les textes constitutionnels de 1875 mettent en œuvre sans expressément le nommer, un régime parlementaire orléaniste. D'une part, du fait du rôle actif qu'ils permettent au Chef de l'Etat et d'autre part, du fait de la mise en place de la double responsabilité du gouvernement : à la fois devant le Chef de l'Etat et devant le Parlement. Ce dualisme est implicite. Les constituants en attribuant au droit de dissolution la fonction de résoudre les conflits entre le Président de la République et la Chambre des députés, sont dans la logique du modèle parlementaire dualiste puisqu'il s'agit d'un moyen de rétablir l'harmonie entre la chambre élue, le ministère et le chef du pouvoir exécutif.
[...] S'établit alors une inégalité des pouvoirs : les Chambres avaient à leur disposition une multitude de moyens de leur assurer la subordination du pouvoir exécutif tandis que celui-ci était dépourvu de tout moyen d'action. Ainsi, en cas de conflit avec les assemblées, le pouvoir exécutif devait se soumettre ou se démettre selon l'expression de Gambetta. Résultent principalement de la crise de 1877 le non-usage du droit de dissolution et le passage à un parlementarisme moniste. Les assemblées dominent l'exécutif, ainsi apparaît le gouvernement par délégation parlementaire selon l'expression de G. [...]
[...] Les ministres sont nommés par le Président de la République, mais en pratique ils sont choisis par le Président du Conseil des ministres. Le Président du Conseil tient sa nomination de la présidence de la République. Cependant, le gouvernement doit avoir la confiance de la majorité à la Chambre des députés. Ainsi, c'est en réalité la majorité parlementaire qui choisit aussi bien le Président du Conseil que ses ministres. En revanche, le Président de la République détient en droit de nombreux pouvoirs. Il partage notamment le pouvoir de l'initiative des lois avec le Parlement et il dispose du pouvoir réglementaire. [...]
[...] Cependant, la perte du pouvoir du Président de la République profite moins au gouvernement qu'à la Chambre des députés. La majorité parlementaire exerce une domination sur le gouvernement d'autant plus que les moyens d'action dont il disposait tombent en désuétude, notamment le droit de dissolution suite à l'usage qu'en fait Mac-Mahon en 1877. Les ministres sont directement soumis à la volonté de la majorité parlementaire et leur nomination relève de facto de celle-ci. On peut donc en déduire que la majorité parlementaire contrôle indirectement le pouvoir exécutif ainsi que les prérogatives dont il dispose. [...]
[...] Comme le voulait le constituant, l'avis du Sénat est un frein à l'usage du droit de dissolution, mais ce n'est pas, comme il l'espérait un appui pour le Président de la République. C'est ce qui permet à Redslob de dire que la nécessité d'obtenir l'avis conforme du Sénat est une inégalité flagrante dans la lutte Certains auteurs font aussi appel à la notion de coutume constitutionnelle pour expliquer le non-usage du droit de dissolution sous la IIIe République : selon eux, une règle coutumière nouvelle se serait formée, abrogeant l'article 5 de la loi du 25 février 1875. [...]
[...] Aux termes de l'amendement Wallon de la loi constitutionnelle du 25 février 1875 relative à l'organisation des pouvoirs publics, le Président de la République est élu ( ) par le Sénat et la Chambre des députés réunis en Assemblée nationale Sa légitimité ne lui permettait pas de dissoudre la Chambre des députés et ainsi, de renvoyer les élus du peuple. La dissolution était désormais considérée comme antidémocratique. En plus du choc psychologique, le non-usage du droit de dissolution sous la IIIe République est aussi la conséquence de la nécessité de l'assentiment du Sénat. L'usage du droit de dissolution n'est pas à la discrétion du Président de la République. Le constituant voulait la participation du Sénat à l'acte de dissolution comme un moyen de fortifier la situation du Président de la République. [...]
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