Dès le début des années 1920 circule dans les milieux pacifistes et européistes l'idée d' « Eurafrique ». En effet, après la Première Guerre mondiale l'idée d'unir l'Europe apparait indispensable pour faire face au déclin annoncé du vieux continent et préserver ainsi une certaine hégémonie. Cette perspective a changé le regard porté sur l'Afrique et les possibilités offertes par ce vaste continent. Ainsi, face à l'émergence des puissances américaines et japonaises, un intérêt particulier a été porté à l'Afrique, qui pouvait alors être envisagée comme la « périphérie naturelle » de l'Europe.
Cette idée de lier l'Europe et l'Afrique dans une « communauté d'intérêts » a été avancée en 1923 par Coudenhove-Kalergi, dans son ouvrage Pan-Europa. Il y développe l'idée de lier l'Europe et l'Afrique pour former un tout : la Pan-Europe permettant d'unir l'Europe face au projet commun de mise en valeur du continent africain.
Cette vision d'une Europe élargie allant au-delà des frontières traditionnelles a fait l'objet de nombreux débats durant l'entre-deux-guerres. Le terme « Eurafrique » n'était pas toujours employé mais la nécessité d'européaniser les colonies a été largement débattue. Les enjeux étaient en effet importants car ce concept touche directement à la question coloniale, sujet particulièrement sensible après la mise en place du traité de Versailles.
[...] L'idée de Paneurope était approuvée dans certains milieux allemands, car ils y voyaient un moyen d'accélérer la révision le traité de Versailles. D'autres, comme le Dr Schacht qui était lié aux milieux industriels et commerciaux, envisageaient l'Eurafrique sous son aspect économique, en tant que ressource de matières premières. Le rôle de l'Allemagne dans cette expansion africaine devait être primordial pour certains : Hans Zache, un ancien haut fonctionnaire colonial affirmait en 1927 que seule l'Allemagne avait l'excédent de population suffisant pour transformer l'Afrique, il était donc logique que le rôle essentiel de mise en valeur de l'Afrique revienne à l'Allemagne. [...]
[...] Articles scientifiques, Revues AGERON (Charles-Robert), L'idée d'Eurafrique et le débat colonial franco- allemand de l'entre-deux-guerres Revue d'histoire moderne et contemporaine pp446-475. DESCHAMPS (Étienne), L'Eurafrique : le fascisme et la collaboration francophone belge Cahiers d'Histoire du Temps Présent, novembre 1996, pp141-161. ELLENA (Liliana), Political imagination, sexuality and love in the Eurafrican debate European Review of History, Juin 2004, 11:2, pp241- 272. METZGER (Chantal), D'une puissance coloniale à un pays sans colonies : L'Allemagne et la question coloniale (1914-1945) Revue d'Allemagne vol no pp555-569. [...]
[...] Ces quelques titres, pour ne citer que les plus célèbres, montrent à quel point le thème du déclin européen inspira les intellectuels français et européens de l'entre-deux-guerres. Pour plus de détails, consulter Les géographes et l'Europe, l'idée européenne dans la pensée géopolitique française de 1919 à 1939 Muet, pp27-33. L. Ellena, Political imagination, sexuality and love in the Eurafrican debate, p243. C. Ageron, L'idée d'Eurafrique et le débat colonial franco-allemand de l'entre-deux-guerres, p446. A-M. Saint Gilles, La Paneurope : Un débat d'idées dans l'entre- deux guerres, Introduction. [...]
[...] En effet, la question coloniale menace de diviser l'Europe de façon permanente en deux camps : le groupe occidental des États à possessions coloniales ; le groupe oriental des États sans possessions coloniales[8] Les ambitions eurafricaines de Coudenhove s'inscrivent dans un contexte de coopération internationale qui se développe dans les années vingt. Le projet eurafricain, à l'origine marqué par des intentions pacifiques, internationalistes a ainsi reçu un très bon accueil dans les milieux de la Société des Nations (S.D.N), mais également au sein du parti colonial français ou encore chez les leaders radicaux. Plusieurs projets ont ainsi été avancés dans les cercles européistes. En France, une première formulation sérieuse de cette politique eurafricaine a été émise par Henri de Jouvenel. [...]
[...] L'idée d'Eurafrique a également été abondamment débattue en Italie où la question coloniale était un problème majeur durant l'entre-deux-guerres. Elle a été développée selon deux conceptions opposées : certains se sont montrés proches des idées de Coudenhove, alors que d'autres ont mobilisé le concept d' Eurafrica dans les courants nationalistes et révisionnistes italiens dans le but de réviser le traité de Versailles qui ne permettait pas à l'Italie d'avoir d'autres territoires en Afrique. Dans les milieux intellectuels italiens, un des plus sensibles au projet eurafricain de Coudenhove est Paulo d'Agostino Orsini di Camerota, professeur de géographie à l'université royale de Rome. [...]
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