A la fin du 19ème siècle, un nouveau genre d'animal trouve sa place dans les zoos occidentaux : « l'homme sauvage » d'Afrique, d'Océanie ou d'ailleurs. Les zoos humains, symboles inavouables de l'époque coloniale et du passage du XIXe au XXe siècle, sont pourtant totalement absents des mémoires collectives, et ce n'est pas faute d'avoir existé ni faute de succès, puisque c'est par dizaines de millions, 400 millions selon les estimations les plus basses, qu'Européens et Américains venaient découvrir, appréhender et admirer, pour la première fois, le "sauvage" que ce soit dans des zoos, des foires, des expositions officielles, des exhibitions ethnographiques et coloniales ou sur la scène des cabarets.
Les zoos humains sont toujours présents aujourd'hui, puisqu'un village Massaï reconstitué a ouvert ses portes en Belgique en 2001, qu'un autre village de Pygmées a suivi en 2002 et qu'en Bretagne un village africain fut l'attraction majeure d'un Safari Parc au milieu des années 90, sans parler des nouvelles formes « télévisuelles » de zoos, et pourtant, on a révélé maintes fois le caractère dégradant qu'ils revêtaient e revêtent. Ainsi, on peut se demander comment le phénomène des zoos humains a-t-il fait d'un racisme jusque là uniquement scientifique un racisme populaire ?
On verra donc que les zoos humains se révèlent être un phénomène d'une ampleur incroyable (I), qui mettent en scène l'Autre, et créent son image, à des fins économiques et apparemment scientifiques, (II), étant à l'origine même d'un racisme devenu populaire qui justifie le colonialisme (III).
[...] Si au début, seules les capitales exposent, rapidement, chaque foire régionale se devra d'avoir son propre zoo humain, peu importe sa taille. En France, le premier à tenter l'expérience est Geoffroy Saint-Hilaire au Jardin d'Acclimatation, en 1877, avec deux spectacles ethnologiques mettant en scène Nubiens et Esquimaux. C'est le début des zoos humains français, avec lesquels le jardin double cette année-là son nombre d'entrées. Il y aura, entre 1877 et grandes expositions au Jardin, on en recense une cinquantaine en Allemagne entre 1878 et 1927. [...]
[...] Les hommes s'électrisent devant des hommes enclos, la démarche satisfait le public, en lui présentant ce qu'il attend. Au final, par l'ampleur du phénomène, l'impact social des zoos humains est considérable, puisqu'ils représentent le premier contact avec l'altérité et ainsi contribuent à la création d'une image de l'autre. II- La mise en scène de l'altérité : une mascarade commerciale et scientifique Les expositions ethnographiques sont d'une nature ambiguë selon O. Razac, puisqu'elles ont à la fois un but commercial, une prétention pédagogique et une légitimité scientifique. [...]
[...] Ces shows attirent tant d'entrepreneurs parce qu'ils se révèlent hautement lucratifs. Les zoos garantissent en effet une forte présence, et par là des dérivés commerciaux nombreux (cartes postales, objets exotiques, ) et des retombées économiques conséquentes ; les représentations les plus commerciales étant sûrement les maisons de thé ceylanaises érigées par les Anglais dans toutes les expositions dès 1880 ou encore les foreign streets comme la Rue du Caire ou la reconstitution des zouks. Une mascarade qui reçoit le soutien et le crédit de la communauté scientifique Se pose alors la question de savoir comment les savants se sont inscrits dans le phénomène des zoos humains. [...]
[...] Des hommes dans les zoos d'Europe À la fin du 19e siècle, un nouveau genre d'animal trouve sa place dans les zoos occidentaux : l'homme sauvage d'Afrique, d'Océanie ou d'ailleurs. Les zoos humains, symboles inavouables de l'époque coloniale et du passage du XIXe au XXe siècle, sont pourtant totalement absents des mémoires collectives, et ce n'est pas faute d'avoir existé ni faute de succès, puisque c'est par dizaines de millions millions selon les estimations les plus basses, qu'Européens et Américains venaient découvrir, appréhender et admirer, pour la première fois, le "sauvage" que ce soit dans des zoos, des foires, des expositions officielles, des exhibitions ethnographiques et coloniales ou sur la scène des cabarets. [...]
[...] Ce sont des hommes malgré tout diront les opposants, jugeant ces expositions indignes des Occidentaux, auxquels de telles pratiques retirent à vrai dire toute l'humanité qu'ils prétendent posséder. On observe en effet la distance entre les idéaux et les agissements, entre une République prônant l'égalité pour tous si l'on prend le cas de la France, et l'assujettissement des peuples colonisés. Les zoos humains ancrent dans les esprits des préjugés racistes, et la frontière tracée par les zoos entre les visiteurs et le visité semble toujours fonctionner, il y aurait toujours Eux et Nous, l'Occident et l'ailleurs, la civilisation et la barbarie Chaque siècle semble malheureusement avoir ses zoos humains, qu'ils conservent la forme traditionnelle ou qu'ils se muent en banlieues ou émissions de télé- réalité. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture