L'historien et les mémoires de la Seconde Guerre mondiale, évolution en France, Résistance, Charles de Gaulle, résistancialisme, Jean Moulin, gouvernement de Vichy, Paul Touvier, collaboration, loi Gayssot, Shoah, rafle du Vel' d'Hiv' Pétain
A priori, tout semble rapprocher mémoire et histoire, mais d'après l'historien Pierre Nora, tout les oppose. En effet, l'histoire constitue une démarche scientifique reposant sur la collecte d'informations et l'analyse de sources diverses, soumises à une lecture critique. Elle vise à rechercher la vérité de manière objective. La mémoire est l'ensemble des souvenirs véhiculés par les individus, transmis d'une génération à l'autre. Elle est sélective, incomplète, partiale. Elle relève de la subjectivité d'une expérience parfois vécue. Mais comprendre l'histoire d'une période, c'est aussi en étudier les mémoires et la manière dont elles sont diffusées.
Ainsi, le travail de l'historien consiste aussi à analyser les mémoires tout en portant un regard distancié sur elles, afin d'établir des faits passés réels. S'il est une période qui permet de comprendre les rapports complexes existant entre histoire et mémoire en même temps qu'elle permet de prendre conscience de la difficulté du travail d'historien, c'est bien la Seconde Guerre mondiale. Comment les mémoires de cette période ont-elles évolué en France et quel rôle les historiens ont-ils joué dans cette évolution ?
[...] La mémoire de la Shoah est pleinement reconnue (Mémorial de la Shoah en 2005), on rend hommage aux Justes (Mur des Justes en 2006, entrée des Justes au Panthéon en 2007), les réquisitionnés du STO, les malgré-nous et les malgré elles sont reconnus comme victimes du nazisme (2012) et on réintègre dans la mémoire officielle les Indigènes (dont l'action a pu être connue grâce au film Indigènes de Bouchareb, 2006). De plus, en 2011, la SNCF assume ses responsabilités dans la déportation et fait de la Gare de Bobigny un musée mémorial. Cependant, certaines mémoires, à l'image de celle des Tziganes, sont peu évoquées. [...]
[...] Il est donc aujourd'hui difficile de parler de mémoire de la Seconde Guerre mondiale au singulier. Les historiens préfèrent utiliser le terme au pluriel. Dans les années 1990 apparaît également l'expression « devoir de mémoire ». Pour satisfaire les associations « porteuses de mémoires » et apaiser le débat mémoriel, l'Etat met en œuvre une politique mémorielle, qui repose sur l'instauration de rituels et de symboles (plaques de rues et de places, dates du 18 juin, du 8 mai, du 16 juillet ) et sur le vote de lois par le Parlement (loi Gayssot en 1990 Toutefois, certains dirigeants politiques ont été accusés d'instrumentaliser la mémoire du conflit. [...]
[...] Comment les mémoires de cette période ont-elles évolué en France et quel rôle les historiens ont-ils joué dans cette évolution ? Afin de répondre à cette problématique, il sera intéressant d'évoquer dans un 1er temps la mémoire résistance, officielle et sélective, puis d'aborder le réveil des autres mémoires à partir des années 1960 pour finalement s'interroger sur le caractère plus historique et moins mémoriel de la lecture que nous faisons de cette période, depuis les années 1990. I. La mémoire résistance, officielle et sélective La mémoire résistante, officielle et sélective, élabore le mythe du résistancialisme dès la libération et le général de Gaulle fait de la France de Vichy une parenthèse. [...]
[...] La soif de vérité de l'opinion publique atteint son apogée dans les années 1980-1990 avec les grands procès d'anciens nazis ou de responsables de Vichy, qui ne sont pas soumis à la prescription (une loi de 1964 rendant imprescriptibles les crimes contre l'humanité). Le rôle de Vichy et de ses responsables est mis en évidence et les procès débouchent sur des condamnations à mort (Touvier, Papon, Bousquet, Barbie III. Depuis les années 1990 À la fin des années 1990, la France semble enfin assumer son passé trouble. Le passé est donc dévoilé et assumé. Mitterrand, ancien vichyste et résistant veulent apaiser les tensions avec le fleurissement de la tombe de Pétain. [...]
[...] Leur rôle est de trier, vérifier, examiner, invalider ou valider les faits. Certains participent même à des procès dans le but d'informer (Paxton, Azéma), tandis que d'autres refusent par peur d'être instrumentalisés (Rousso). Au-delà des polémiques, de nombreux travaux, français ou étrangers, rendent compte de la complexité de la période de l'Occupation, contribuant à l'apaisement des conflits mémoriels. Les programmes et les manuels ont pris en compte le renouvellement des recherches historiques sur la période de la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, certains sujets demeurent brûlants. [...]
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