En 1880, l'Empire colonial français est réduit à l'état dans lequel il se trouvait suite au Congrès de Vienne de 1815. La France ne possède plus que les confettis de l'Ancien Régime (Antilles, Réunion), l'héritage de la Monarchie de Juillet (Algérie) et du Second Empire (Sénégal et Cochinchine). Avec l'avènement de la IIIème République, la colonisation redevient un pilier du régime en place : les colonies sont le lieu de toutes les utopies et particulièrement celle d'une communauté de destin entre la mère patrie et ses filles exotiques. Plus d'un siècle plus tard, en 1990, la France ne dispose plus de colonies, mais la colonisation persiste à influencer la société et la politique du pays par le biais de la mémoire, ou plutôt des mémoires, qui s'y rapportent.
Si l'histoire est la représentation la plus fidèle possible du passé, la mémoire acquiert une dimension normative et est ainsi le résultat de souvenirs choisis, voir même construits. Il s'agit ainsi de se demander dans quelle mesure la mémoire a pu servir de légitimation, de justification à la colonisation, quel rôle elle a joué au sein de ce processus, mais aussi de quelle façon ce rôle a pu évolué au cours de la période coloniale et post-coloniale. Cette interrogation va nous amener à nous interroger sur les moyens de formation de ces mémoires de la colonisation, et donc sur le rôle de la discipline historique au sein de ce processus de construction mémorielle : les interactions entre mémoire et histoire évoluent, la mémoire cherche à se créer à partir et à servir de l'histoire pour se légitimer.
A partir de 1880, le processus de construction de l'empire colonial voit la création de toutes pièces d'une mémoire coloniale par de nombreux vecteurs, le seul contact de masse direct entre populations métropolitaines et colonisées étant la Première Guerre mondiale. Ce phénomène peut être considéré comme ayant atteint son apogée lors de l'Exposition coloniale de 1931 : jusqu'à la fin de la guerre d'Algérie en 1962, la mémoire de la colonisation perd de sa force, de sa cohésion et de son uniformité, perte accélérée par les guerres de décolonisation. De 1962 aux années 1990, la colonisation n'existe plus qu'à travers la mémoire des générations ayant vécu dans la France coloniale, en tant que colonisateurs ou que colonisés, ce qui provoque une véritable bataille mémorielle au sein de laquelle l'histoire a son mot à dire.
[...] Ce retour de leur passé colonial au sein même de la société n'a pas enchanté tous les Français qui dans la majorité ont (selon B. Stora) voté oui à l'indépendance de l'Algérie en 1961 et 1962 dans le seul but de se débarrasser de ce Sud turbulent et dérangeant. Toutefois, si la première génération d'immigrés cherchait avant tout un travail, ses enfants (la seconde génération manifeste pour son intégration non seulement en droit, mais aussi en faits à la société comme en témoigne la marche pour l'égalité de 1983 et ses petits-enfants (la troisième génération veulent être français à part entière c'est-à-dire ne plus être vu différemment, ne plus être discriminés sur leur nom ou leur faciès, ne plus avoir en conséquence de difficultés à trouver un logement, un travail ; la discrimination est vécue comme une perpétuation du système colonial. [...]
[...] Depuis la fin de la décolonisation en 1962 (Djibouti ne devient en fait indépendant qu'en 1977) la colonisation n'est plus le cadre évènementiel du présent. Aujourd'hui cependant, elle continue à exercer son empreinte sur les mentalités de par sa proximité, puisque seules deux générations se sont succédé depuis : elle reste une histoire que l'on peut qualifier d'immédiate, toujours agissante dans la mémoire des individus. Toutefois, la mémoire du fait colonial est constituée de mémoires différentes, portées par des groupes distincts : du fait de l'immédiateté de cette histoire un rapport d'affectivité est inévitable, on peut dès lors aboutir, lorsque celle-ci est trop forte, à une sorte de guerre des mémoires selon l'expression de B. [...]
[...] La guerre d'Algérie, touchant à la colonie de peuplement principale, et à celle qui a pris la part la plus grande de la mémoire coloniale, va provoquer une véritable bataille mémorielle. La guerre d'Algérie : la mémoire coloniale au centre du débat national. La guerre d'Algérie est la dernière guerre de décolonisation française, mais aussi la plus meurtrière et la plus lourde de conséquences : elle a ainsi mené le pays au bord de la guerre civile, de 1954 à 1962. [...]
[...] Histoire et mémoire de la colonisation en France de 1880 à 1990 En 1880, l'Empire colonial français est réduit à l'état dans lequel il se trouvait suite au Congrès de Vienne de 1815. La France ne possède plus que les confettis de l'Ancien Régime (Antilles, Réunion), l'héritage de la Monarchie de Juillet (Algérie) et du Second Empire (Sénégal et Cochinchine). Avec l'avènement de la IIIème République, la colonisation redevient un pilier du régime en place : les colonies sont le lieu de toutes les utopies et particulièrement celle d'une communauté de destin entre la mère patrie et ses filles exotiques. [...]
[...] La dissuasion nucléaire ainsi que l'ex-empire français (avec qui les relations économiques restent très serrées) sont alors les deux pôles structurels de la puissance française. La France peut ainsi compter aussi sur les confettis d'empire qui lui assurent la deuxième ZEE du monde et une présence stratégique sur toutes les mers du monde, ainsi qu'une position idéale pour le tir de satellite avec la Guyane, située à quelques kilomètres de l'équateur. La décolonisation n'a pas sonné la fin de toute présence française en Afrique, loin de là ; puisque dès le général de Gaulle, on s'emploie à conserver de facto ou de jure le contrôle sur les Etats issus de l'AEF ou de l'AOF. [...]
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