A l'instar de Wagner qui incarna le génie germanique, Guiseppe Fortunino Francesco Verdi (né la même année que Wagner, en 1813, et mort en 1901) fut un des symboles du processus l'unité italienne, du Risorgimento. Né dans un milieu modeste, refusé au conservatoire de Milan, il fut sensible à la musique des spectacles qu'il pouvait fréquenter - ainsi, proche des milieux populaires, il fut sensible à leurs aspirations en un temps où les idées du Risorgimento se vulgarisaient. Il appartint à la génération des hommes qui firent l'unité de l'Italie (avant lui, Rossini avec Mosè, Guillaume Tell et Bellini avec I Puritani et Norma avaient chanté la liberté perdue et espérée d'un peuple opprimé). Le début de la carrière de Verdi est marqué par des oeuvres (opéras) où est mis en scène le malaise d'une Italie qui aspire à une place politique que l'histoire lui refuse depuis longtemps. Dans l'Attila de 1845, Verdi fait notamment répondre au roi des Huns par le Romain Ezio "Avrai tu l'universo / Resti l'Italia a me" "Tu peux garder tout l'univers / Pourvu que je conserve l'Italie". Les mots "L'Italia a me" sonnent comme le feront en d'autres temps certains slogans annexionnistes. Il y a ainsi un lien fort entre le fameux auteur d'Aïda (1871) et de Don Carlo (1867), avec la question nationale italienne qui est posée au XVIIIème siècle par le mouvement du Risorgimento.
En nous questionnant sur les rapports entretenus par Verdi avec le Risorgimento, aussi bien dans sa vie publique que dans ses opéras, nous soulèverons la question de l'art et de l'artiste dans la construction d'une nation ; la célébration et l'utilisation de la culture à des fins nationales. Ainsi, notre fil directeur dissertatif sur Verdi et sur son oeuvre, sera de comprendre comment la nation se construit à partir de symboles, qu'elle participe à créer, qu'elle promeut, qu'elle met en scène.
Nous nous intéresserons d'abord à l'engagement politique ambigu de Verdi, puis à la valeur symbolique de son oeuvre, à son instrumentalisation à des fins politiques (...)
[...] En 1859, les patriotes, à l'occasion des représentations du Ballo in Maschera peignirent sur les murs les lettres de son nom pour signifier les espoirs qu'ils plaçaient dans la maison de Savoie pour la construction de l'Italie : Evviva V.ER.D.I lettres qui signifient en vérité Vive Vittorio Emanuel Re D'Italia Non sans réticence, il accepta d'œuvrer en faveur de l'Italie monarchique : député du Duché de Parme, il remit les clefs de la capitale au représentant du roi de Sardaigne, siégea dans le Parlement italien jusqu'à la mort de Cavour puis se désintéressa de la politique italienne. Quelques semaines plus tard, la guerre éclate entre l'Empire d'Autriche et une coalition franco-piémontaise dont le but avoué est de faire de Victor-Emmanuel II de Savoie le premier roi d'une Italie nouvelle. Par cet acrostiche Viva V.E.R.D.I., Verdi devint un héros populaire. Le héros, le symbole que devint Verdi avec cet acrostiche, est donc le fruit d'une construction, et plus précisément d'une instrumentalisation politique non sans rapport avec la réputation de Verdi- exercée afin de contourner la censure. [...]
[...] Le 27 janvier 1861 il est élu député au Parlement du nouveau royaume d'Italie au moment de la mort de Cavour et de la proclamation du royaume d'Italie par un Parlement représentatif. Et enfin le 20 décembre 1874 Verdi accède au titre de sénateur du Royaume d'Italie –royaume qui a été confirmé par un plébiscite de 1870 et dont Rome a été proclamée capitale en 1871. Ainsi, tout au long de sa vie, Verdi semble avoir accompagné de près la construction de la nation italienne, il apparaît comme un artiste engagé. [...]
[...] En vérité, nous comprenons que quelque ambigu qu'ait pût être le véritable rapport de Verdi à l'engagement politique, ce n'est pas cela que l'Histoire a retenu. Il importe en effet, dans la construction d'une nation, telle la nation italienne dans son combat pour l'unité au XIXème siècle, de mettre en avant des hommes et d'utiliser leurs œuvres, afin de créer des héros, des mythes, des symboles, des référents identificatoires auxquels on greffe un idéal. Cela pose la question de la politisation de l'art, de l'art engagé ici, en effet, il semble que les opéras de Verdi que nous avons mentionné aient été politisés à posteriori, ce qui nous amène à soulever une problématique encore plus large, celle de la neutralité de l'Art ; peut on encore parler d'objectivité dans la perception d'œuvres artistiques, dès lors que celles- ci font partie d'un processus de construction de la nation ? [...]
[...] Verdi et la question nationale italienne A l'instar de Wagner qui incarna le génie germanique, Guiseppe Fortunino Francesco Verdi (né la même année que Wagner, en 1813, et mort en 1901) fut un des symboles du processus l'unité italienne, du Risorgimento. Né dans un milieu modeste, refusé au conservatoire de Milan, il fut sensible à la musique des spectacles qu'il pouvait fréquenter ainsi, proche des milieux populaires, il fut sensible à leurs aspirations en un temps où les idées du Risorgimento se vulgarisaient. [...]
[...] Il me craint, qui pourrait donc Insensés que vous êtes, me résister ? Voici les termes dans lesquels, dès le début de la 1ère partie, Nabucco s'adresse au peuple hébreux qu'il a vaincu, apparaissant comme un maître absolu qui défie toute divinité et n'entend imposer aucune limite à son rêve de puissance. Il semble que c'est le thème de l'unité, bien plus que celui de la liberté, qui semble avoir été au plus près des préoccupations du Verdi de l'époque. [...]
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