Il semble que si les secteurs les plus avancés de la gauche –le parti communiste tout entier, une partie du parti socialiste, et les partisans et amis de Pierre Mendès France et de François Mitterrand, ont si aisément appliqué sur l'événement du 13 Mai 1958 l'étiquette de coup d'Etat, c'est parce que le général de Gaulle donnait prise à la présomption de bonapartisme
[...] Naissance de la Vè république, un coup d'Etat démocratique, Fayard, Paris Rémond (René), Les droites en France, Aubier Collection historique Agulhon (Maurice), Coup d'Etat et République, Presse de la Fondation nationale des Sciences politiques Mitterrand (François), Le coup d'Etat permanent, Plon Minc (Alain), Louis Napoléon revisité, Paris, Gallimard Revues et annexes : Levillain (Philippe), De Gaulle était-il monarchiste ? Les collections de l'Histoire, février 1998, p.32. Winock (Michel), Y a-t-il eu un coup d'Etat en 1958 ? L'Histoire, n°237, novembre 1999, p.38. [...]
[...] La parenté apparaît assez éclatante entre les inspirations gaullistes et bonapartistes. La position de la France dans le monde et sa place dans le concert des nations est une préoccupation passionnée et commune à Bonaparte et de Gaulle. De gaulle parle du rang, le bonapartisme disait plutôt la gloire, deux vocables pour exprimer une même notion, la grandeur. Bonapartisme et gaullisme font de l'indépendance nationale un impératif de leur action et un objectif de leur politique. La politique étrangère des deux régimes révèle aussi, à un siècle d'intervalle, des analogies qui surprennent vu les changements dans la configuration des Etats. [...]
[...] De Gaulle comme Bonaparte entendaient dépasser les divisions et transcender les distinctions de toute sorte. Une même hétérogénéité donc, même si cette sorte de cohésion ne peut résister qu'un temps aux sollicitations contradictoires, mais des soutiens différents. D'un régime à l'autre les relations ont été, par exemple, très différentes entre le chef de l'Etat et la société militaire : l'armée est restée attachée à Napoléon III par-delà sa déchéance, alors que l'armée était au bord de l'insubordination avec de Gaulle qui était pourtant des siens. [...]
[...] De Gaulle aspirait à être le rassembleur du peuple tout entier. C'est l'Etat qui est le mainteneur de l'unité nationale, et ce contre le tempérament français. Les deux mouvements sont totalement solidaires s'il s'agit de combattre les factions : ils dénoncent avec la même virulence les partis qu'ils accusent de diviser le pays artificiellement. Bonaparte et de Gaulle sont tous les deux convaincus qu'il existe entre tous les citoyens d'une même nation un dénominateur commun, un intérêt national. C'est le rôle et la grandeur de l'Etat de les faire prévaloir sur les intérêts nécessairement divergents des citoyens. [...]
[...] On peut voir aussi une analogie entre la façon dont le second Empire use de la presse, au moins dans sa phase autoritaire, et la manière dont de Gaulle utilise le monopole de l'Etat sur la radio et la télévision. Mais le rapprochement apparaît un peu forcé. La Vème République s'est montrée plus respectueuse des libertés individuelles que le régime issu du coup d'Etat du 2 décembre. En ce qui concerne les comportements et les pratiques dans l'exercice du pouvoir, nombreuses sont donc les analogies entre gaullisme et bonapartisme. [...]
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