Dans ses Mémoires d'espoir, le général de Gaulle raconte les conditions de son 'retour aux affaires', expose ses idées constitutionnelles, et explique en quoi leur application pour la rédaction d'une nouvelle constitution, appelée à durer, était nécessaire à la France et à l'œuvre de redressement que souhaitait et qu'a entrepris Charles de Gaulle, à la tête de l'Etat. Ses conceptions, radicalement originales et en contradiction flagrante avec la tradition constitutionnelle française, ont dressé l'ensemble de la classe politique et beaucoup de juristes contre lui, mais se sont malgré cela imposées, pour ensuite faire l'objet d'un consensus à peu près général aujourd'hui. En quoi ces conceptions tranchent-elles avec l'héritage constitutionnel français, et en quoi de Gaulle avait-il raison ?
[...] De plus, le Président peut consulter directement la Nation sur une question d'avenir par la voie du référendum, et ce encore une fois de sa propre initiative et en toute indépendance. Pour justifier de tels pouvoirs, pour qu'une telle autorité soit reconnue par tous, il faut donc au Président une légitimité exceptionnelle, qui dépasse de loin celle des autres acteurs de la vie politique. La légitimité de Charles de Gaulle était à la fois morale et historique, du fait de son rôle pendant la Seconde guerre mondiale, où il incarna tout à la fois la France et le bien face au régime reconnu comme immoral de Vichy. [...]
[...] La souveraineté du peuple se manifeste de diverses façons. Tout d'abord, le peuple doit s'exprimer de façon directe, en élisant son chef au suffrage universel directe, et celui- ci ne doit être élu que s'il remporte la majorité absolue des suffrages, au premier ou au second tour. Ainsi, les Français, sans l'intermédiaire des partis qui risqueraient de confisquer le scrutin comme c'était le cas sous les deux précédentes Républiques, choisissent leur chef sans contrainte et en parfaite connaissance de cause, ce qui paraît être une pratique démocratique de bon sens élémentaire. [...]
[...] Par ailleurs, l'autorité de l'Etat est pour de Gaulle indispensable. Il constate en effet que les Troisième et Quatrième Républiques ont péri car leur constitution ne permettait pas à l'Etat d'avoir une autorité suffisante pour rassembler la Nation en cas de crise grave, et que dans les circonstances exceptionnelles que furent l'offensive allemande en 1940 et le putsch des généraux en 1958, l'autorité de l'Etat s'est dissoute et la crise a alors emporté le régime. En conséquence, pour que le régime soit solide, il faut que l'autorité de l'Etat soit réelle et qu'elle puisse s'imposer en temps de crise grave, ce qui n'est possible que si l'Etat est dirigée par un chef détenteur d'une autorité, donc d'une légitimité indiscutable et indiscutée. [...]
[...] Pour de Gaulle, la souveraineté du peuple est en effet indivisible. Ainsi, si les partis sont utiles et nécessaires à l'expression démocratique et s'ils permettent le bon déroulement de la vie politique et électorale, ils ne doivent donc néanmoins pas détenir le pouvoir au sein de l'Etat. En conséquence, il est nécessaire que l'Etat ait à sa tête un chef, qui puisse à la fois mettre en avant l'intérêt général en toute indépendance, c'est-à-dire sans qu'il ait à répondre de ses actions devant les partis, et qui permette à la société de s'identifier à lui pour qu'il incarne le pouvoir et pour qu'il offre un principe d'unité en lequel chacun puisse se reconnaître. [...]
[...] La période actuelle, avec ses cohabitations à répétition, et la perte de légitimité de l'Etat, illustrée par la montée des extrémisme et des contestations, semblerait prouver le contraire. Quoiqu'il en soit, et malgré les défauts et les archaïsmes que comportent la constitution gaullienne, force est de constater qu'à la différence des deux précédentes, elle fonctionne, ce qui montre que la conception gaullienne du pouvoir et du rôle de l'Etat était juste et reste riche d'enseignements. [...]
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