Les événements espagnols sont rapidement l'objet d'une attention singulière en Europe, et en France particulièrement. Les hommes politiques et les intellectuels, souvent par l'intermédiaire de la presse, se déchaîneront, chacun se prononçant en faveur ou non de l'insurrection soutenue par les partis de droite, la majorité du clergé et une grande partie de l'armée. François Mauriac en intellectuel et journaliste français participe également au conflit à travers de nombreux articles de presse, il fait part de ses opinions et de ses positions politiques.
Cependant, le conflit tient une résonance particulière pour ce dernier. En effet issu de la bourgeoisie Bordelaise, il bénéficie néanmoins d'un double héritage culturel bien distinct : celui de sa mère et celui de son père. Les positions de son père, farouchement anti-clérical (voire anti-religieux) et républicain envers et contre tout, s'opposent à l'éducation religieuse que Mauriac s'est vu imposer par sa mère, étant enfant. Celle-ci aura une influence considérable sur François Mauriac, du point de vue religieux, mais également politique puisque sa mère ne se prononce pas en faveur d'une République qui a tendance à persécuter l'Église et son influence, selon elle.
Ainsi donc, la guerre d'Espagne réveille l'affrontement de son double héritage ; mais a-t-elle, pour autant, provoqué chez François Mauriac des modifications de ses points de vue et de ses positions (politiques et religieuses) sur la société et sur le monde en général, assez conséquentes pour constituer une rupture avec le temps passé ?
[...] Dans ce poème, il condamne les forces républicaines, communistes, et les désigne seuls responsables de l'horreur de la guerre. François Mauriac lui répond sans attendre[19], indigné par le manque volontaire de clairvoyance de son ami. Il estime que le poème occulte les nombreuses victimes des attaques franquistes, attaques déguisées sous le bel atour d'une guerre sainte. C'est une sorte d'horreur que celle que nous inspire ce beau poème incomplet intitulé Aux martyrs Espagnols comme si les martyrs étaient d'un seul côté, les bourreaux d'un seul côté. [...]
[...] Dans cet article, L'Internationale de la haine Mauriac se prononce en faveur de la non-intervention française. Il va même plus loin puisqu'il prévient d'un ton menaçant le gouvernement et spécifiquement le président du Conseil qu'une intervention serait mal venue puisque non soutenue par les Français. Et je crois être l'interprète d'une foule immense ( ) en criant à Monsieur Léon Blum, qui brûle d'intervenir ( ) : ‘Faites attention, nous ne vous pardonnerions jamais ce crime'. Il estime que le conflit est Espagnol et doit le rester, la guerre fratricide ne doit pas être l'objet d'une intervention extérieure, un pays ne doit pas prendre part aux hostilités, et certainement pas la France. [...]
[...] Il dénoue ainsi rapidement les liens qui le rattachent à son milieu, avant même la fin de la guerre civile. Il s'affirme en politique et il modifie son image d'homme de droite en homme chrétien de gauche. Certains articles[14] de 1938, qu'il publie dans Temps Présent[15], prouvent le discernement dont il fait preuve sur la rupture et la prise de distances qu'il effectue avec son environnement d'alors (à savoir de droite). On devient à leurs yeux l'homme qui ne joue pas le jeu. [...]
[...] Mais rapidement, la vérité se fait : les bombes nazies ont détruit la ville en trois heures, massacrant sur leur passage plus de deux mille personnes, femmes, enfants et vieillards confondus. Le Manifeste de défense du peuple basque Il ajoute sa signature au bas du Manifeste pour la défense du peuple basque qui paraît le 8 mai 1937 dans le journal La Croix[6], aux côtés de celles de nombreux autres journalistes, hommes politiques ou intellectuels de l'époque. On note notamment, celles de Georges Bidault, Charles DuBos, Stanislas Fumet, Jacques Maritain, Maurice Merleau-Ponty, Emmanuel Mounier, Don Sturzo En effet, l'aspect religieux que Franco tente de faire revêtir à la rébellion est intolérable, il appelle à une guerre sainte, une sorte de croisade pour sauver l'Espagne de l'envahisseur Rouge Une stratégie en partie soutenue par le Clergé local mais qui offusque de nombreux chrétiens qui ne peuvent laisser l'Évangile servir d'alibi à de nombreux assassinats perpétrés par les forces nationalistes tout au long de la Guerre (à Badajoz, par exemple, quelques mois plus tôt). [...]
[...] Devant son malheur, ce n'est pas faire le jeu du marxisme que de manifester au monde la profonde unité catholique ( ) Une première analyse de son évolution Un second article[10] qu'il publie le 28 mai, dans Sept[11] cette fois-ci, explique surtout l'incompréhension qu'il éprouve face au drame qu'a dû subir la population Basque Espagnole. Le fervent Chrétien qu'il est ne peut tolérer de tels actes de cruauté. Alors même si Dieu seul est juge François Mauriac avoue ne pas comprendre la position du plus grand de nos maîtres »12. Par ailleurs, le titre de cet article, qu'il publie quelques jours après la parution du Manifeste, Le membre souffrant paraît désigner plusieurs situations. Il est lui-même un membre de la communauté chrétienne et qui, de toute évidence, souffre face aux malheurs qu'essuient les Basques. [...]
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