La France face à l'Angleterre au XIXème siècle (1780-1914)

Résumé du document

"La voie d'industrialisation de la Grande-Bretagne est unique parce qu'elle est première", ainsi Patrick Verley souligne-t-il la singularité et la précocité de l'industrialisation anglaise pouvant être qualifiée de révolution industrielle (expression sans doute inventée par Marx), ayant débuté dès le XVIIIème siècle, et qui suscita de grands bouleversements économiques, techniques et sociaux, avant de s'étendre au reste de l'Europe et aux Etats-Unis.

L'Angleterre s'est ainsi positionnée en "modèle", en leader des pays industrialisés. En ce qui concerne la France, faisant partie des pays du "early-start" (suivant l'Angleterre mais précoces par rapport à de nombreux autres pays européens, aux Etats-Unis et au Japon), elle a débuté son industrialisation au début du XIXème siècle. Les voies empruntées par ces deux pays à la fois se recoupent mais sont pourtant distinctes, au sens où il serait incorrect de croire que la France a reproduit, calqué le modèle anglais (...)

Extraits

[...] En France il faut attendre un demi siècle pour trouver une ville comparable, qui n'est autre que la capitale, Paris. Cependant en France le souci de la formation et de l'élite apparaît plus précocément qu'en Angleterre. On observe la création de lycées, Polytechnique en 1794 (modèle de la grande école avec concours d'entrée au mérite), Arts et Métiers en Cela crée un viver d'ingénieurs, de patrons et d'entrepreneurs. L'Angleterre ne crée des formations d'ingénieurs que dans les années 1840. Pour Joel Mokir c'est la naissance d'une communauté scientifique échangeant le savoir pour faire progresser la technique qui crée le changement. [...]

[...] En 1801, l'Anglais Richard Trevithick présente le premier véhicule routier britannique propulsé à la vapeur. Cependant ce sont incontestablement les français qui dominent ce secteur. Amédée Bollée commercialise en 1873 la première véritable automobile, un véhicule appelée L'Obéissante qui pouvait transporter douze personnes. L'exposition universelle de 1878, à Paris, permet au public et à plusieurs industriels de découvrir ces engins. En 1881, un modèle La Rapide de six places pouvant atteindre 63 km/h est présenté. D'autres modèles suivront, mais la propulsion à vapeur s'avère une impasse en matière de rapport poids/performance. [...]

[...] L'agriculture est donc fragile, sous-productive. Pour Bairoch, c'est la révolution agricole qui permet la révolution démographique. En effet en Angleterre l'augmentation des productions permet la disparition des disettes et par là une hausse de l'espérance de vie, et de subvenir aux besoins d'une population toujours croissante. De 1766 à 1811 le taux d'accroissement annuel de la population britannique est de par an, c'est un record historique. Avec de moins en moins de décès et de plus en plus de naissances, la main d'œuvre se multiplie au même titre que les consommateurs. [...]

[...] Pour Verley, les anglais ont pu et su dominer trois techniques : la machine textile, le charbon et la machine à vapeur. En 1785 Edmund Cartwright met au point le premier métier à tisser mécanique dans le Leicestershire, ainsi en du coton est tissé mécaniquement. L'application industrielle de la machine à vapeur avec condensateur séparé de James Watt brevetée en 1769 commence à partir de 1775, après son association avec Matthew Boulton, propriétaire de la manufacture de Soho, près de Birmingham. [...]

[...] Par là le XIXème siècle est baigné d'un climat d'émulation, de saine rivalité entre ces deux grandes puissances européennes. Comment caractériser cette compétition? Quelles sont les points de convergence, de divergence des industrialisations de ces deux pays? Nous nous proposerons donc de nous pencher sur l'état des forces en présence au seuil du XIXème siècle ainsi que ses origines, pour ensuite voir comment la confrontation franco-anglaise rythme-t-elle la première révolution industrielle (1780-1860). Nous finirons par constater la permanence de l'émulation durant la seconde révolution industrielle (1860-1914) caractérisée par une différence de niveau moins nette. [...]