En 2004, Français et Britanniques fêtent le centenaire de l'Entente cordiale, traité qui n'était en réalité ni une alliance, ni un traité, mais un ensemble hétérogène de documents (une convention et deux déclarations) signés à Londres le 8 avril 1904. Ainsi on ne célèbre pas tant cette signature mais davantage les collaborations qui se transformèrent en une amitié certaine après les épreuves que furent notamment les deux guerres mondiales. La première moitié du XXe siècle a ainsi été pour la France et la Grande-Bretagne un jeu d'avancées et de reculades quant à la construction de leur alliance, décisive durant les guerres. Mais l'Entente cordiale en elle-même n'est pas déterminante pour comprendre leurs comportements face au conflit, il faut d'avantage questionner le contexte historique et les sentiments des deux peuples, teintés à la fois de méfiance et d'admiration, qui façonnèrent les acteurs et leurs décisions durant plus de quarante ans (1904, signature de l'Entente cordiale à 1945, fin de la seconde guerre mondiale) de cohabitation face à l'adversité. Jack Straw, l'actuel secrétaire d'Etat au Foreign Office, résume ainsi : « Jamais deux pays n'auront entretenu une relation aussi influencée par l'Histoire que le Royaume-Uni et la France ». En somme, il semble opportun de comprendre en quoi les comportements des Français et des Britanniques face à la guerre ont sans cesse été influencés par la question de la construction d'une alliance stable et pérenne. Pour répondre clairement, il paraît justifié d'aborder le sujet chronologiquement : il sera tout d'abord nécessaire de voir quels ont été les comportements des Français et des Britanniques face à la première guerre mondiale en regard avec la naissance de l'Entente cordiale ; il apparaîtra ensuite important de comprendre l'attitude des Français et Britanniques dans le second conflit mondial à travers le prisme notamment des responsabilités réciproques (l'appeasment de l'entre-deux-guerres) et de la reconstruction de leur alliance.
[...] Des gouvernants de rencontre ont pu capituler, cédant à la panique, oubliant l'honneur, livrant le pays à la servitude. Cependant rien n'est perdu Une partie de la France va prendre un tournant en se ralliant au général De Gaulle et par voie de conséquence se rapprocher des Britanniques. Avant et, surtout, aussitôt après l'appel du général le 18 juin 1940, la question était en effet posée du devenir des milliers de militaires et marins français qui se trouvaient en GB. [...]
[...] Sir Edward Grey était un homme de paix, mais il croyait à l'équilibre des puissances et il fut assez vite convaincu que l'Angleterre avait intérêt à s'engager, mais qu'elle ne le ferait pas si l'opinion publique n'avait pas d'abord été gagnée à l'idée de sa nécessité. C'est pourtant ce qui se passa. Ce fut au matin du 3 qu'il décida de faire de l'invasion de la Belgique un casus belli. Français et Britanniques allaient à partir de cette date faire cause commune pour gagner la guerre. Indispensable, pour le financement de la guerre, la politique d'achat (acheter beaucoup pour éviter que l'Allemagne le puisse) et les transports, la coopération était d'abord économique. [...]
[...] Par conséquent, même si ce n'est pas l'Entente cordiale en elle-même la mère de la Triple Entente par exemple, elle doit être comprise comme la source de la période de relative bonne volonté des Français et Britanniques qui suivit et qui permit une meilleure organisation conjointe face à une guerre en préparation. Quant débute la crise de juillet 1914, entre la Serbie et l'Autriche- Hongrie, déclencheur de l'engrenage des alliances, il est tout à fait improbable que l'Angleterre intervienne. Dans les tout derniers jours, au moment où l'entré de la France apparaît de plus en plus inévitable et que la mobilisation décrétée le 1er août, le souci lancinant est de savoir ce que va faire l'Angleterre. [...]
[...] En France, rares sont ceux qui sont favorables à une politique de fermeté face à l'Allemagne, comme Paul Reynaud ou Jean Zay. Dans ce contexte de méfiance réciproque et d'appeasment plus ou moins revendiqué, Français et Britanniques ont du mal à trouver un terrain d'entente. Par exemple, en mars 1938, alors que la France conclut un traité avec la Tchécoslovaquie, la Grande-Bretagne ne suit pas. Cette politique d'impuissance devant l'Allemagne trouve son paroxysme dans les accords de Munich de septembre 1938 : l'annexion de la Tchécoslovaquie, qui ne fit pas réagir la France, est entérinée, et semble ainsi être le symbole à la fois du dangereux appeasment et du désaccord franco-britannique : pour Daladier, Hitler veut détruire la Tchécoslovaquie, tandis que Chamberlain pense qu'il n'en fera qu'un état fédéral. [...]
[...] Dans les unités combattantes des trois armées, les actions menées aux côtés des alliés britanniques ont rapidement créé une véritable fraternité d'armes entre Français et Anglais, et ce sentiment était si solide et si naturel qu'il ne subissait pas le contrecoup des rapports souvent difficiles entre Churchill et De Gaulle, à propos par exemple de Madagascar (les Anglais avaient débarqué militairement en mai 1942 sans en informer au préalable les Français). Ainsi la résistance apportait de précieuses informations aux Britanniques, leur ayant ainsi permis de mettre sur pied le Special Operations Executive, le service de renseignement, et réciproquement les divisions françaises libres étaient souvent équipées pas la Grande- Bretagne. La nature particulière des relations entre Anglais et Français libres explique qu'elles ont survécu à la guerre. [...]
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