L'école française, derrière René Rémond et ses épigones, considère que le fascisme en France constitue un phénomène plutôt secondaire et même à maints égards marginal. Pour cette école, Vichy est d'abord le produit de la droite traditionaliste, autoritaire et conservatrice française. Vichy serait l'aboutissement du bouillonnement idéologique et politique des ligues et mouvements d'extrême droite qui se sont manifestés de la fin du XIXe siècle aux années 1930. En effet, de la fin du XIXe siècle aux années 1930, l'extrême droite française et la France plus généralement paraissent échapper largement au phénomène fasciste. Le régime de Vichy, pour une large part aussi, se distingue du fascisme
[...] Déjà, le boulangisme s'était manifesté dans un contexte d'industrialisation et d'urbanisation. Il cristallisait le mécontentement des couches populaires à l'égard de la classe politique. C'était un avatar de la tradition bonapartiste. Il associait l'appel au peuple et la confiance à un homme, la passion de la grandeur nationale et l'aspiration à une certaine justice, la démocratie directe et l'exercice de l'autorité, la détestation des notables libéraux et la critique des parlementaires. Au terme de leur trajectoire, l'électorat et le personnel bonapartistes se reclassèrent à droite. La droite devient nationaliste. [...]
[...] Le rôle du parti radical est à cet égard fondamental. Enfin, la relative imperméabilité des droites à la contagion totalitaire est certaine. Ce que souhaitent les électeurs de droite, dans leur grande majorité, ce n'est pas la substitution d'une dictature au régime représentatif, mais simplement le renforcement de l'exécutif et la moralisation de la vie politique. L'homme fort qu'ils attendent, c'est plus quelqu'un de la trempe de Clemenceau ou Poincaré qu'un Führer ou un Duce. Par conséquent, si le fascisme n'a pas réussi à se constituer en France en une nouvelle droite à vocation hégémonique, c'est parce que le terrain était trop anciennement occupé Malgré tout, un fascisme français très minoritaire et secondaire a tout de même existé Il y a certes bien eu entre les deux guerres et pendant le second conflit mondial un fascisme français, mais celui-ci était incarné par un petit nombre d'organisations aux effectifs squelettiques et politiquement marginales, comme le francisme de Bucard, Solidarité française de Jean Renaud ou le frontisme de Gaston Bergery. [...]
[...] Le fascisme n'a pas véritablement réussi à s'implanter en France Les raisons de l'échec de cette implantation Plusieurs raisons objectives expliquent cet échec. Premièrement, le France appartenait au camp des vainqueurs et des pays satisfaits, alors qu'en Allemagne et en Italie le fascisme s'était nourri des frustrations produites par les traités. Deuxièmement, les effets de la grande dépression des années trente ont été relativement modérés en France. La crise a été plus tardive et n'a provoqué ni une déstructuration comparable à celle qui a affecté la société allemande, ni une véritable menace révolutionnaire. [...]
[...] Les tendances de droite extrême qui se sont manifestées de la fin du XIXe siècle aux années 1930 ne sauraient être assimilées globalement à un pré-fascisme ou à un fascisme, puisqu'elles résultent de traditions et d'inspirations nationales. S'il est vrai qu'une certaine dérive fasciste s'est manifestée dans les derniers mois du régime de Vichy, celle-ci est imputable à la présence de l'occupant, qui a promu des membres des milieux ultra-collaborationnistes, qui eux se rattachent à un fascisme véritable, mais qui n'a jamais rencontré un écho réellement significatif dans la population française. [...]
[...] Le thème du retour à la terre illustre parfaitement la sensibilité et la mentalité agrariennes constitutives de l'organicisme traditionaliste. Vichy réprouve aussi les abus du capitalisme et la lutte des classes. Il prône un ordre corporatif. Le régime voulait aussi restaurer les valeus spirituelles traditionnelles, symbolisée par l'alliance du pouvoir et de l'Eglise, d'où un retour du cléricalisme. Par conséquent, la Révolution nationale se distingue foncièrement du fascisme et se rattache à une tradition bien française. Son nationalisme est plutôt un patriotisme d'ancien régime confondu avec le loyalisme à la personne du monarque. [...]
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