Il apparaît alors légitime de s'interroger sur la République naissante : comment l'Allemagne parvient-elle, qui plus est sous tutelle politique, à instaurer un système partisan efficace, véritable clef de voûte de son régime politique ? Comment la pérennité de ce système est-elle assurée, et la démocratie protégée ? Quelles sont les conséquences à long terme de ce « régime des partis », pour paraphraser De Gaulle, et dans quelles conditions la négociation s'opère-t-elle ?
Nous répondrons à toutes ces questions et essaierons de comprendre les mécanismes de ce système stabilisateur qui n'est pas immobilisme ainsi que son évolution ces cinquante dernières années en observant dans un premier temps l'« électrochoc » qu'a constitué l'année 1945 pour l'établissement de ce système inédit avant de nous intéresser au processus de concentration de la vie politique qui a été la conséquence directe du jeu des partis tel qu'il avait été mis en place. Enfin, nous terminerons par un regard sur les évolutions récentes qui changent la donne avec une complexification due à la multiplication des forces politiques et donc qui introduisent de nouveaux enjeux
[...] D'ailleurs, il se proclame pluriconfessionnel, même si ce but n'est que partiellement atteint avec 73% de catholiques parmi les adhérents. Le parti libéral doit lui aussi annoncer clairement sa couleur politique, et c'est lorsqu'il est dans l'opposition qu'il s'oriente vers un libéralisme de gauche rendu manifeste par les thèses de Fribourg de 1971. Il opte alors pour un libéralisme social et démocratique et se place ainsi entre le SPD et la CDU-CSU sur l'échiquier politique pour mettre fin à son clivage interne entre libéralisme et tendance plus sociale. [...]
[...] L'absence de légitimité de part et d'autre oblige à négocier non seulement les postes ministériels, mais aussi les politiques à mettre en œuvre. Au total, ce ne sont pas moins de 250 négociateurs qui initient cet accord, véritable partage du pouvoir : le SPD obtient 8 ministres dont la Santé, la Justice, les finances et les Affaires étrangères (traditionnellement attribué au président du deuxième parti de coalition, comme Fischer auparavant) tandis que la CDU obtient 6 ministères en plus de la Chancellerie. [...]
[...] Les élections suivant cette révision radicale de leur politique sont un test décisif (en Bade-Würtemberg en 1960) qui s'avère concluant : le SPD gagne tandis que la CDU enregistre un recul de 3,2%. Des records sont battus en 1963 à Berlin avec 61,9% des voix, d'où l'organisation à l'échelle fédérale d'un gouvernement de coalition SPD-FDP. Le recrutement s'élargit et touche désormais les cadres et les classes moyennes, alors en plein essor. Le parti dépasse le million d'adhérents dans les années 1970, et passe de 45% d'ouvriers en 1952 à 25% en 1990 (contre 26% d'employés). [...]
[...] Encore faut- il, pour recourir à cette interdiction formelle visant à garantir l'ordre constitutionnel, que les partis politiques en question soient structurés et susceptibles d'exercer une influence certaine à l'échelle fédérale. C'est notamment la raison pour laquelle les formations néo-nazies agissant au niveau des Länder n'ont pas été supprimées, bien que les entités fédérées aient été priées de garder un contrôle sur l'évolution de tels groupuscules. Si les juges constitutionnels justifient la légitimité de leur intervention potentielle par l'idée qu'un régime démocratique ne peut tolérer des forces politiques faisant l'apologie de sa destruction, ce qui serait certes suicidaire, l'interdiction de certaines formations fait toujours débat : faut-il préférer la stabilité gouvernementale à la liberté d'expression ? [...]
[...] Alors qu'elle n'avait pas de tradition parlementaire particulièrement ancrée, l'Allemagne devient en 1945 un modèle de parlementarisme rationalisé. Le système de partis qui émerge alors, sans rapport direct avec Weimar, fonde une démocratie du compromis et de la négociation, deux principes fondamentaux qui conduisent à une stabilité gouvernementale effective pendant un demi-siècle. Il apparaît alors légitime de s'interroger sur la République naissante : comment l'Allemagne parvient-elle, qui plus est sous tutelle politique, à instaurer un système partisan efficace, véritable clef de voûte de son régime politique ? [...]
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