Un demi-siècle nous sépare de la grande vague des indépendances. De même, pour ce qui est des mentalités, pour beaucoup de contemporains, la colonisation et l'impérialisme sont des phénomènes dont les Européens ne devraient pas être fiers.
Pourquoi tant d'Européens ont-ils voulu célébrer, participer à la colonisation aux XIXe et XXe siècles ? Comment expliquer que s'il semble avoir existé un temps de la colonisation, lui a succédé une période d'inéluctable décolonisation ?
[...] La Grande Guerre a consolidé le consensus colonial parmi les pays vainqueurs. Les peuples colonisés et dominés n'ont pas profité du conflit en Europe pour se révolter. Il faut attendre les années 20 et la guerre du Riff au Maroc. En revanche, la participation des peuples colonisés à l'effort de guerre français et britannique a été importante et cela contribue à renforcer un mythe colonial antérieurement existant. D'autre part, le fait que la France et le Royaume-Uni reçoivent de la SDN l'administration de territoires en mandat contribue à renforcer ce mythe impérial. [...]
[...] Seules quelques minorités sont donc opposées à la colonisation Le mythe impérial s'enracine en profondeur dans les sociétés européennes. L'empire a prouvé son utilité durant la Grande Guerre et de la part des vainqueurs, les empires sont perçus comme une source de fierté, de grandeur et comme attributs de puissance. Le succès de l'exposition coloniale de 1931 reçoit des milliers de visiteurs en quelques mois et permet de glorifier l'œuvre civilisatrice de la République dans tous les domaines (scolaire, médical, infrastructures, exploitation des richesses). [...]
[...] Enfin, la création de l'ONU joue en défaveur des puissances coloniales avec une charte qui met en avant le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Or, en 1945, les puissances européennes ne sont pas disposées à abandonner leurs empires. L'hostilité tient à des raisons stratégiques, politiques et culturelles. L'empire colonial demeure aux yeux des métropoles un attribut de puissance et c'est aussi par l'empire que les puissances européennes ont pu réellement compter parmi les combattants (France libre et Royaume- Uni). La nature de la relation entretenue avec l'empire des ambiguës (conférence de Brazzaville où toute idée d'indépendance ou d'autonomie est écartée par DE GAULLE). [...]
[...] Dans le cas des Britanniques, la colonisation a impliqué des implantations outre-mer d'effectifs beaucoup plus importants que ce ne fut le cas pour les Français. Au Royaume-Uni dans l'Entre-deux-guerres, on a dans chaque famille des parents vivant outre-mer. Le mythe impérial est également très fort au Portugal, en Espagne, en Italie : trois pays qui, durant l'Entre-deux-guerres, sont gouvernés par des dictatures. L'idée coloniale et la puissance coloniale deviennent facteur de consensus politique et de légitimité intérieure pour le régime. [...]
[...] La plupart des dirigeants européens ne comprennent pas les mouvements nationalistes. Le mythe impérial est tel que l'on ne comprend pas pourquoi les indigènes ne voudraient pas bénéficier de tels avantages. Cela conduit donc à percevoir les nationalistes tout à la fois comme des minorités coupées de leur propre peuple, ou comme des groupes manipulés par des puissances étrangères afin d'affaiblir globalement la métropole. Derrière les mouvements nationalistes, on va voir soit la main des Soviétiques, surtout depuis l'organisation en 1920 du congrès des peuples d'Orient à Bakou, soit la main de l'Allemagne, surtout devenue nazie, ou de l'Italie fasciste, ou du Japon impérial, et parfois même de la France ou du Royaume-Uni. [...]
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