[...]
Cf. Yves Durand, "L'Europe des collaborateurs et des collaborationnistes", in Michel Dumoulin, Plans des temps de guerre pour l'Europe d'après-guerre 1940-1947, Bruxelles, Bruylant, 1995.
Collaboration et collaborationnisme forment deux pôles différents qui sont susceptibles de s'interpénétrer et l'Europe forme leur principal thème de rencontre.
Collaborateurs et collaborationnistes acceptent tous l'hégémonie allemande sur le continent. Les collaborateurs l'admettent comme une nécessité découlant d'une victoire allemande qui leur paraît durable. S'intégrer dans l'Europe allemande leur semble une condition nécessaire pour préserver la souveraineté, l'unité nationale, les intérêts nationaux. Il y donc acceptation de l'hégémonie de l'Allemagne nazie, ce qui, chez les collaborateurs, n'implique cependant pas un ralliement au nazisme. Pour les collaborationnistes, l'entrée dans l'ordre nouveau européen n'est pas seulement une affaire de rapports de force. Il y allégeance au Führer, ordonnateur de l'Europe nouvelle. Certains collaborationnistes se veulent même plus nazis qu'Hitler. C'est le cas, aux Pays-Bas, de Van Tonningen et de Mussert. Van Tonningen est ainsi partisan d'une intégration pure et simple de son pays au Reich, parce qu'il considère que ses compatriotes sont, au sein de la race germanique, supérieurs aux Allemands eux-mêmes.
Indépendamment même de ces positions étranges, le nouvel ordre européen nazi fait des adeptes parmi un certain nombre de nationalistes exacerbés qui voient en Hitler l'émancipateur de leurs nations ou de leurs ethnies opprimés. Slovaques pour la Tchécoslovaquie, Croates et Musulmans pour la Yougoslavie, Bretons, Flamands, Corses, Algériens pour la France. La revendication séparatiste se teinte assez souvent de racisme, par contamination du nazisme. Le discours est quelquefois étrange, comme chez les Bretons, qui, ne pouvant s'affirmer de race germanique, se proclament nordiques par opposition aux Français latins. Autre cas assez curieux, celui du Wallon Degrelle, qui s'affirme de race germanique. Les collaborationnistes français ne vont pas aussi loin, mais ils n'en considèrent pas moins que le racisme devra constituer l'une des bases de la future Europe.
Cette Europe future se construit dans le cadre de la guerre. Les collaborationnistes poussent à cette guerre. Dans le cas français, ils n'hésitent même pas à le faire sous l'uniforme allemand : c'est le cas de la LVF. Les collaborateurs roumains, finlandais, hongrois, slovaques et espagnols de la légion azul participent eux aussi au combat contre l'URSS, mais sous leur propre uniforme (...)
[...] Il ne souhaite pas non plus qu'une union de l'Europe occidentale aboutisse à un bloc économique fermé tendant à l'autarcie. La position arrêtée par le CFLN le 16 octobre 1943 évoque un ensemble économique ouest-européen où la France aurait un grand rôle. Pour le général de Gaulle, ce projet de fédération de l'Europe occidentale aurait l'avantage de maintenir la masse allemande à l'ouest. Les problèmes posés par une intégration économique de l'Europe occidentale apparaissent cependant fort complexes. Comment l'agriculture peut-elle s'adapter ? [...]
[...] Une union économique de ce type s'impose d'autant plus que seuls les grands espaces économiques organisés resteront viables et puissants après la guerre : ce qui subsistera de l'Empire britannique, les Etats-Unis, le Japon, la Chine. Le monde se réorganise en effet autour de types d'Etats plus vastes qu'autrefois. Dans ces conditions, si l'Europe ne veut pas être écrasée entre ces géants, elle doit se fédérer. II) Les plans des alliés pour l'Europe libérée A. Les plans des trois Grands. À partir de 1943, les Alliés savent qu'ils vont remporter la victoire finale. Ils peuvent donc réfléchir à l'organisation future de l'Europe, une fois que la paix sera rétablie. [...]
[...] Ces organes seraient par ailleurs un moyen de réintégrer l'Allemagne, placée sous surveillance, en Europe et de contenir l'influence des Soviétiques. Mais Roosevelt est hostile à ce projet, ce qui entraîne son échec. La guerre n'empêche pas la mise en place d'un groupement régional. Il s'agit bien sûr de la décision prise par la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, de former à la Libération une union douanière et économique, le Benelux. Celui-ci prend pour Spaak la place de l'union douanière franco-belge qu'il avait d'abord souhaitée. [...]
[...] L'année 1944 est marquée par l'avancée des Soviétiques en Europe orientale. Quant aux Américains, ils sont à cette date surtout préoccupés par le futur ordre mondial. En octobre 1944, Britanniques et Soviétiques parviennent à un compromis qui permet au Royaume-Uni de conserver la Grèce, qui est alors d'un intérêt vital pour les intérêts du Royaume-Uni en Méditerranée, en échange du reste de l'Europe balkanique, pratiquement abandonnée à Moscou. Pour contenir les ambitions des deux grands en Europe, Churchill cherche par ailleurs à rétablir la France sur la scène internationale. [...]
[...] Quelle orientation faut-il donner à l'Europe future ? Doit-elle être atlantique ou favorable aux Soviétiques ? L'Europe doit-elle être seulement économique ou partir de l'économie pour aller vers le politique ? D'une façon générale, les mouvements de Résistance estiment en tout cas que le nationalisme est devenu une impasse. La paix ne peut être solidement établie que dans un cadre international. Il est vrai que les Français imaginent volontiers que la France pourrait jouer un rôle particulier dans cette construction européenne. [...]
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