Après 1918 et alors que l'Europe sort tout juste du traumatisme de la Grande Guerre, on repense à la période qui précède la guerre et, par comparaison, avec le tragique de la situation du moment on qualifie les années du début du XIXe de « Belle Époque ». A l'évidence, l'expression correspond à une « image d'Épinal rétrospective » : cette vision des choses est déformée par l'horreur de la guerre et ne présente qu'une version positive et arrangeante de la situation d'alors ; rétrospective car le terme a été forgé a posteriori.
Par bien des côtés, la situation qui s'étend de 1896 à 1914 correspond à une époque hors-norme : l'Europe domine économiquement, politiquement et culturellement le monde. C'est un temps de progrès perpétuel, de rayonnement extérieur et de richesse inédite pour l'Europe – plus précisément pour les trois pays avant-gardistes : la Grande-Bretagne, l'Allemagne et la France. Pourtant, c'est aussi une période qui conduit tout droit à la guerre, au cours de laquelle se développent des antagonismes et des conflits lourds de menaces.
[...] L'invention du moteur à explosion est en effet déterminante, car elle va transformer les moyens de circulation et abolir les distances grâce à l'automobile d'abord puis avec l'aéronautique. En 1914, deux millions de véhicules circulent dans le monde, dont la moitié aux États-Unis. La France a connu le mouvement, discontinu, mais ample, de la première industrialisation des années 1780/1820 aux années 1880. Il est brisé par la décélération de la croissance, avec la Grande Dépression des années 1882- 1896. Autour de l'année 1896 s'opère un retournement conjoncturel important : la baisse des prix industriels et agricoles prend fin, la croissance réapparaît. [...]
[...] Elle repose sur une politique cohérente et volontaire, inspiré au ministre des Finances, Serge Witte, par l'exemple allemand. L'État finance la construction du réseau ferroviaire, qui passe de kilomètres en 1860 à plus de en 1904. Une législation douanière protectionniste facilite la création d'usines. L'essor est rapide, mais irrégulier, car l'activité industrielle reste très dépendante des commandes de l'État. La crise de 1901-1903 est une crise de surproduction, directement liée au ralentissement du programme ferroviaire gouvernemental, après 1900. À la vieille de la guerre, la politique d'armement du budget de l'État) et l'apparition d'un capitalisme national donnent une impulsion nouvelle (1906-1914). [...]
[...] En plus de cela, il existe une idée très forte à l'époque : la croyance en une mission civilisatrice pour l'Europe. Pour beaucoup, et surtout pour des hommes influents, il y a la conviction de la supériorité matérielle et intellectuelle de la civilisation européenne. Le poème de l'écrivain britannique Rudyard Kipling Le Fardeau de l'homme blanc en est l'expression la plus connue : les Européens ont reçu la mission de répandre, voire d'imposer, leur civilisation dans le monde. Ainsi, il faut faire un effort de scolarisation des autres peuples et participer à la diffusion de l'anglais et du français. [...]
[...] Dans ce dynamisme économique et industriel, le rôle et le poids de l'État sont décisifs : il réalise l'infrastructure des moyens de transport. Étatisé et harmonisé, le réseau ferré permet de quintupler le trafic, les voies navigables et canaux sont également aménagés. La flotte fluviale triple en vingt-cinq ans. En outre, l'État contrôle le marché financier par l'intermédiaire de la Reichsbank et les caisses d'épargne ; il a mis en place une législation douanière qui protège l'agriculture, freine les importations et favorise les exportations industrielles ; enfin, ses commandes militaires et navales stimulent la production. [...]
[...] Ainsi, les Empires Austro-hongrois, allemand et russe sont un facteur de troubles et de tensions grandissantes. En 1914, en effet, États et nations européennes ne coïncident pas toujours. Parmi les nombreux problèmes de minorités nationales que le XIXe n'a pu régler au cœur des Empires, les plus dangereux pour l'équilibre européen sont ceux qui peuvent servir de prétexte à des interventions des grandes puissances. Au centre et à l'est de l'Europe Les forces de déstabilisation les plus importantes se situent au cœur de l'Europe, dans l'empire multinational d'Autriche-Hongrie (voir carte) : Les Tchèques, au nord de l'empire, insistent de plus en plus pour constituer une nation. [...]
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